Ils assistaient à un festival de musique : deux soldats israéliens interrogés par la justice pour suspicions de crime de guerre
C'est une première en Europe : deux soldats israéliens ont été auditionnés ce dimanche 20 juillet par la police belge, dans le cadre d'une enquête pour crimes de guerre et génocide, a annoncé le Parquet fédéral belge dans un communiqué de presse.
Les deux hommes, dont l'identité n'a pas été révélée, ont été repérés par deux ONG alors qu'ils assistaient au festival de musique électronique Tomorrowland, à Boom, au sud d'Anvers. Après leur audition, les deux soldats ont été relâchés. Le Parquet fédéral précise au Monde qu'il ne s'agissait pas d'une garde à vue. Les deux militaires sont libres de quitter le territoire belge, même si l'enquête reste ouverte.
Deux plaintes déposées auprès du Parquet fédéral belge
Cette audition fait suite au dépôt de deux plaintes déposées auprès du Parquet fédéral belge, vendredi et samedi dernier. Elles émanent de la Fondation Hind Rajab (HRF) et l'ONG Global Legal Action Network (GLAN), un réseau international de juristes spécialisés dans les violations des droits humains. Ces deux plaintes concernent "de graves violations du droit international humanitaire qui auraient été commises dans la bande de Gaza par deux membres de l'armée israélienne", a indiqué le parquet général belge, lundi 21 juillet, rapporte l'Humanité.
Les deux organisations affirment avoir identifié les deux Israéliens au sein d'un petit groupe d'hommes brandissant un drapeau de la "brigade Givati", une unité de l'armée israélienne en première ligne dans la guerre à Gaza, devant la scène de Tomorrowland, ce vendredi. Le journal belge De Morgen rapporte également que les deux militaires ont publié du contenu sur leurs réseaux sociaux, visionné par GLAN.
L'un d'eux aurait partagé sur Instagram une photo de Dreamville, le camping du festival. Sur un selfie, on le voit devant une rangée de tentes, avec cette légende en hébreu : "J'ai l'impression d'être de retour à l'armée." Sa photo de profil Instagram le montre en uniforme, affichant un large sourire. Selon le média, il ferait bien partie d'une unité de l'armée israélienne engagée dans la bande de Gaza. Le second soldat israélien a également été repéré à Tomorrowland grâce à ses publications.
D'après un communiqué de la HRF publié ce week-end, les deux hommes sont accusés d'"attaques aveugles contre des zones civiles, des habitations et des hôpitaux", et d'avoir "recours à la torture et aux boucliers humains" mais aussi aux "détentions arbitraires massives et déplacements forcés de civils". L'ONG belge accuse les deux hommes d'être "directement impliqués dans certains des crimes les plus odieux commis pendant la campagne militaire israélienne".
La Belgique dispose d'une "compétence" dans le dossier
Les deux organisations saluent cette audition, qu'elles qualifient de "première en Europe" depuis le début de l'offensive israélienne à Gaza, lancée en réponse à l'attaque du Hamas en Israël le 7 octobre 2023. "À une époque où beaucoup trop de gouvernements restent silencieux, cette action envoie un message clair : les preuves crédibles de crimes internationaux doivent être traitées par la justice, et non par l'indifférence politique", ont-elles déclaré dans un communiqué diffusé par HRF.
Même si les suspects ne sont pas de nationalité belge et que les faits se sont déroulés à l'étranger, le parquet estime, "après un premier examen de ces plaintes", qu'il pourrait "disposer d'une compétence". Celle-ci repose sur le nouvel article 14/10 du titre préliminaire du Code de procédure pénale belge, entré en vigueur en avril 2024. "Cet article attribue une compétence extraterritoriale aux juridictions belges pour connaître des infractions commises hors de notre territoire et visées notamment par une règle de droit international conventionnelle, en l'espèce les Conventions de Genève du 12 août 1949 relatives aux crimes de guerre et la Convention des Nations unies contre la torture du 10 décembre 1984" a détaillé le parquet. Pour l'heure, l'enquête est en cours.