"GenZ 212" au Maroc : qu'est-ce que ce mouvement de jeunes qui secoue le pays ?

"GenZ 212" au Maroc : qu'est-ce que ce mouvement de jeunes qui secoue le pays ? A l'appel du collectif GenZ 212, de violentes manifestations ébranlent le Maroc depuis une semaine. Revendications, affrontements... On fait le point sur cette vague de violences qui a déjà coûté la vie à trois personnes.

La violence ne cesse de croître au Maroc. Depuis la mi-septembre et la mort à l'hôpital public d'Agadir de huit femmes enceintes admises pour césariennes, un mouvement social spontané issu de la jeunesse, baptisé "GenZ 212", est à l'origine des premiers grands rassemblements organisés à travers le pays. Ce mouvement, qui compte 150 000 membres sur sa page Discord, se présente comme un groupe de "jeunes libres" sans affiliation politique. Il se dit pacifique et réclame de meilleurs services de santé, d'éducation et la fin de la corruption.

Dans la nuit du jeudi 2 au vendredi 3 octobre 2025, après une sixième soirée consécutive de manifestations, le collectif marocain a appelé à la démission du gouvernement. "Nous demandons la dissolution du gouvernement actuel pour son échec à protéger les droits constitutionnels des Marocains et à répondre à leurs revendications sociales", a déclaré GenZ 212 dans un communiqué adressé au roi du Maroc, Mohammed VI. Il réclame aussi l'ouverture d'un "processus judiciaire équitable" pour poursuivre les responsables de corruption.

Trois morts dans une tentative de "prise d'assaut"

Si des rassemblements pacifiques ont eu lieu à Casablanca, Marrakech et Agadir, depuis le début de la contestation, c'est la veille que tout a basculé et que le niveau de violence a largement grimpé. Dans la soirée du mercredi 1er octobre, trois personnes ont perdu la vie, abattues par les forces de l'ordre lors d'une violente tentative de "prise d'assaut" d'un poste de gendarmerie dans le sud du Maroc, ont indiqué les autorités locales, des propos relayés par l'agence officielle MAP. Les faits se sont déroulés à Lqliaa, près d'Agadir. Il s'agit de l'incident le plus grave depuis le début de cette vague d'émeutes.

Selon les autorités, des groupes d'individus avaient l'objectif de "s'emparer de munitions, de matériels et d'armes de service". Afin de "repousser cette attaque et cette prise d'assaut", les gendarmes "ont été contraints de faire usage de leurs armes de service, dans le cadre de la légitime défense", précise le communiqué officiel. Enfin, à Salé - ville collée à Rabat - des individus cagoulés ont incendié deux voitures de police et une agence bancaire.

GenZ 212 "rejette toute forme de violence"

Au Maroc, les inégalités sociales, les disparités régionales et l'écart abyssal entre les secteurs public et privé continuent de cristalliser les tensions et sont désormais dénoncées par le collectif GenZ 212. Le mouvement se décrit aussi comme un "espace de discussion" et assure agir par "amour de la patrie et du roi". Il dit "rejeter toute forme de violence, de vandalisme ou d'émeute" et exhorte les manifestants "à respecter le caractère pacifique" du mouvement. De son côté, le Premier ministre marocain a affirmé la volonté de l'exécutif de "répondre aux revendications sociales" des jeunes et "sa disposition à dialoguer".

Outre les revendications en faveur de la santé, de l'éducation et contre la corruption, la colère du peuple marocain - illustrée ces derniers jours par la jeunesse - s'organise aussi autour de la réforme de l'enseignement supérieur examinée cet été par le gouvernement. Les syndicats y voient notamment une menace sur le principe de gratuité et un risque de privatisation.

Enfin, les organisations de la Coupe d'Afrique des Nations à partir du 21 décembre prochain puis de la Coupe du monde 2030 (avec l'Espagne et le Portugal) par le royaume ne passent pas. La construction de stades, l'extension du réseau à grande vitesse et la modernisation de plusieurs aéroports attisent la contestation : "les stades sont là, mais où sont les hôpitaux ?", fustigent les manifestants ces derniers jours dans les rues. Un slogan entendu dans plusieurs villes du Maroc et qui ne semble pas prêt à faiblir.