La démission d'Emmanuel Macron inéluctable selon certains, inutile pour d'autres
Que changerait vraiment la démission d'Emmanuel Macron à la crise politique ? Son départ pourrait constituer une solution, mais sans éliminer tous les blocages.
La France est ingouvernable et jusqu'à présent, personne n'a la solution pour sortir de l'impasse politique. La chute du gouvernement Barnier met en évidence la crise institutionnelle que la France traverse. Comme il n'existe aucune majorité à l'Assemblée et puisque aucune force politique des trois blocs (NFP- Socle macroniste-LR - RN) ne veut travailler dans une coalition gouvernementale, il est impossible pour un Premier ministre, quel qu'il soit, d'apparaître légitime pour une majorité de députés.
Pour sortir de la crise, Emmanuel Macron a tenté, avec le gouvernement Barnier, un montage reposant sur une béquille étonnante à bien des égards : avoir l'aval du RN et sa promesse de ne pas censurer a priori le locataire de Matignon. Cela aurait tenu trois mois et aura poussé le locataire de Matignon à une déférence inédite pour l'extrême droite. En vain.
Et maintenant ? Comment sortir de l'impasse ? La question de la démission d'Emmanuel Macron n'est pas - ou n'est plus - une revendication pavlovienne de certains opposants frustrés. L'hypothèse est désormais considérée très sérieusement par des personnalités politiques n'étant ni de gauche ni d'extrême-droite. "Il n’y a plus qu’une solution, c’est une nouvelle élection présidentielle. Il faut qu’elle soit anticipée", a notamment plaidé le LR Jean-François Copé sur BFMTV le 27 novembre. Une déclaration qui a marqué les esprits, donnant un son neuf à une revendication que l'on entendait jusque-là au sein de LFI ou du RN. "Que Copé, membre d’un parti de gouvernement, ouvre la brèche de la démission, c’est dangereux. D’autres peuvent s’y engouffrer. Tout ça peut aller très vite", s'agaçait alors un ministre auprès du Parisien.
Marine Le Pen, dont le rôle dans cette censure a été déterminant, a fait une déclaration publique dans la salle des 4 colonnes de l'Assemblée nationale le 2 décembre : la présidente des députés RN a considéré devant la presse qu'Emmanuel Macron n'avait que trois solutions : la dissolution (qu'il ne peut décider qu'à partir de juin), un remaniement (qui selon elle ne servirait à rien) et sa propre démission. Comprenne qui voudra.
Mais il faut en réalité sortir la question de la démission du président d'un prisme partisan ou militant. Elle se pose désormais de plus en plus sur le plan institutionnelle, tout le monde cherchant un moyen d'assurer à nouveau au pays de la stabilité. "Qui est à l’origine du chaos politique ? C’est bien le président de la République lorsqu’il a fait cette dissolution que même ses propres amis n’ont pas comprise", s'est à ce titre interrogé le 27 novembre Charles de Courson, rapporteur général du budget, et cadre du groupe parlementaire Liot, pourtant représenté au gouvernement Barnier, depuis la nomination de Valérie Létard.
Une élection présidentielle en 2025 ?
Mais la démission du chef de l'Etat peut-elle vraiment ouvrir un nouveau chapitre ? Il faut d'abord avoir en tête que rien ne l'oblige à mettre un terme à son mandat avant mai 2027. Il a même plusieurs fois fait savoir qu'il ne démissionnerait pas, se considérant comme garant de la stabilité des institutions. Le chef de l'Etat estime par ailleurs qu'alors que l'Europe fait face à la guerre en Ukraine et à des menaces internationales de plus en plus intenses, la voix de la France pourrait être affaiblie si la présidence de la République était démise.
A la presse qui lui posait ouvertement la question de son départ de l'Elysée, alors que le président était cette semaine en déplacement en Arabie saoudite, il a répondu : "Ça n’a pas de sens. C’est franchement pas à la hauteur de dire ces choses-là. Si je suis devant vous c’est que j’ai été élu deux fois par le peuple français".
Surtout, la démission du président ne changera en rien la composition de l'Assemblée nationale, qui ne peut être dissoute avant l'été 2025. A l'Elysée, les proches du président martèlent à l'envi qu'un départ d'Emmanuel Macron serait inutile et d'apporter pas de réponses. Puisque les élus de l'Assemblée sont indéboulonnables jusqu'à fin juin au minima, le président doit donc proposer une solution qui leur convienne : un nouveau gouvernement apolitique, technique, ou un gouvernement politique mais qui donnera des gages à suffisamment d'élus. Marine Le Pen et son groupe pourraient se satisfaire d'un nouveau Premier ministre qui leur promettrait une réforme instaurant la proportionnelle aux législatives et une loi Immigration. L'équation est complexe, mais pas hors de portée pour le chef de l'Etat.
Et si cela ne suffit pas ? Ou si un gouvernement est nommé mais ne tient que quelques semaines ? Alors le capital de légitimité du président sera très impacté, il sera perçu comme la source de cette crise sans fin. Si Emmanuel Macron change d'avis et décide de démissionner, il ouvrira alors une séquence pouvant apporter de la clarté : le nouveau président pourra revendiquer sa victoire du suffrage universel et même les députés devront prendre en compte le choix des électeurs pour composer une nouvelle coalition en intégrant la ligne sur laquelle le président aura été élu. Même si ce scénario promet aussi des casse-tête pour le prochain exécutif, il aurait l'avantage de mettre un coup de pied dans la fourmilière et de recomposer les alliances de groupe à l'Assemblée.
Si Emmanuel Macron démissionne, il semble plutôt logique qu'il attende le début de l'année 2025. Le président du Sénat serait chargé de l'intérim en attendant l'organisation d'une nouvelle élection présidentielle. Celle-ci doit être organisée "vingt jours au moins et cinquante jours au plus après l'ouverture de la vacance ou la déclaration du caractère définitif de l'empêchement". Par exemple, s'il démissionne le 20 janvier, le 1er tour pourrait se dérouler au plus tôt le 11 février. En revanche, le 2e tour ne pourrait pas avoir lieu plus tard que le 11 mars.
16:41 - Jordan Bardella n'appelle pas le président à démissionner
Jordan Bardella, interrogé ce mercredi sur France inter, s’est dit "respectueux" des institutions de la Ve République et des institutions. "Emmanuel Macron a été élu pour une durée de deux fois cinq ans et rien ne justifie au moment où l’on se parle que le président de la République s’en aille". Rappelons que Marine Le Pen n’a pas appelé à son départ, mais a tout de même laissé entendre que sa démission serait une porte de sortie à la crise que connait le pays. Le Monde révèle d'ailleurs ce mercredi que la patronne du groupe RN et leader de l'extrême n'a pas passé de consignes aux élus, chacun étant libre de donner son sentiment sur la présence d'Emmanuel Macron à l'Elysée.
03/12/24 - 12:12 - Jean-Luc Mélenchon appelle Emmanuel Macron à la démission
"Puisque le pays n’a pas voulu donner de majorité au parti d’Emmanuel Macron, puisque l’Assemblée nationale n’a pas donné sa confiance au gouvernement qu’il a nommé, puisqu’il n’y a pas de majorité pour adopter son budget, alors, […] il faut que le président démissionne", a écrit le leader de La France insoumise sur son blog, dans un long commentaire sur le 49.3 employé par Michel Barnier et sur la motion de censure qui sera votée - sauf surprise - ce mercredi. "Il faut que le président démissionne pour que l’on puisse voter, que le président démissionne parce que le seul souverain dans ce pays, c’est le peuple. Que le président démissionne parce qu’il faut bien que l’on tranche entre les grandes options qui se présentent à nous", plaide-t-il encore. "Combien d’autres Michel Barnier a-t-il l’intention d’user avant de tirer les conclusions qui s’imposent et assumer ses responsabilités personnelles ?", s'interroge-t-il ?
02/12/24 - 15:50 - "Jamais Macron ne démissionnera"
Un ministre interrogé par Le Parisien, veut croire que même si le gouvernement tombe avec une censure, le chef de l'Etat ne rendra pas son tablier. "Jamais Macron ne démissionnera. Il réfléchit à la trace qu’il va laisser dans l’histoire. Il nommera un gouvernement Barnier 2, 3, 4 ou 5 s’il le faut, dissoudra à nouveau l’Assemblée en septembre s’il le faut. Mais il voudra pouvoir dire : je suis le dernier rempart de la stabilité des institutions", anticipe-t-il.
28/11/24 - 11:54 - Pour Jean-Luc Mélenchon, "le départ de Macron est la solution pour clore la crise créée par lui"
Dans un long texte publié ce jeudi 28 novembre sur son site Internet, Jean-Luc Mélenchon considère que la démission d'Emmanuel Macron est désormais inéluctable. "Une pente est prise désormais. Dans les esprits non seulement le départ de Macron est la solution pour clore la crise créée par lui. Mais il y a aussi la certitude de voir ce dernier réduit à une totale impuissance parce qu’il n’a plus aucun crédit ou influence politique ni en France ni dans le monde", écrit le leader de La France insoumise, qui insiste : "Sauf nouvel imprévu, cette pente est irréversible. La débandade de ce qui reste du 'camp présidentiel' va donc s’accentuer. Elle va tout aggraver à mesure de sa décomposition selon une loi constante de ce type de situation". Jean-Luc Mélenchon se réjouit que désormais, sa démission soit réclamée par des voix de gauche, de l'extrême droite, mais aussi des rangs de la droite et du centre, avec les déclarations de De Courson et de Copé.