Vers la "fin de l'argent liquide" ? La proposition de Darmanin pourrait se heurter à deux obstacles

Vers la "fin de l'argent liquide" ? La proposition de Darmanin pourrait se heurter à deux obstacles Le ministre de la Justice Gérald Darmanin envisage de supprimer l'argent liquide pour lutter contre le trafic de stupéfiants et empêcher la constitution de points de deal. Une mesure pourtant délicate à mettre en place.

Une mesure choc. Auditionné ce jeudi 22 mai par la commission d'enquête du Sénat sur la délinquance financière, Gérald Darmanin s'est positionné en faveur de "la fin de l'argent liquide" pour lutter contre le trafic de stupéfiants. "C'est une mesure assez simple", et "la fin de l'argent liquide empêchera la constitution de points de deal", assure le ministre la Justice. Il poursuit : "Une grande partie de la fraude de la délinquance du quotidien, même des réseaux criminels, sont des fraudes d'argent liquide (...) Une fois que l'argent est traçable comme le sont parfois - et souvent quand on est bon - les cryptoactifs, c'est plus compliqué pour le consommateur comme pour le revendeur de pouvoir échapper totalement aux contrôles". 

Attention, le garde des Sceaux est bien conscient qu'une telle mesure "n'empêchera pas qu'il y ait toujours, sans doute, de la drogue, de la livraison de drogue" en prison. Invité de RTL de vendredi 23 mai, Gérald Darmanin affirme avoir "répondu à la question de la commission d'enquête qui demandait ce qu'il faudrait faire pour qu'il n'y ait plus de drogue et de manière générale de délinquance financière autour de la criminalité organisée". Il évalue entre 4 et 6 milliards d'euros, le montant d'argent liquide lié au trafic de drogue chaque année en France. 

"C'est un débat public qu'il faut sans doute poser dans une campagne présidentielle"

Si "des pays autour de nous" ont diminué voire supprimé l'argent liquide pour avoir une meilleure traçabilité, "au Moyen-Orient, en Asie, où il n'y a quasiment plus d'argent liquide, où tout se passe par la traçabilité de votre téléphone, de votre carte bleue", le ministre de la Justice reste méfiant. Une telle mesure n'est pas possible à l'heure actuelle en France. "Je pense d'abord qu'on n'en a pas les moyens politiques, ensuite, il y a une longue discussion évidemment à avoir avec les Français". Un premier vrai frein pour Gérald Darmanin, qui n'est pas le seul. En revanche, "l'argent liquide pose d'autres avantages, les avantages d'une liberté individuelle où l'État en effet ne regarde pas tout à tout moment", abonde-t-il.

Le souhait de Gérald Darmanin pourrait également se heurter à un deuxième obstacle : l'attachement des Français pour l'argent liquide. 43 % des paiements sont encore effectués en espèces en 2024 sur le territoire, selon la Banque de France. S'i son usage diminue, le liquide reste le seul moyen de paiement qu'un commerçant n'est pas en droit de refuser, sous peine d'une amende. "Pour réussir quand on est ministre, il faut du temps, un Parlement et de l'argent", confie-t-il, toujours au micro de RTL. "C'est un débat public qu'il faut sans doute poser dans une campagne présidentielle, par exemple", lance-t-il, à deux ans su scrutin national.