Les sorties du mois de mars "Chienne de vie" de Helle Helle

Le minimalisme est-il un courant littéraire ? A l'heure où l'on parle à tout va de "post-modernité" ou de "post-réalisme" et que le moindre paragraphe de cynisme descriptif passe pour une révélation littéraire, on a de plus en plus de mal à faire le tri, puisqu'un livre sur deux ambitionne de dépeindre (avec génie bien sûr) les moments les plus anodins (et ennuyeux) de la vie quotidienne.

Un exercice difficile auquel se prête Helle Helle et qu'elle surmonte avec un talent fou. A la lire, on a tendance à penser qu'il n'est pas nécessaire de multiplier les ornements et les belles formules pour bien écrire. "Chienne de vie" est avant tout un roman soigné, minutieux, au style épuré et délibérément pragmatique.

Certes, il ne se passe pas grand chose dans ce petit roman brillant.
Bent, une écrivain en manque d'inspiration, choisit un beau jour de tout quitter, de se réfugier sous un abri-bus pour partir Dieu sait où... Elle rencontrera Johnny et Cocotte, qui l'inviteront chez eux, dans un petit village de la campagne danoise. Et, au bout du compte, l'intrigue se limite plus ou moins à cela. Qu'importe, puisque Helle Helle nous convie à un joli moment d'introspection, de contemplation simple et intime.
Le plus surprenant dans ce roman, c'est qu'on ne s'ennuie pas une seconde à suivre Bent dans ce qui constitue pour elle un retour au calme, une renaissance. Les tasses de café, les courses à la supérette, les caresses que l'on adresse aux chiens, les réveils lancinants qui n'en finissent plus, les timides rayons de soleil... toutes ces petites choses nous sont données à lire avec une étonnante délicatesse.  

Maupassant disait de lui qu'il s'était senti un grand écrivain le jour où il était parvenu à "écrire sur rien". L'auteure, en choisissant d'évacuer toute forme d'artifice, semble elle aussi faire de l'ascétisme littéraire une ligne de conduite esthétique. Et si le minimalisme existe, alors Helle Helle est une de ses meilleures représentantes.