Sally Amaki : "le pouvoir d'inspiration des anime peut parfois sauver des vies"
Sally Amaki est bien plus qu'une simple voix dans l'univers de l'animation japonaise. Née aux États-Unis et parfaitement bilingue en anglais et en japonais, elle incarne un véritable pont culturel entre le Japon et les fans anglophones d'anime. C'est habitée par une ineffable passion pour les dessins animés japonais qu'elle décide de quitter son Amérique natale et de se rendre au Japon avec un objectif ambitieux : devenir seiyû, c'est-à-dire comédienne de doublage au sein de l'industrie de l'anime.
Elle se fait connaître en rejoignant le groupe 22/7 (Nanabun no Nijyuuni), un projet animé d'idols produit par Aniplex et Sony Music, où elle interprète le personnage de Sakura Fujima. Sa personnalité spontanée, son humour et son style bilingue (japonais-anglais) lui valent rapidement une popularité grandissante, notamment auprès du public international.
Au-delà du doublage, Sally Amaki s'est imposée comme une figure incontournable dans la présentation et la vulgarisation de l'anime à l'échelle mondiale. Elle est notamment devenue présentatrice officielle des Crunchyroll Anime Awards, cérémonie annuelle majeure du monde du streaming d'anime.
Sally Amaki est aujourd'hui reconnue comme l'une des voix les plus originales et rafraîchissantes de la culture anime, célébrée autant pour son travail en tant que seiyû que pour son rôle de porte-parole d'une passion partagée par des millions de fans à travers le monde.

À l'occasion des Crunchyroll Anime Awards 2025, Linternaute.com a eu l'occasion de s'entretenir avec la comédienne. Morceaux choisis.
Linternaute.com : vous avez dit vouloir vous impliquer dans l'industrie de l'anime pour redonner à ce milieu qui vous a tant apporté. Y a-t-il un anime en particulier qui a déclenché cet amour ?
Sally Amaki : Oui, j'ai vraiment adoré Gintama. Au collège, il y a eu un moment où j'ai arrêté d'aller à l'école. Je me disais que ce type d'environnement n'était pas fait pour moi. J'avais énormément de mal à m'ouvrir à mes camarades de classe.
Et puis j'ai découvert la communauté anime, grâce à Gintama. C'est à ce moment-là que j'ai vraiment eu envie de rejoindre cette communauté moi-même. Puis, plus tard, d'être un acteur de cette communauté.
Est-ce que vous retournez, aujourd'hui encore, vers Gintama pour vous remonter le moral, ou avez-vous un autre anime doudou ?
Gintama restera toujours mon anime de prédilection, mais j'ai tendance aussi à revoir Haikyû quand j'ai besoin d'énergie. Principalement car ce dernier contient de nombreuses citations inspirantes. Quand je suis déprimée, ou quand je fais face à un mur dans la vie, Haikyû regorge de phrases motivantes qui me poussent à continuer. Donc ces deux-là sont mes références.
Vous analysez certaines de ces citations dans votre podcast sur l'anime. Quelle citation est votre favorite ?
Ma citation préférée de Haikyû est probablement "mada makete nai yo" : "Nous n'avons pas encore perdu" C'est Hinata, le personnage principal, qui dit cela lorsque tout le monde autour de lui commence à se décourager. Il est le seul à continuer d'aller de l'avant. Les gens lui demandent : "Qu'est-ce qui te fait continuer ?" Et il répond : "Qu'est-ce que vous voulez dire ? Nous n'avons pas encore perdu." Et j'ai trouvé ça incroyablement profond. Une citation si courte, mais qui m'a vraiment touchée.

Ce genre de mantras, de phrases chocs, sont pour vous une des raisons du succès universel des mangas et anime ? Cette capacité de motivation, ce pouvoir d'inspirer ?
Absolument, oui. Surtout dans les shônen. Les personnages principaux sont vraiment inspirants, et je pense que cela a un impact sur énormément de fans. Le pouvoir d'inspiration des anime peut parfois sauver des vies.
Revenons à Haikyû. Vous êtes récemment allée à Sendai pour un seichi junrei, un pèlerinage d'anime, n'est-ce pas ?
Tout à fait, mais je n'ai pas choisi le bon jour et plein de lieux étaient fermés (rires).
Y a-t-il un lieu au Japon que vous recommanderiez à un touriste fan d'anime ?
Mon Dieu, un seul ? Cela dépend de l'anime que vous aimez, mais si vous êtes à Tokyo, Yotsuya est un lieu très populaire, surtout depuis le film Your Name. C'est aussi très facile d'accès. Tokyo regorge d'endroits comme Shinjuku où on peut voir des lieux qui ont inspiré Terror in Resonance il y a une dizaine d'années ou Kabukicho pour City Hunter. Tokyo est probablement mon premier choix, tout y est très accessible.
Imaginons que vous possédiez les sept boules de cristal de Dragon Ball et que vous puissiez faire un vœu. Quel anime aimeriez-vous doubler, et quel personnage ?
Oh mon Dieu ! J'aimerais doubler Yachi, la manager dans Haikyû. Quand je suis arrivée au Japon, j'ai même essayé de devenir manager d'une équipe sportive dans mon école, mais c'était trop difficile, j'ai abandonné au bout du deuxième jour. J'aime tellement Haikyû, mais je sais que je ne pourrais pas doubler les autres personnages principaux, car ma voix ne descend pas assez bas pour du shônen. J'aimerais simplement être impliquée dans le doublage de Haikyû, même pour un autre personnage.
En parlant de voix. Comment entraînez-vous votre tessiture de doublage avant les auditions ?
Il n'y a pas vraiment d'entraînement, car lorsque je passe des auditions, je choisis toujours des personnages qui se situent dans ma zone de confort vocale. Mais par exemple, quand j'ai doublé Kiriko dans [le jeu vidéo] Overwatch, sa voix était la plus grave que je pouvais atteindre. Et je pense que la doubler a réellement entraîné ma voix à aller plus bas. En ce qui me concerne, l'entraînement vient après le casting.
Quelles sont les principales différences dans votre façon d'aborder un rôle aux États-Unis et au Japon ?
Je n'ai pas encore doublé beaucoup d'anime aux États-Unis, sauf Tomo-chan est une fille... Je dirais que ma méthode de travail ne change pas vraiment. C'est surtout la façon dont les fans perçoivent les comédiens de doublage.
Au Japon, les fans considèrent les seiyû comme des idoles, alors qu'aux États-Unis, ils les voient comme de simples comédiens de doublage. C'est là la grande différence.
Vous considérez-vous aujourd'hui comme une comédienne de doublage ou comme une idole ?
C'est une question difficile. Je fais partie d'un groupe d'idoles qui s'appelle 22/7, donc même si je n'étais pas comédienne de doublage, je serais quand même idole. Cela dépend vraiment du jour et du travail. Par exemple, pour les Anime Awards, je me présenterais probablement en tant que comédienne de doublage.

Qu'avez-vous ressenti lorsque vous avez été appelée pour présenter les Anime Awards ?
Mon Dieu, j'étais tellement nerveuse. D'abord, je me suis demandé : "Pourquoi moi ?". Même si je suis une comédienne de doublage, je ne me considère pas comme la personne la plus éloquente du monde. Mais vous savez, c'est l'anime qui m'a amenée au Japon. C'est grâce à l'anime que j'ai fait le lien entre les États-Unis et le Japon. Donc je me suis dit que c'était une belle opportunité de connecter les gens à travers le monde. D'autant plus que la cérémonie est retransmise dans le monde entier. J'étais vraiment heureuse de pouvoir contribuer à créer ce lien international autour de l'anime.
J'ai cru comprendre que la pêche était un de vos hobbies. Avez-vous essayé de parler au PDG de Crunchyroll pour faire un remake de Tsurikichi Sanpei (Paul le pêcheur) ? Et aimeriez-vous y doubler un personnage ?
Si j'en ai l'occasion, ce serait avec plaisir. J'adorerais participer à un anime sur la pêche ! Mais j'ai découvert que j'ai facilement le mal de mer. C'est un problème que je vais devoir surmonter.
Après avoir quitté les États-Unis, vous êtes devenue idole et seiyû au Japon. Quel est votre prochain rêve ?
Mon prochain rêve serait de participer à un anime qui serait nommé aux Anime Awards... et qui remporterait un prix. Ce serait fou que je présente l'événement et que l'anime dans lequel je joue gagne un prix. Ce serait deux fois plus réjouissant. C'est mon prochain objectif (rires).

Pensez-vous pouvoir remporter à la fois le prix en version anglaise et japonaise ?
Ce serait génial. Je vais faire de mon mieux pour réaliser un tel doublé. À chaque fois que j'obtiens un rôle dans un anime, je demande toujours aux réalisateurs s'il y aura une version anglaise, et si je pourrai aussi y être castée. Donc oui, c'est un de mes rêves.
Regardez-vous toujours beaucoup d'anime ?
Oui, absolument. Pas autant qu'avant, quand j'étais au collège. À l'époque, je regardais littéralement tous les animes de la saison. Aujourd'hui, je choisis surtout en fonction des mangas que j'ai lus au préalable. Mais oui, je regarde toujours beaucoup d'animes.
Quel est votre dernier coup de cœur ?
En ce moment… Witch Watch. C'est un anime vraiment très proche de Gintama en termes d'ambiance. J'adore les comédies décalées, déjantées, presque absurdes. Kenta Shinohara, le mangaka, a même été assistant sur Gintama. C'est un de mes choix incontournables pour les anime de printemps. Le succès est d'ailleurs au rendez- vous.
Avez-vous tenté d'être castée sur cette adaptation de Witch Watch ?
Honnêtement, je ne sais pas comment les gens sont sélectionnés pour ce type de projets. Je ne sais pas si je peux juste frapper à la porte du réalisateur et dire : "Excusez-moi, puis-je auditionner ?" Mais si j'en ai la possibilité, j'aimerais vraiment être castée, ou au moins pouvoir auditionner.
Ce n'est pas votre premier Anime Awards. Vous sentez-vous plus confiante, plus à l'aise ? Attendez-vous à quelque chose en particulier ?
Non, je ne suis pas plus détendue. Si c'était un événement hebdomadaire, je m'y habituerais sans doute, mais comme c'est annuel, je ne peux pas vraiment m'y habituer. Je suis tétanisée comme au premier jour. Mais ce que j'attends avec impatience, ce sont les artistes qui se produisent chaque année, ils sont toujours incroyables. Je suis impatiente de les découvrir. Les présentateurs aussi sont toujours exceptionnels. Donc oui, chaque année, j'attends cela avec enthousiasme.
En parlant de performances, aimeriez-vous chanter un opening d'anime aux Anime Awards ?
Chanter, tout en présentant l'événement... et en recevant un prix ? Oh, ce serait génial si cela arrivait. Autant renommer les Crunchyroll Anime Awards en " Sally Awards " ce jour-là (rires) ! Mais sérieusement, si j'en ai la chance, j'aimerais vraiment tout faire, honnêtement.