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Evelyne, 59 ans, est aujourd'hui retraitée et professeur de yoga. Elle habite près de Lille. En 1968, elle avait 20 ans.



Mes enfants appellent Mai 68 "ma guerre". Ce n'était pas une guerre mais une révolution.

"Après mai 68,
j'ai voulu changer
le rapport de dominant à dominé que je ressentais quand j'étais petite"

J'ai 3 garçons (trentenaires aujourd'hui), mais c'est surtout à leurs épouses que je raconte la libération de la femme et la liberté sexuelle.

Très tôt, j'ai ouvert un dialogue avec mes enfants. Mon mari et moi n'étions pas laxistes, mais chaque fois qu'on prenait une décision, qu'on punissait, c'était en expliquant le "pourquoi" des choses. Sans les culpabiliser, comme c'était le cas dans mon enfance.

Après Mai 68, j'ai voulu changer le rapport de dominant à dominé que je ressentais quand j'étais petite. On a alors appliqué une permissivité un peu plus ouverte. Par exemple : la gestion de leur argent de poche. Une fois la somme donnée pour le mois, je n'allais pas vérifier, je leur faisais confiance complètement.

Dans les lectures également, il n'y avait pas de livre interdit. Si un livre posait problème, ils le lisaient et nous en discutions après. J'ai également changé ma manière d'enseigner. J'étais dans un moule où je desservais mon savoir. Mes élèves, mêmes petits de 3 à 5 ans, je les ai vu comme des personnes. Et pui,s j'ai laissé plus de place à la créativité.


"On est allé en famille servir la soupe sur des piquets de grève"

J'ai reçu une éducation judéo-chrétienne avec des interdits. Je me souviens, à cette époque, maman avait 40 ans, mon père 43 ans, et même eux ont fait leur révolution. Le dialogue s'est ouvert, mais cela ne s'est pas passé du jour au lendemain.

Mes parents étaient engagés syndicalement à la CFDT. Ma mère, elle, était dans l'Action catholique ouvrière. A travers des réunions syndicales et chrétiennes, on est allé en famille servir la soupe sur des piquets de grève dans les usines textiles de la région Nord. J'ai rencontré des ouvriers, avec une conscience syndicale forte. C'était une découverte pour la jeune femme que j'étais.

Grâce à Mai 68, je suis sortie du cocon de ma petite famille bourgeoisie. J'ai rencontré des personnes issues d'autres milieux socio-professionnels. J'avais un jugement très tranché, un peu péremptoire. J'ai révisé ma façon de voir les choses.

 

"J'ai été très mal vue de faire grève"

J'étais enseignante dans une école privée. J'ai pris part à la grève : ce qui a été très mal vu. Sur les piquets de grève, j'ai rencontré des parents d'élèves qui étaient patrons. On s'est étonné qu'une institutrice du privé ose s'opposer au patronat.

J'étais la seule de l'établissement à faire grève et j'ai quand même eu mon salaire. Les collègues m'ont regardé d'un œil encore plus critique. Cette voie ne correspondait pas à mon caractère, ni mes convictions. C'est pour cela que j'ai rejoint le public à la rentrée 1970.


Dans l'enseignement privé, on avait des tas d'interdits. Si mon fiancé venait me conduire, je ne pouvais pas l'embrasser devant l'école. Et puis je devais aussi faire signer ma carte de messe, tous les dimanches. C'était pour vérifier ma foi. Mais je n'étais pas honnête, je signais à la place du prêtre !



 

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