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HISTOIRE(S) DE SCIENCE
 
Janvier 2007

"Mea culpa" d'un sceptique

L'ancienneté des grottes préhistoriques n'a pas toujours été admise. C'est seulement au début du XXème siècle que la communauté scientifique s'est unifiée et a reconnu la pratique des arts aux Hommes du Paléolithique.

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Si aujourd'hui il ne fait aucun doute que la grotte de Lascaux a été peinte par des Hommes préhistoriques et non par nos contemporains, il faut bien avouer, malgré tout, que cette idée a mis un certain temps à s'imposer. C'est dans les années 1900 qu'un préhistorien nommé Emile Cartailhac réunit le clan des sceptiques à celui des convaincus et donne à la Préhistoire un nouvel objet d'étude, l'art.

De si beaux dessins réalisés par des hommes il y a plus de 12000 ans. Pas si difficile à envisager dès lors que l'on ne considère plus les préhistoriques comme nos inférieurs. Photo © DR

Une vieille controverse

Les peintures pariétales de la grotte espagnole d'Altamira sont à l'origine des débats. Au début du XXème siècle, certains y voient tout le talent des hommes préhistoriques alors que d'autres clament haut et fort qu'elles sont modernes.

Ainsi sont nés les deux clans opposant les préhistoriens convaincus comme Marcelino Sanz de Sautuola, le découvreur d'Altamira, et les sceptiques comme Emile Cartailhac et Gabriel de Mortillet. Mais quel est l'enjeu scientifique qui se dissimule réellement derrière cette querelle a priori anodine ? Car enjeu il y a.

Douter de l'ancienneté de ces peintures revient à douter de la capacité des hommes préhistoriques à abstraire leurs pensées, plus simplement de ne pas leur reconnaître une humanité entière.

Cette théorie des "faux" s'inscrit dans un courant évolutionniste linéaire. En effet, au début du XXème siècle, quand on observe les outils de pierre et d'os fabriqués par les Hommes du Paléolithique, et ce, sans toutes nos connaissances actuelles, il est difficile aux sceptiques de concevoir ces mêmes Hommes comme les détenteurs d'une métaphysique propre. Pour eux, évolution technique et spiritualité évoluent forcément aux mêmes rythmes. Plus clairement, on affilie facilement un outillage frustre à une capacité de penser réduite.

De gauche à droite : Emile Cartailhac et Marcelino Sanz de Sautuola. Photo © L'Internaute

Honnêteté et intégrité

Puis, en marge de ceux-là, il y a les défenseurs convaincus. Mais comment trancher ce débat, à cette époque, alors qu'encore aucune méthode de datation au radiocarbone n'est possible ? Comment le groupe des sceptiques a pu se laisser convaincre ?

S'il est vrai que les méthodes de datation absolue ont permis d'unifier la communauté scientifique sur le sujet, il n'est pas moins important de rappeler le rôle fondamental d'un article écrit par Emile Cartailhac en 1902, La grotte d'Altamira, Espagne. "Mea culpa" d'un sceptique.

Après la découverte d'autres grottes ornées, Emile Cartailhac, un sceptique, rejoint le clan des convaincus et avoue publiquement dans son article déjà cité, son retournement d'opinion. Il l'explique d'ailleurs selon ce grand principe scientifique : "Il faut savoir s'incliner devant la réalité d'un fait". Faisant preuve d'une rare honnêteté intellectuelle, il ne s'arrête pas à reconnaître seulement ces faits et étudie lui-même certaines peintures paléolithiques. De cette façon, l'art pariétal s'est imposé comme une discipline à part entière au sein de la Préhistoire.

Aujourd'hui, les méthodes physico-chimiques permettent, généralement, de lever le doute dans ce genre de conflit. Le scepticisme, ici, n'est pas une pensée péjorative dès lors qu'elle ne porte pas atteinte à la spiritualité des Hommes préhistoriques.

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