Confinement en France : un scénario possible en 2022 ?
CONFINEMENT. Alors que l'épidémie de coronavirus s'intensifie en France, une mesure radicale telle qu'un confinement est-elle une option sérieusement envisageable en 2022 ?
[Mis à jour le 7 janvier 2022 à 11h13] C'est le mot qui suscite le plus d'inquiétudes : le confinement. Après avoir fermé le pays à double tour une première fois au printemps 2020 puis un peu moins durement à l'automne de la même année, Emmanuel Macron pourrait-il à nouveau instaurer une mesure aussi radicale pour freiner l'épidémie de coronavirus en France, notamment au regard de la flambée des contaminations liées aux variants Delta et Omicron ? Si la question peut se poser, le gouvernement s'est fixé une ligne conductrice qu'il entend bien tenir jusqu'au bout pour mettre fin à l'épidémie, basée sur la vaccination. Par ailleurs, même si une nouvelle vague peut toujours être redoutée, la 5e déferlante de Covid dans l'Hexagone pourrait bientôt prendre fin : "début de la deuxième quinzaine de janvier", assure Alain Fischer, coordinateur de la stratégie vaccinale. Alors, le confinement est-il une option sérieusement envisagée ?
Un confinement en France en 2022 ?
La mesure apparaît comme définitivement écartée des pistes envisagées par l'exécutif. Dans une interview accordée à des lecteurs du Parisien, parue mardi 4 janvier 2022, Emmanuel Macron avait assuré qu'aucune nouvelle contrainte n'entrerait en vigueur à l'issue du Conseil de défense sanitaire organisé mercredi 5 janvier : "Les décisions ont été annoncées la semaine dernière, donc il faut les laisser vivre". Manière de dire qu'aucun nouveau tour de vis n'est prévu à court terme et qu'aucune contrainte supplémentaire ne pèserait sur les Français dans les prochains jours et semaines. D'autant qu'aucune date de réévaluation de la situation épidémique lors d'un Conseil de défense sanitaire n'a, pour l'heure, été communiquée.
Surtout, le chef de l'État a réitéré la ligne directrice qu'il souhaite continuer de tenir avec son gouvernement : "vaccination, vaccination, vaccination et pass vaccinal". Un cap déjà répété à tour de bras, avec l'objectif clairement affiché de faire peser les contraintes sur les personnes qui n'ont pas encore reçu d'injection, les empêchant ainsi d'accéder dans des lieux de vie (restaurants, bars, cinémas, transports…). Le président de la République s'est d'ailleurs montré très vindicatif à leur encontre dans les colonnes du Parisien : "la quasi-totalité des gens, plus de 90 %, y ont adhéré (à la vaccination, ndlr). C'est une toute petite minorité qui est réfractaire. Celle-là, comment on la réduit ? On la réduit, pardon de le dire, comme ça, en l'emmerdant encore davantage. […] Les non-vaccinés, j'ai très envie de les emmerder. Et donc, on va continuer de le faire, jusqu'au bout. C'est ça, la stratégie".
Des propos chocs, qui n'ont pas manqué de faire réagir, mais qui fixent sans détour le virage pris par l'exécutif dans la gestion d'une crise sanitaire qui s'éternise. Les mesures coercitives ne semblent plus à l'ordre du jour. En préambule du Conseil de défense sanitaire du 27 décembre, Emmanuel Macron avait déjà rappelé la ligne de conduite qu'il souhaitait appliquer, selon des propos rapportés par le Canard enchaîné : "les Français sont épuisés. Les jeunes ne veulent pas être cloîtrés. Il faut composer avec l'esprit français. Les "enfermistes" nous somment, à coups de tribunes et de déclarations, de tout arrêter : les liens sociaux, le travail, les loisirs, l'économie. Il n'en est pas question. Je dois veiller à la santé des Français, mais aussi à leur moral".
Peut-on confiner les non-vaccinés en France ?
Selon les chiffres, les nouvelles contaminations et les hospitalisations touchent principalement les plus de 60 ans et les personnes non-vaccinées. Cette tranche d'âge représente plus de 75 % des personnes hospitalisées après avoir contracté le Covid-19 et plus de la moitié des malades pris en charge en soins critiques. C'est ce qui a poussé Emmanuel Macron à rendre obligatoire la troisième dose de vaccin sous peine de perdre le pass sanitaire, dans un délai de six mois et cinq semaines après son obtention. Avec le pass vaccinal qui entrera en vigueur (sous réserve de son adoption par le Parlement) dès le début de l'année, le message est passé : les non vaccinés vont porter "tout le poids" des restrictions à partir de 2022.
Mais l'instauration en France d'un confinement aux seuls non vaccinés se heurterait à divers obstacles juridiques. D'abord, le pays n'est plus sous le régime de l'état d'urgence sanitaire, condition première pour mettre en place un confinement ou un couvre-feu. Ainsi, il faudrait au préalable qu'Emmanuel Macron décrète un retour à l'état d'urgence sanitaire et que le Parlement le valide. Par ailleurs, quand bien même ce statut serait à nouveau instauré, il n'octroie pas tous les droits. Spécialiste du droit constitutionnel, Jean-Philippe Derosier avait précisé auprès de BFM TV en novembre : "Je ne pense pas que l'on puisse prendre des mesures différenciées en fonction du statut vaccinal, car la seule différenciation que permet l'état d'urgence sanitaire est territoriale." C'est pour cette raison qu'un confinement des personnes âgées n'a jamais été instauré.
Même si François Saint-Bonnet, professeur à l'Université Panthéon-Assas et spécialiste en droit des libertés fondamentales, a estimé dans Le Figaro que "si des données épidémiologiques précises et objectives sont fournies, je ne vois pas ce qui pourrait y faire obstacle" et que "dès lors que des recommandations médicales auront parfaitement identifié que les non vaccinés posent davantage de risque au niveau collectif que les autres, rien n'empêchera la conformité à la Constitution", le confinement des personnes non-vaccinées en France ne devrait donc pas être mis en place. D'autant plus à quelques mois de la présidentielle, dans un contexte d'importantes crispations que connaît déjà le pays.