Michel Barnier : une aventure compliquée avec Rachida Dati, des tensions qui ne datent pas d'aujourd'hui

Michel Barnier : une aventure compliquée avec Rachida Dati, des tensions qui ne datent pas d'aujourd'hui Michel Barnier et Rachida Dati ont un passif assez compliqué. Au point d'ouvrir la voie à une guerre interne chez LR ?

Une relation délicate. Depuis peu, Michel Barnier et Rachida Dati - tous deux des poids lourds LR - ont vu leurs chemin se recroiser. En effet, lundi 28 juillet 2025, Les Républicains ont choisi d'investir le Savoyard pour la législative partielle dans la deuxième circonscription de Paris. Mais comme souvent lorsqu'il s'agit des LR, la ministre de la Culture n'est pas bien loin. En effet, Rachida Dati ne compte pas se laisser faire et ouvre la voie à une guerre fratricide. Cette dernière souhaite tout de même se présenter à la législative qui se tiendra en octobre. Elle accuse l'ex-Premier ministre de se présenter pour servir des "ambitions présidentielles".

Mais l'affrontement pourrait coûter cher à la ministre de la Culture dont le véritable objectif est de briguer la mairie de Paris en 2026. En prétendant à la députation entre temps, contre un membre de sa propre famille politique, elle risque de fragiliser la droite et de perdre des soutiens au sein de LR. Michel Barnier, lui, a tenté d'apaiser les tensions dans un message diffusé sur X, ou du moins de se dédouaner des tensions à venir : "Il n'y aura aucune polémique de mon côté. Je suis confiant dans la force de notre engagement collectif au service des parisiens et de la France", a-t-il déclaré. 

"Barnier à l'Assemblée (...) Dati pour Paris"

En réalité, L'élue parisienne n'a jamais prétendu à la députation, mais s'est sentie agressée par l'arrivée d'un gros poisson de la droite sur son territoire. Pourtant, une potentielle élection de Michel Barnier en tant que député, pourrait laisser la voie libre à Rachida Dati pour la mairie de Paris. Cette répartition des tâches est d'ailleurs le scénario souhaité par LR. "Michel Barnier à l'Assemblée nationale est une parole forte qui nous sera utile (…), Rachida Dati est notre candidate légitime pour Paris", a même déclaré Valérie Pécresse devant la CNI lundi soir. Les bisbilles entre ces deux ténors de la droite française ne datent pourtant pas de cette année. 

Le 5 septembre 2024, Michel Barnier était nommé Premier ministre par Emmanuel Macron. Expérimenté, consensuel, le Savoyard affichait pourtant un passif avec bon nombre de personnalités politiques. Le négociateur en chef du Brexit pour l'Union européenne ne pensait peut-être pas, à ce moment-là, retravailler avec une autre figure de la droite, bien connue dans la sphère politique du pays et sa nomination à Matignon a ravivé bien des souvenirs. Parmi eux, celui d'une campagne électorale vieille de 15 ans, où Michel Barnier s'était retrouvé contraint de faire équipe avec Rachida Dati, fraîchement ralliée elle aussi à Emmanuel Macron. 

Un tandem contre-nature

Pour rappel, en 2009, sous la pression de Nicolas Sarkozy, la garde des Sceaux avait dû accepter, à contrecœur, de figurer en deuxième position sur la liste UMP conduite par Michel Barnier pour les élections européennes en Île-de-France. Une alliance imposée par l'Élysée qui ne ravissait guère les deux intéressés. Rachida Dati, étoile montante du sarkozysme, ne souhaitait pas quitter le gouvernement après seulement deux ans place Vendôme. Quant à Michel Barnier, eurodéputé de longue date, il devait composer avec cette nouvelle venue parachutée à ses côtés.

Le tandem, hétéroclite, se voulait un symbole de la diversité voulue par Nicolas Sarkozy : lui l'élu expérimenté, sérieux voire parfois un peu pâle issu des Alpes, elle la jeune ministre au tempérament explosif, d'origine maghrébine et ayant grandi dans une cité de Bourgogne. Leur association relevait aussi d'un calcul politique de l'Élysée pour doper une liste UMP menacée par la concurrence du MoDem et de la gauche à l'époque. Il fallait enfin et surtout évincer une ministre de la Justice qui accumulait les critiques du monde judiciaire, fustigeant sa "méthode", son autoritarisme à la Chancellerie et ses réformes menées au pas de charge...

Pendant la campagne, Rachida Dati va essuyer un procès en désinvolture après des sorties où on ne la sentait pas vraiment concernée par l'UE et ses péripéties. Quant à Michel Barnier, il va peiner à exister face à la médiatisation de sa colistière. Leur image en restera durablement brouillée, l'aventure européenne tournera au chemin de croix.

Pourtant, le soir du 7 juin 2009, la liste Barnier-Dati va l'emporter largement en Île-de-France, avec 29% des voix. Élue eurodéputée, Rachida Dati se sentira enfin autorisée à savourer sa victoire et à mettre un orteil (juste un seul) dans le grand bain européen, même si elle quittera le gouvernement à regret. Michel Barnier repartira quant à lui à Bruxelles auréolé de ce succès, poursuivant son parcours de forçat de l'UE.