Pourquoi la nomination de Bayrou comme Premier ministre n'enchante pas Macron
Emmanuel Macron a finalement décidé de nommer François Bayrou comme nouveau Premier ministre en remplacement de Michel Barnier, ce vendredi 13 décembre 2024. Une hypothèse évoquée très tôt parmi les options favorites, mais qui a mis du temps avant d'être actée. Le temps des consultations avec les forces politiques d'abord, puis le temps de l'hésitation d'Emmanuel Macron. Car le président de la République n'avait pas l'intention de nommer le patron du MoDem à la tête du futur gouvernement lorsqu'il s'est réveillé ce vendredi. Au contraire, il comptait annoncer au maire de Pau qu'il était une nouvelle fois éconduit aux portes de Matignon. Un message qui a été passé à l'intéressé par un ministre démissionnaire dès 5 heures de matin rapporte France Télévisions.
Un choix qui a suscité la colère du démocrate qui croyait dur comme fer à ses chances d'être nommé. François Bayrou, devenu un proche conseillé et un allié de longue date d'Emmanuel Macron, a systématiquement était cité comme une option pour Matignon lors des remaniements du deuxième quinquennat du chef de l'Etat, sans jamais être nommé. A l'heure d'une crise politique causée par la dissolution de juin dernier, François Bayrou voyait enfin la possibilité d'atterrir à Matignon. "Il ne me nommera jamais, si ce n'est pas dans des circonstances exceptionnelles", anticipait-il il y a six mois selon Le Parisien.
Un rendez-vous a donc eu lieu à l'Elysée entre Emmanuel Macron et François Bayrou. Dès 8h30 et pendant 1h45, le ton est monté entre les deux hommes, le patron du MoDem fustigeant l'idée de se voir griller la priorité par un autre - Roland Lescure et Sébastien Lecornu étaient cités. François Bayrou s'est imposé comme le meilleur choix, comme il l'avait fait précédemment devant les parlementaires : "Je suis le plus grand dénominateur pour discuter avec la gauche et avec la droite". Il a aussi menacé le chef de l'Etat de ne plus être le soutien important qu'il a été ces dernières années d'après Le Parisien qui cite des témoins de l'échange : "Il a menacé de faire exploser la majorité si ce n'était pas lui." Des arguments auxquels Emmanuel Macron a fini par céder, deux heures après la fin de son rendez-vous avec François Bayrou.
La nomination de Bayrou longtemps évitée par Macron
Le nouveau Premier ministre n'est donc pas le premier choix d'Emmanuel Macron, il n'est en tout cas pas un choix que le président de la République a fait avec le sourire. S'il l'avait voulu, le chef de l'Etat aurait pu offrir Matignon à François Bayrou il a plusieurs jours, les positions des différents partis n'ayant pas évolué ces dernières heures. Il aurait également pu le faire il y a des mois de ça : en septembre à la place de Michel Barnier, en janvier à la place de Gabriel Attal et encore avant.
Mais le chef de l'Etat a toujours préféré quelqu'un d'autres et pour cause, Emmanuel Macron a eu tendance à nommer des personnes ne pouvant lui faire de l'ombre ou se contentant d'appliquer sa politique. Un scénario difficilement envisageable avec une personnalité comme François Bayrou à Matignon. Le patron du MoDem, bien qu'allié du chef de l'Etat depuis 2017, ne s'est jamais privé de critiquer la politique présidentielle quand elle ne lui convenait pas : la réforme de l'ISF, l'augmentation de la CSG pour les retraités ou encore la réforme des retraites sont autant d'exemples. une indépendance qui pourrait éclipser Emmanuel Macron pour ces dernières années à l'Elysée avant 2027 et à un moment où le chef de l'Etat voit sa popularité en berne.
A noter François Bayrou se montrait encore plus critique à l'égard d'Emmanuel Macron avant de le rejoindre en 2017. Avant de conclure une alliance, à certaines conditions, et de soutenir l'actuel chef de l'Etat, le patron du MoDem qualifiait le jeune politique de représentants des "grands intérêts financiers [...] incompatibles avec l'impartialité exigée par la fonction politique" et "qui ne se contentent pas d'avoir le pouvoir économique, mais qui veulent avoir le pouvoir politique" se souvient Le Figaro. Et le centriste de reprocher à l'époque à Emmanuel des discours sans "beaucoup de substance" et faisant "des promesses à tout le monde" rappelle Public Sénat.