Bayrou poussé à la démission ? Ces députés qui "passent pour des cons" pourraient le renverser

Bayrou poussé à la démission ? Ces députés qui "passent pour des cons" pourraient le renverser François Bayrou qui a fermé la porte à un retour de la retraite à 62 ans pourrait faire l'objet de représailles de la part d'une partie de la classe politique et risquer son avenir à Matignon.

François Bayrou a été clair : le retour du départ à la retraite à 62 ans, c'est "non". Le Premier ministre n'a laissé aucun doute sur sa position lors de son passage sur France Inter le dimanche 16 mars, mais celle-ci n'a pas plu aux partenaires sociaux, ni aux partis de gauche qui militent pour l'abrogation de la réforme des retraites depuis que le texte est passé en force durant le passage d'Elisabeth Borne à Matignon. Le chef du gouvernement a mis ces acteurs politiques en colère, d'autant plus qu'il leur avait promis un débat "sans aucun totem et sans aucun tabou, pas même sur l'âge de la retraite" dans sa déclaration de politique générale à la mi-janvier.

La question des retraites et de la révision de l'âge de départ à 62 ans, plutôt qu'à 64 ans, doivent être discutées lors d'un "conclave" avec les partenaires sociaux sur une initiative du Premier ministre. Ces derniers ont jusqu'au mois de mai pour travailler et trouver un accord, mais la sortie de François Bayrou sous-entend une limite aux négociations sur l'un des points les plus bloquants du texte. "C'est scandaleux", "incompréhensible" réagissent les négociateurs des syndicats de la CGT et de la CFDT, lesquels pourraient quitter la table des négociations et appeler les Français à descendre dans les rues. Le CFDT entend demander au Premier ministre "s'il confirme ses propos" lors d'une rencontre avec lui le mardi 18 mars.

Pour les élus du Parti socialiste (PS), la déclaration a le goût de la trahison. "On nous prend pour des idiots. Ce n'est pas du tout ce qui avait été promis", a rappelé Dieynaba Diop, la porte-parole des députés socialistes auprès de BFMTV, à juste titre. Il y a seulement quelques semaines, François Bayrou a pu résister à une motion de censure grâce, en partie, aux députés socialistes qui n'avaient pas soutenu la tentative de renversement menée par les autres partis du Nouveau Front populaire (NFP). Un choix justifié par les quelques victoires et promesses du Premier ministre obtenues par le PS, dont celle de permettre des négociations sur la réforme des retraites et l'âge de départ. Une possibilité qui a désormais du plomb dans l'aile au grand dam des élus socialistes.

"A la brutalité sociale de la réforme (…) François Bayrou compte-t-il ajouter la brutalité de la trahison de la parole donnée… et écrite ?", a réagi le patron des députés socialistes Boris Vallaud sur X. D'autres ne se font pas d'illusion et estiment que le gouvernement ne comptait pas donner suite aux négociations comme l'élu Liot proche du PS, Harold Huwad : "C'est la preuve que les négociations avec les partenaires sociaux mais aussi les socialistes sont un jeu de dupes depuis le départ. Les masques tombent."

Une censure déposée ou soutenue par le PS ?

La déclaration tranchée de François Bayrou risque-t-elle de lui porter préjudice ? Il n'est pas à l'abri de voir la déception du PS alimenter une envie de renverser le gouvernement, toujours privé de majorité à l'Assemblée et donc fragile. Une hypothèse redoutée par un communicant du gouvernement qui a reproché au Premier ministre sa sortie auprès de Politico : "Quelle idée de faire ça maintenant ! Il fait passer les socialistes pour des cons et va crisper tout le monde !" Plusieurs élus socialistes ont effectivement évoqué cette option : la porte-parole Dieynaba Diop a fait savoir sur BFMTV que "si l'accord entre les syndicats est biaisé, ce sera un motif de censure" pour son parti. Le patron du PS, Olivier Faure, avait lui-même prévenu qu'une censure socialiste pourrait s'élever contre le gouvernement en cas de "débat verrouillé". 

Le risque d'une censure est bien là : si les partis de gauche sont décidés à voir l'âge de départ à la retraite baisser, les députés du Rassemblement national (RN) défendent également une révision de la réforme des retraites d'Elisabeth Borne et son départ à 64 ans. En cas de dépôt d'une motion de censure, les 126 élus communistes, écologistes et insoumis ainsi que les 123 élus du RN pourraient soutenir le texte. De même que les 66 députés socialistes qui feraient alors tomber le gouvernement.

Mais pour l'heure, les élus socialistes n'ont pas l'intention de déposer une motion de censure a glissé un cadre du parti à Politico. Pourtant certains sont d'avis contraire comme cet élu qui regrette l'inaction des dirigeants socialistes auprès de BFMTV : "On est en train de nous la faire à l'envers. François Bayrou se dit 'ils n'oseront jamais me censurer donc je peux dire ce que je veux'. Et il a peut-être raison. Ni Olivier Faure ni Boris Vallaud n'ont brandi la motion de censure".

Du côté du camp présidentiel, la menace d'une censure socialiste n'est pas prise au sérieux en raison du contexte international. "On ne peut pas se payer le luxe d'une crise politique au moment où on a des défis immenses sur la sécurité de la France", estime député Renaissance Pieyre-Alexandre Anglade quand un conseiller ministériel abonde : "Que le PS soit en colère, je n'en doute pas. Mais de là à le censurer concrètement dans quelques semaines, avec Poutine d'un côté et Trump de l'autre, non je n'y crois pas." Un député du groupe Renaissance, plus prudent, a mis François Bayrou en garde sur BFMTV : "Il a la conviction qu'il a une bonne étoile au-dessus de sa tête, que rien ne peut lui arriver. Attention quand même. Il peut finir par être censuré par un truc qu'il n'aura pas vu venir".

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16:46 - "On nous prend pour des idiots" : la colère des élus du PS

"On nous prend pour des idiots", a lâché la porte-parole des députés du PS Dieynaba Diop auprès de BFMTV après la volte-face de François Bayrou sur les retraites. "On est en train de nous la faire à l'envers", a ajouté un autre député sur le même média. Nombre de députés appellent à une réaction de leur groupe politique qui vient de voir une promesse faite par le Premier ministre réduite en poussière. "Ce n'est pas du tout ce qui avait été promis. Si l'accord entre les syndicats est biaisé, ce sera un motif de censure", souligne la porte-parole. Le second élu la rejoint, mais s'agace de ne pas voir le patron du parti Olivier Faure et le président du groupe des députés Boris Vallaud monter au créneau : "François Bayrou se dit 'ils n'oseront jamais me censurer donc je peux dire ce que je veux'. Et il a peut-être raison. Ni Olivier Faure ni Boris Vallaud n'ont brandi la motion de censure." La menace avait pourtant bel et bien était formulée par Olivier Faure en cas de "débat verrouillé" lors du conclave avec les partenaires sociaux.