Faure ou Glucksmann... Un Premier ministre de gauche nommé ? Pourquoi c'est possible
Cap à gauche pour le futur gouvernement ? Obtenir le soutien du PS, des Ecologistes et du PCF est une des solutions options dont dispose le bloc central pour espérer voire un nouveau Premier ministre résister plus que quelques jours ou de quelques semaines face à l'Assemblée nationale. Cela n'a pas échappé à certaines macronistes qui a tendu plusieurs perches à la gauche : Gabriel Attal s'est entretenu avec Olivier Faure et Marine Tondelier lundi soir, tandis qu'Elisabeth Borne a évoqué la suspension de la réforme des retraites alors qu'elle avait elle-même poussé l'adoption du texte à coups de 49.3. Il s'agit d'une demande de longue date de la gauche qui souhaite une abrogation du texte, mais le camp socialiste a nuancé son exigence ces derniers mois dans l'espoir d'être davantage entendu.
Cela n'a pas échappé à Sébastien Lecornu non plus. Le Premier ministre démissionnaire, chargé de mener les "ultimes négociations" dans le but de trouver une majorité ou a minima un accord de non-censure sur lequel un futur gouvernement pourrait s'appuyer, a échangé avec les forces de gauche ce mercredi 8 octobre. Mais s'il a également proposé de suspendre la réforme des retraites face à Raphaël Glucksmann, patron du parti Place publique, entre les murs de Matignon hier soir, il ne l'aurait pas évoqué devant Olivier Faure et les dirigeants du PS.
"Le Premier ministre n'a fermé aucune porte sur le pouvoir d'achat, la justice fiscale et le débat sur les retraites où il a pris acte de la déclaration de Borne, mais nous ne savons pas s'il mettra cela dans la maquette qu'il présentera ce soir au président de la République et qu'il présente comme une voie de passage", résume un participant. Le patron du PS craint qu'il s'agisse d'un "leurre" pour appâter la gauche et estime que "la meilleure garantie, c'est que la gauche et les écologistes soient appelés au pouvoir".
Une "cohabitation" mais un gouvernement sans macroniste ?
Les forces de gauche appellent à la nomination d'un Premier ministre issus de leurs rangs à la tête d'un gouvernement de gauche et écologiste depuis le dernier scrutin législatif. Un appel renouvelé après la démission de Sébastien Lecornu par le PS, les Ecologistes et le PCF qui se disent prêts à une "cohabitation". Toutefois, ils refusent un quelconque accord avec la droite et Olivier Faure a "coupé court à toutes les rumeurs d'un gouvernement commun avec la macronie".
La gauche veut donc un gouvernement de son bord au sens strict, mais ne ferme pas la porte à un accord de non-censure avec le bloc central. Si le camp présidentiel à besoin de la gauche pour trouver une majorité, l'inverse est également vrai. Avec 124 élus socialistes, écologistes et communistes et 161 députés de l'alliance présidentielle, il ne manque que 4 voix pour obtenir une majorité absolue. Lesquelles pourraient être trouvées chez les 22 élus indépendants du groupe Liot.
Mais il reste un problème, l'aile droite du camp présidentiel pourrait refuser de soutenir un Premier ministre de gauche, encore plus s'il est à la tête d'un gouvernement dépourvu des forces du bloc central. Plusieurs voix se sont d'ailleurs déjà élevées contre la suspension de la réforme des retraites.
Qui pourrait être nommé Premier ministre à gauche ?
Les volontaires pour Matignon ne manquent dans les rangs de la gauche, mais il faut réduire le champ des possibilités à des personnalités socialistes ou écologistes. Sans surprise, ce sont les noms d'Olivier Faure, patron du PS, et de Raphaël Glucksmann, son homologue pour Place publique qui a gagné en notoriété lors de la campagne des élections européennes, qui ressortent. Le premier a déjà dit, à plusieurs reprises, être prêt à s'installer à Matignon. Quant au second qui nourrit de possibles ambitions présidentielles, il semble aussi enclin à accepter le rôle de Premier ministre s'il lui était proposé. Marine Tondelier, patronne des Verts, paraît aussi comme une candidate mais pourrait être disqualifiée par sa proximité avec LFI.
Ces trois noms pourraient parler largement à gauche, mais ils pourraient aussi rencontrer des oppositions. Olivier Faure ne fait pas l'unanimité au sein de son propre parti, même si ces différences pourraient être mises de côté en cas d'accession à Matignon. Mais d'autres noms faisant consensus à gauche seraient susceptibles d'être avancées, comme celui de Lucie Castets l'avait été par le NFP après les législatives de 2024. La haute fonctionnaire pourrait-elle faire partie des options ? Pas sûr, car également associée à LFI.
Si la coalition ne pourrait avoir le soutien de la gauche qu'avec un Premier ministre de gauche, ce dernier devrait être également capable de parler au bloc central qui s'étend de l'aile gauche de Renaissance jusqu'au parti Horizons classé plutôt au centre-droit. Une personnalité sociale-démocrate avec un profil à la Bernard Cazeneuve pourrait être préférée. L'ancien Premier ministre ne sera cependant pas une option, son nom ayant déjà été rejetée par Marine Tondelier et par une partie du PS lors des précédents changements de gouvernement.
Les contours d'une coalition encore flous
Si un accord de non-censure entre la gauche et le bloc central semble envisagé, les discussions sont loin d'être terminées. Côté politique, Olivier Faure tient avant toute chose à s'assurer de la suspension de la réforme des retraites, chose pour laquelle il n'a eu "aucune assurance" a-t-il déclaré après son rendez-vous avec Sébastien Lecornu à Matignon. Il attend donc des "précisions" sur ce point et sur d'autres comme une nouvelle taxation opposée aux plus grosses fortunes, sans quoi il craint "une forme de mascarade (...) Cela ne doit pas être un écran de fumée".
Quant à la composition d'un futur gouvernement, le patron du PS a assuré qu'il ne formera pas un gouvernement "en commun" avec la macronie. "C'est inimaginable" a-t-il insisté envisageant seulement un accord de non-censure au sens strict.
23:36 - "Sébastien Lecornu a reconnu que la gauche avait raison", assure Boris Vallaud
Le patron des députés issus du Parti socialiste [PS] à l'Assemblée nationale, Boris Vallaud, a estimé sur le réseau social X qu'après "des années de déni macroniste, Sébastien Lecornu a reconnu que la gauche avait raison. Il faut désormais en tirer les conséquences et laisser la gauche gouverner". Au cours de la soirée et à la suite de l’interview de Sébastien Lecornu sur France 2, plusieurs personnalités de la gauche, dont celles du PS, ont pris la parole pour exiger une cohabitation au gouvernement, à l’image du député du Calvados, Arthur Delaporte, ou bien Marine Tondelier du côté des Écologistes.
Réforme des retraites, taxation des ultrariches...
— Boris VALLAUD (@BorisVallaud) October 8, 2025
Après des années de déni macroniste, Sébastien Lecornu a reconnu que la gauche avait raison.
Il faut désormais en tirer les conséquences et laisser la gauche gouverner.
19:55 - Ce qu'entendent les Ecologistes par "Premier ministre de gauche"
Quand le parti écologiste réclame un "Premier ministre de gauche", il a une idée précise en tête a fait savoir Cyrielle Chatelain, présidente des députés écologistes. Il exige "un Premier ministre qui a, lors des [dernières] élections législatives, été en campagne au nom de la gauche et des écologistes et qui a eu le soutien des Français", c'est-à-dire qui a participé ou soutenu le Nouveau Front populaire (NFP).
19:01 - L'hypothèse d'un Premier ministre de gauche écartée au profit du retour de Lecornu ?
Alors que l'hypothèse d'un Premier ministre de gauche a pris de l'épaisseur depuis hier soir, un autre scénario s'est dessiné en parallèle ce mercredi, celui "reconduction de Lecornu à Matignon" selon des informations d'Europe 1 et du Parisien. Le quotidien francilien écrivait même il y a quelques heures qu'une telle nomination pouvait être annoncée "juste avant 20 heures, par voie de communiqué de presse de l’Élysée, ou demain dans la journée". Cette option "permettrait au Président de gagner du temps et de peut-être faire passer un budget avant la fin de l’année, car ça reste la priorité", expliquait un poids lourd du gouvernement.
Mais entre temps, l'entourage du Premier ministre démissionnaire a démenti cette auprès de BFMTV rappelant que Sébastien Lecornu avait seulement accepté "la mission des 48 heures à la demande du président de la République" et jugeant nécessaire de "cesser les rumeurs et les fausses informations qui ne permettent pas de sortir de la crise".
17:55 - L'hypothèse Cazeneuve d'ores et déjà écartées
Pressenti pour être nommé Premier ministre par Emmanuel Macron lors de précédents changements de gouvernement, notamment à la place de Michel Barnier puis de François Bayrou, Bernard Cazeneuve a le profil pouvant correspondre à un Premier ministre devant parler à la gauche et au bloc central. Son nom est cependant rejeté par une partie de la gauche. Le PS s'est déjà opposé à cette hypothèse par la passé et ce mercredi, la cheffe des députés écologistes à l'Assemble nationale Cyrielle Châtelain a martelé : "pas de Bernard Cazeneuve" à Matignon.