Cop26 à Glasgow : que retenir du sommet pour le climat ?

Cop26 à Glasgow : que retenir du sommet pour le climat ? COP26. Vive déception autour du Pacte de Glasgow : entre les larmes du président de la Conférence, Alok Sharma, et les critiques des ONG et des experts sur l'impact limité des mesures prises, que retenir de la COP de Glasgow ?

[Mise à jour le 15 novembre 2021 à 18h53] "Je suis profondément désolé". Le ton employé et les larmes d'Alok Sharma en ont dit long. Samedi 13 novembre 2021 s'est refermée la Cop26 à Glasgow après deux semaines de tractations pour aboutir à un accord afin d'intensifier les efforts dans la lutte contre le réchauffement climatique. Mais le texte signé par les 196 pays participants est loin des objectifs affichés, d'où la détresse du président du sommet mondial au moment de prononcer le discours de clôture. Car selon les prédictions de l'ONU, un réchauffement climatique de l'ordre de 2,7°C est à craindre d'ici 2100.

D'autant que la question des énergies fossiles, dont leur réduction a été pour la première fois mentionnée dans l'accord final, a été édulcorée au dernier moment. S'il était au départ question de convenir d'une "disparition progressive", la Chine et l'Inde ont fait pression pour qu'il soit plutôt évoqué une "diminution progressive". Les pays signataires doivent donc vaguement "accélérer les efforts vers la diminution progressive de l'énergie au charbon sans système de capture [de CO2] et des subventions inefficaces aux énergies fossiles". Concernant la réduction des émissions de gaz à effet de serre, les pays sont appelés à "réviser et renforcer", en 2022, leurs objectifs à atteindre en 2030. Mais la possibilité de "prendre en compte les circonstances nationales" laisse place à une latitude dont devraient profiter les plus gros pays.

Si la déclaration réaffirme l'objectif de l'accord de Paris visant à "maintenir l'augmentation de la température globale bien en dessous des 2°C" et "poursuivre les efforts de limiter l'augmentation de la température à 1,5°C", il est demandé une réducation "rapide, profonde et soutenue des émissions globales de gaz à effet de serre, notamment en réduisant les émissions de dioxyde de carbone de 45% en 2030 par rapport à 2010 et d'atteindre la neutralité carbone au milieu du siècle". Par ailleurs, il a été rappelé que les pays développés n'ont toujours pas versés l'enveloppe de 100 milliards de dollars annuels vers les pays pauvres pour les aider dans leur transition écologique. Cependant, divers accords pour enrayer la protection et la restauration des forêts, réduire les émissions de méthane, la fin du financement à l'étranger de projets d'exploitation d'énergies fossiles, l'abandon progressif de combustibles fossiles ont été signés.

La France sous le feu des critiques

Si les nations du G20 s'étaient accordées pour cesser de soutenir les projets de centrales au charbon à l'étranger, un nouvel accord, que la France a ratifié le 12 novembre, entérine cette décision en allant plus loin : ce nouveau plan inclut, pour la première fois, gaz et pétrole. En outre, il contient la promesse de réorienter cet argent vers des énergies renouvelables. Après la signature de la France, Lorette Philippot, chargée de campagne finance aux Amis de la Terre, a réagi : "Le gouvernement français cède enfin aux pressions de la diplomatie et de la société civile. Il s'agit d'une victoire cruciale après des années de mobilisation contre les subventions néfastes pour le climat aux combustibles fossiles à l'étranger."

Parce qu'elle rechignait à rejoindre la liste des 30 signataires (pays et banques publiques) s'engageant à mettre un terme au financement à l'étranger d'énergies fossiles d'ici à la fin 2022 "dans des circonstances limitées et clairement définies qui sont compatibles avec une limite de réchauffement de 1,5 °C et les objectifs de l'accord de Paris", la France avait été vivement critiquée lors de la Cop26. Et pour cause : l'Allemagne, les Pays-Bas et l'Espagne avaient signé cet accord dès le 4 novembre, elle se retrouvait donc isolée en Europe sur cette position. Paris avançait ne s'être fixé pour objectif d'arrêter le soutien au pétrole qu'à la date butoir de 2025 : "C'est trop tard et cela montre qu'il y a un problème de cohérence en France : on ne peut pas arrêter la production chez nous, mais continuer de financer des projets ailleurs par le biais de la banque publique d'investissement. Cela interroge sur le leadership de la France", avait jugé Romain Ioualalen, chargé de campagne à l'ONG Oil Change International.

Qu'a-t-il été décidé lors de la Cop26 ?

  • La fin des voitures roulant à l'essence ou au gazole, ce n'est pas pour tout de suite. Pourtant, mercredi 10 novembre 2021, une trentaine de pays, des régions ainsi qu'une dizaine de constructeurs automobiles ont signé un accord pour "travailler" afin que d'ici 2040, l'ensemble des voitures neuves vendues soient "zéro émission". Ainsi, des pays comme le Royaume-Uni, l'Irlande, la Suède, Israël, ou encore l'état de la Californie (Etats-Unis) veulent, d'ici 2035, ne plus vendre des voitures à moteur thermique, c'est-à-dire des voitures qui nécessitent du carburant (essence ou gazole) pour rouler. Cependant, l'Allemagne, la Chine, les Etats-Unis ou encore le Brésil n'ont pas signé cet accord. Du côté de la France, "sur 2035, nous sommes d'accord sur le principe de la fin de la vente des véhicules non électrifiés", a expliqué Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique. Côté constructeurs, seuls Ford, Mercedes-Benz, General Motors et Volvo ont rejoint l'initiative. Cette dernière emballe peu Greenpeace, notamment sa section allemande, par la voix de Martin Kaiser : "Ce qui est très inquiétant est que des économies majeures comme les États-Unis, l'Allemagne, la Chine, le Japon, et des constructeurs comme VW, Toyota et Hyundai n'ont même pas voulu signer une déclaration sur les véhicules électriques qui promet moins que ce qui serait nécessaire pour conserver une certaine sécurité climatique".
  • Plus d'investissements dans des projets d'énergies fossiles : c'est ce à quoi se sont engagés 19 pays, jeudi 4 novembre, dont le Canada et les Etats-Unis. D'ici fin 2022, ils ne contribueront plus au financement à l'étranger de projets concernant le charbon, le gaz et le pétrole sans technique de capture de carbone. "Investir dans des projets liés aux combustibles fossiles non assortis de systèmes de capture du carbone comporte de plus en plus des risques sociaux et économiques", indique une déclaration commune des signataires. Le 12 novembre, après de longues journées d'hésitation, la France a également rallié l'accord. Le 11 novembre, c'était la coalition "BOGA" (dont la France fait partie) qui promettait de sortir du charbon, du pétrole et du gaz d'ici à 2030 ou 2040, marquant la volonté de sortir des énergies fossiles.
  • Un accord pour sortir du charbon a été annoncé mercredi 3 novembre par le gouvernement britannique. Il a été signé par 190 entités (pays, régions, organisations) pour en sortir progressivement à partir de 2030 pour les pays développés et 2040 pour ceux en développement, et pour "ne plus soutenir la création de nouvelles centrales à charbon". Le Vietnam, l'Egypte, le Chili ou encore la Pologne font notamment partie des signataires. 77 pays se sont engagés à fermer leurs centrales à charbon et à ne pas en construire de nouvelles. Alors que les grandes banques mondiales se sont également engagées à ne plus financer le charbon, l'Inde, la Chine ou encore les Etats-Unis n'ont pas ratifié la promesse. Toutefois, le Royaume-Uni s'est félicité d'un "tournant décisif dans la transition mondiale de l'énergie propre".
  • Un "pacte global pour le méthane" a été signé pas par près de 90 pays, dont la France, l'Allemagne, le Brésil et les Etats-Unis mardi 2 novembre. C'est la première fois qu'un texte sur le sujet est ratifié. Il prévoit une réduction des émissions mondiales de méthane d'au moins 30% d'ici à 2030 par rapport aux niveaux de 2020. Le méthane est un gaz à effet de serre, comme le CO2, dont les émissions émanent à 60% de l'activité humaine. Ce gaz provient de diverses sources. Du côté de l'agriculture, on le retrouve dans le fumier et les flatulences des vaches ou moutons ; dans les énergies fossiles, il s'agit de fuites durant le transport ou l'extraction de pétrole ou de gaz ; enfin, du méthane est contenu dans les sols de l'Arctique, qui pourrait être libéré avec la fonte des glaces.

Quel rôle joue la Chine lors de la Cop26 ?

C'est le plus gros pollueur du monde. Pourtant, son président ne s'est pas déplacé. Pas plus qu'il n'était venu au G20 quelques jours auparavant. Si la Chine est bien présente à la Cop26, via une délégation menée par son ministre des Affaires étrangères, son chef d'Etat, Xi Jinping, n'est pas monté à la tribune, comme de nombreux présidents, lors de l'ouverture de la conférence. Tout juste a-t-il transmis une déclaration écrite dans laquelle il a appelé "toutes les parties" à "intensifier leur coopération pour assurer le succès de la Cop26" et à se "focaliser sur les actions concrètes. Toutes les parties doivent honorer leurs engagements". Exhortant les pays développés à "faire plus eux-mêmes, mais aussi soutenir les pays en développement dans leurs efforts", Xi Jinping a indiqué vouloir "[s']appuyer sur l'innovation scientifique et technologique" pour mener la transition écologique, assurant que "la Chine continue d'accorder la priorité à l'écologie". 

Alors que ses relations diplomatiques ne sont pas au beau fixe, notamment avec les Etats-Unis, la Chine s'est engagée dans l'accord visant à enrayer la déforestation. Pour autant, elle est absente de deux accords importants passés à Glasgow : celui de la réduction de 30% des émissions de méthane d'ici 2030 et celui prévoyant l'arrêt de l'usage du charbon pour produire de l'électricité d'ici 2030. Pour autant, Pékin a rappelé s'être engagé à atteindre son pic d'émissions de CO2 avant 2030 (donc de les réduire par la suite) pour atteindre la neutralité carbone... en 2060.

Que signifie "Cop26" ? 

La Cop26 est l'acronyme de la 26e édition de la Conférence des parties. Il s'agit d'un organe qui regroupe les pays ayant ratifié la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques. 197 pays sont actuellement signataires de cet accord, initié lors du sommet de la Terre à Rio de Janeiro (Brésil) en 1992. Depuis 1995, chaque année, les pays se retrouvent pour trouver des solutions face au changement climatique. C'est ainsi que Paris avait accueilli, en 2015, la Cop21. 

Quel est le programme de la Cop26 ?

Du 31 octobre au 12 novembre, les représentants de chaque pays ont discuté et ont mené des tractations pour poursuivre la feuille de route édictée à Paris il y a six ans en vue, notamment, de la baisse des émissions de gaz à effet de serre, mais également de pousser les pays les plus riches à aider les plus pauvres dans la transition écologique. Les chefs de l'Etat sont remontés à la tribune pour prononcer leurs discours les 9 et 10 novembre afin de détailler les mesures qu'ils entendent mettre en œuvre. Par ailleurs, plus de 200 évènements ont été organisés en quinze jours, rassemblant des personnes issues de la société civiles, des associations ou ONG.

Quels sont les enjeux de la Cop26 ?

Cinq ans après la ratification historique des accords de Paris,  la Cop26 est vue comme "la dernière grande opportunité de reprendre le contrôle" sur le climat, à en croire les organisateurs. Ainsi, il s'agit premièrement d'accélérer les engagements pris en 2015 pour limiter l'augmentation du réchauffement climatique en dessous des 1,5°C d'ici 2030, en réduisant les émissions de gaz à effet de serre de 45%, l'objectif final étant d'atteindre la neutralité carbone en 2050. Était également évoquée la tarification carbone, c'est-à-dire les montants à payer selon les tonnes de CO2 émises, sur le principe de pollueur-payeur.

L'autre principal objectif était le soutien des pays riches vers les pays pauvres afin de les accompagner dans la mise en œuvre des objectifs. 100 milliards de dollars (86 milliards d'euros) doivent être déboursés chaque année pour les plus démunis. Or, les derniers chiffres de 2019 font état d'une cagnotte s'élevant à 79 milliards de dollars (68 milliards d'euros).