Blocage du 10 septembre 2025 : LFI appelle à se joindre au mouvement, les syndicats partagés

Mathilde Georges

Blocage du 10 septembre 2025 : LFI appelle à se joindre au mouvement, les syndicats partagés Un collectif de citoyens a lancé un appel à bloquer le pays le 10 septembre prochain pour dénoncer le plan budgétaire de François Bayrou pour 2026. Jean-Luc Mélenchon et LFI annoncent soutenir l'initiative.

Les annonces budgétaires du Premier Ministre François Bayrou, visant à économiser près de 43 milliards d’euros en 2026, suscitent manifestement colère et incompréhension, tant du côté des syndicats que parmi la population. En réaction, un collectif citoyen appelle à une mobilisation d’ampleur le 10 septembre 2025, avec un mot d’ordre clair : bloquer le pays. L’appel circule largement sur les réseaux sociaux via le hashtag #Mobilisation10Septembre.

"Ce mouvement est né parce qu'on en a marre", pouvait-on lire sur le site internet mobilisation10septembre, désormais inaccessible. "Marre de voir Bayrou détruire ce qu'il reste de justice et de solidarité. Assez des coupes, assez des sacrifices toujours imposés aux mêmes, assez de l’austérité qui écrase les gens pendant que les puissants continuent tranquilles." Un appel à la mobilisation générale qui rappelle les débuts du mouvement des Gilets jaunes en 2018 contre l'augmentation du prix de l'essence. Une initiative dont s'est emparé Jean-Luc Mélenchon, leader historique de La France insoumise.

Mélenchon et LFI soutiennent le blocage du pays

Le multiple candidat a la présidentielle a appelé à censurer François Bayrou, dans un texte paru dans La Tribune Dimanche, le 17 août dernier. "Nous ne laisserons pas faire (...) que l'Assemblée nationale soit réunie au plus vite en session extraordinaire", a-t-il lancé. "Nous déposerons immédiatement une motion de censure pour faire tomber le gouvernement", préviennent les signataires de la tribune, selon qui "ce gouvernement est incapable d'entendre raison" et "prépare la rentrée avec un projet de budget dévastateur". Plusieurs responsables LFI se sont joints à cet appel de Jean-Luc Mélenchon.

Ce n'est pas tout. LFI a clairement "décidé de soutenir l'initiative populaire du 10 septembre", clair, net et précis. Voilà pourquoi, les insoumis demandent "à tous ceux qui partagent (leurs) principes et (leur) volonté d'action pour en finir avec le gouvernement Bayrou de se mettre immédiatement au service des collectifs locaux qui proposent cette mobilisation et à tout faire pour sa réussite". Pour le coordinateur de LFI - Manuel Bompard - le mouvement "bloquons tout le 10 septembre" n'est pas d'extrême droite a-t-il affirmé ce lundi. Il appelle donc les sympathisants insoumis à y participer pour "empêcher le plan Bayrou de s'appliquer", au micro de France Info. "Je ne crois pas du tout que les revendications qui émergent de ce mouvement soient positionnées à l’extrême droite. On a dit la même chose au moment des mobilisations des gilets jaunes et le mouvement des gilets jaunes s’est traduit par des revendications pour plus de démocratie, pour plus de justice fiscale, pour plus de justice sociale", abonde-t-il.

En définitive, cette initiative de blocage prévue le 10 septembre prochain n'est rien d'autre que "l'expression d'une colère sociale légitime", selon le députe LFI de Seine-Saint-Denis, Aurélien Trouvé, sur Europe 1. Aujourd'hui, l'initiative réunit donc des internautes aux sensibilités politiques diverses et variées, de l'extrême droite à l'extrême gauche mais les syndicats, eux, souhaitent pour l'heure rester en retrait. Opposés au budget 2026 de François Bayrou, ils ne sont toutefois pas forcément d’accord sur les actions à mener à la rentrée. Une intersyndicale est prévue le 1er septembre. La CGT, la CFDT, FO, la CFE-CGC et la CFTC en feront partie "pour examiner les moyens de réagir pour contrer ce nouvel accès de brutalité envers la société et le monde du travail", expliquent-ils un communiqué commun publié le 9 août dernier.

Des profils variés parmi les membres du mouvement

D'après l'un des initiateurs de l'appel à "bloquer le pays", un trentenaire se disant salarié d’Enedis interrogé par Le Parisien, le collectif "Mobilisation10septembre" serait initié par une vingtaine de personnes, rencontrées via les réseaux sociaux. Le collectif, qui se veut apolitique et indépendant des syndicats, a choisi cette date "parce que c'est la rentrée sociale, le moment où tout redémarre", explique le trentenaire. Les appels à la mobilisation sont diffusés sur les réseaux sociaux depuis le 19 juillet selon Le Figaro, date à laquelle le site "mobilisation10septembre" a été mis en ligne.

Dès le lendemain, le collectif a créé un compte X (anciennement twitter) "Bloquons Tout", chargé de relayé l'appel. Un groupe Telegram national a également était créé pour "s'organiser localement, se regrouper par ville ou région, coordonner les actions 10 septembre et proposer son aide ou ses idées". Selon France Info, le compte a déjà relayé de nombreux messages, majoritairement axés sur l’organisation de la mobilisation. En discutant en ligne, plusieurs membres ont constitué des petits groupes puis se sont retrouver physiquement, comme ce fut le cas le lundi 28 juillet, lors d’une réunion organisée dans le parc des Buttes-Chaumont à Paris, à laquelle franceinfo a pu assister. 

Mais si la "vigilance" du gouvernement demeure, le profil des soutiens au mouvement interroge. Le mouvement se veut apolitique et indépendant des syndicats, pourtant, il est diffusé par d’anciens Gilets jaunes, comme Anaïs Albertini, ainsi que par des comptes d’extrême droite et de la fachosphère. Libération note que les 28 premiers abonnements du compte X du collectif incluent plusieurs figures de la sphère complotiste et identitaire, dont le site pro-Kremlin "Nice Provence info". Le salarié d'Enedis a déclaré à l'Humanité que le mouvement "accepte d’être soutenu par tout le monde quel que soit le parti". "Nous, on est en dehors de la politique. Tout ce qu’on veut, c’est se battre contre le plan de François Bayrou et rassembler tout le monde en dehors des divergences politiques".

Boycott, désobéissance et solidarité

Le collectif appelle alors à un "arrêt total du pays" à partir du 10 septembre 2025, une action qu'il veut "pacifique pour dénoncer les injustices et reprendre le pouvoir collectivement". Les organisateurs, qui souhaitent rester anonyme pour le moment, annoncent trois "modes d'action". D'abord, un boycott : cesser les achats dans les grandes surfaces, retirerson argent des banques, limiter la consommation (essence, fast-fashion…), et arrêter de travailler si possible (congés, arrêts maladie…)

"Après le boycott, vient la désobéissance", décrient ils sur leur site. Le mouvement appelle à un "refus collectif de remplir certaines obligations" (déclaration, formulaire), à la "rétention ou ralentissement volontaire dans les services publics", mais aussi à "l'occupation pacifique de lieux symboliques (préfecture, mairies, antenne CAF)" ou encore "blocages ciblés" de routes ou de dépôts logistique. "A partir du 10 septembre, on entre en résistance civique".

Seulement, "ce mouvement ne tiendra que si on se soutient les uns les autres", d'après les organisateurs. Alors, ils appellent à la "solidarité citoyenne" à travers la création des caisses de grève et de soutien local, l'organisation de repas partagés ou encore l'ouverture d'espaces de discussion et de coordination dans chaque quartier et village, et le partage des savoirs. 

Une carte des rassemblements publiée

Les modes d'action rappellent fortement ceux des Gilets jaunes, nés en novembre 2018 contre la hausse du prix des carburants. Même logique de blocages, même appel à une mobilisation hors des structures syndicales. Pour l'instant, aucun signe distinctif n'est annoncé, contrairement au fameux gilet fluorescent de 2018. 

Le collectif a déjà publié une carte des rassemblements et blocages sur son site internet. Des actions sont prévues le 10 septembre dans de nombreuses villes de France : Amiens, Angers, Avignon, Besançon, Bordeaux, Brest, Clermont-Ferrand, Dijon, Grenoble, Le Mans, Lille, Limoges, Lyon, Marseille, Metz, Montpellier, Nancy, Nice, Orléans, Pau, Poitiers, Reims, Rennes, Strasbourg, Toulouse, Troyes, Valenciennes. Des blocages stratégiques sont aussi programmés, notamment au Port du Havre et des Raffineries en Ile-de-France. Pour autant, aucun blocage de rond-point, cœur des mobilisations des gilets jaunes, n'a été annoncé pour l'instant.

Dernières mises à jour

11:15 - Les syndicats en ordre dispersé

Si les syndicats ont dit leur opposition au projet de budget de François Bayrou pour 2026, ils ne sont pas vraiment en ordre de marche derrière cet appel à bloquer le pays le 10 septembre prochain. Actions communes, individuelles, appels à la grève... Rien n'est encore déterminé. Seule une pétition a été lancée fin juillet, intitulée "budget : les sacrifices pour le monde du travail, ça suffit". Elle a recueilli 330 000 signatures. Certains syndicats - la CGT Energie ou Chimie - ont pris les devants en déposant des préavis de grève. Quid de la CDFT, premier syndicat français et plutôt adepte de la négociation ? Il organise une université d'été le 26 août, François Bayrou est justement convié.