"Nous resterons sur terre", l'ambivalence

Vos images sont à la fois séduisantes et anxiogènes. Pourquoi avoir cherché à marier les antonymes ?
Je souhaitais montrer l'humanité dans toute sa contradiction, avec toute l'ambivalence qu'elle porte en elle, dans tout ce qu'elle a de bon ou de mauvais, de beau ou de laid, de banal ou délirant. J'ai essayé de faire en sorte que chaque image porte cette ambivalence. Certes nous générons des déchets, nous abîmons la nature, nous avons créé des lieux que nous aimons autant que nous détestons, mais ce monde que nous avons créé est le nôtre.
Arrêtons-nous sur ce que nous avons fait, dans sa grandeur autant que sa noirceur
L'humain a passé des centaines de générations à s'inventer un monde de confort et de sécurité. Et malgré tous ses mauvais côtés, il fascine, attire et fait fantasmer. L'occidentalisation du monde commence par celle des esprits, comme le montre bien cette photo de la hutte Xingu. La prolifération est en cours dans la tête des jeunes qui refusent par exemple de porter les vêtements traditionnels. Et ça, on ne peut pas l'empêcher.
Effectivement, mes images montrent parfois des choses dures. Cependant, mon travail n'est pas un travail de militant écologiste, avec un discours moralisateur. Je veux simplement que l'on s'arrête sur ce que nous avons fait, dans sa grandeur autant que dans sa noirceur.
Je souhaitais parler des humains sans les montrer
Pourquoi ne voit-on jamais d'hommes ?
Il y en a quelques-uns, mais les rares que l'on voit sont flous. Je souhaitais parler des humains sans les montrer. Et pour mieux se rendre compte de ce que les humains ont fait, il fallait les faire disparaitre. Ainsi, on se focalise sur ce qui reste, comme si un cataclysme les avait tous emportés. Je ne voulais pas faire une série sur les ouvriers indiens à Dubaï par exemple, mais sur la folie, le gigantisme qui se dégage de ces constructions à foison absolument fascinantes.