Mark MacGann : qui est le lobbyiste d'Uber et le soutien de Macron ?
MACGANN. Mark MacGann, le lanceur d'alerte derrière les Uber Files est l'ancien lobbyiste d'Uber. Au Guardian, il détaille les pratiques discutables de la société et indique s'être rapproché d'Emmanuel Macron lors de la campagne présidentielle de 2017. Qui est-il ?
[Mis à jour le 12 juillet 2022 à 12h16] Décrit comme un lobbyiste du groupe Uber dans les révélations des Uber Files, Mark MacGann s'est révélé être le lanceur d'alerte le 11 juillet 2022. Ancien chef lobbyiste en charge de l'Europe, de l'Afrique et du Moyen-Orient pour la firme américaine entre 2014 et 2016, l'Irlandais de 52 ans a expliqué au Guardian avoir quitté l'entreprise et vouloir dénoncer les pratiques de l'ancien directeur de la société pour faire "amende honorable" et "corriger [son] erreur". Le nom de l'Irlandais est plusieurs fois revenu comme l'un des principaux interlocuteurs, avec Travis Kalanick, d'Emmanuel Macron et un des faiseurs du deal secret entre le ministre de l'Economie et Uber. Depuis, une nouvelle facette de Mark MacGann se profile dans les documents des Uber Files et l'interview de l'homme au journal britannique retranscrite par Radio France : celle d'un soutien de poids dans la campagne présidentielle d'Emmanuel Marcon en 2017.
Si la relation privilégiée entre Mark MacGann et Emmanuel Macron a vu le jour dans un but précis, implanter Uber sur le marché français, elle s'est prolongée et étendue à d'autres projets politiques : la campagne présidentielle. C'est en 2016 que la bascule s'opère et lobbyiste, qui a quitté son poste à temps plein chez Uber pour n'être plus que "conseiller senior du conseil d'administration", propose son aide au ministre de l'Economie qui cherche à créer son parti et financer sa future campagne. Une aide que le jeune politique ne refuse pas, faisant de l'ex-lobbyiste un soutien de poids pour la future République en marche. L'apport de Mark MacGann au projet d'Emmanuel Macron tient essentiellement dans la récolte de soutiens financiers lors de dîners pendant lesquels les invités "sont incités à contribuer à la campagne à la hauteur du plafond légal, 7 500 euros par an", rapporte Le Monde. Si la nouvelle entraide entre le politique et le lobbyiste peut interroger, Mark MacGann assure avoir rejoint le projet politique d'Emmanuel Macron par "pure conviction politique", un enthousiasme pour le programme surtout économique du ministre confirmé dans des documents consultés par le journal.
Reste que ce sont les agissements de Mark MacGann au sein de la stratégie lobbyiste d'Uber et sa récente dénonciation des pratiques de l'entreprise plus que son soutien politique à Emmanuel Macron qui occupent les esprits. Parmi les 124 000 documents confidentiels d'Uber transmis au Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ) par l'ancien lobbyiste, plusieurs le présentent comme une personnalité centrale des Uber Files. "Je suis en partie responsable, et c'est ce qui me motive à faire ce que je fais en tant que lanceur d'alerte. Ce n'est évidemment pas une chose facile", reconnaissait-il au Guardian, lundi 11 juillet.
Que dénonce Mark MacGann dans les Uber Files ?
Il est un ancien cadre de la société de VTC Uber et la source qui a confié les milliers de documents confidentiels des Uber Files aux médias le 10 juillet 2022. Employé par la firme californienne de 2014 à 2016, Mark MacGann a participé aux dérives et aux pratiques pas toujours nettes d'Uber. Le cinquantenaire a coupé les ponts avec l'entreprise après avoir subi des pressions et fait l'objet de menaces des chauffeurs de taxi, opposés à l'entreprise.
Dans les colonnes du Guardian, l'homme explique qu'Uber était au fait de son illégalité dans la plupart des juridictions mais la société suivait à la lettre le "mantra" de la direction. "Ne demandez pas de permission, lancez-vous, bousculez, recrutez des chauffeurs, allez sur le terrain, faites du marketing et rapidement les gens se réveilleront et verront à quel point Uber est une chose géniale." Une stratégie poussive qui passait aussi par des accords avec les politiques, dont Emmanuel Macron. Selon Mark MacGann, l'homme a la tête de l'entreprise, Travis Kalanick, défendait aussi un point de vue particulier selon lequel le "seul moyen d'amener les gouvernements à changer les règles, à légaliser Uber et à permettre à Uber de se développer [...] c'était de continuer le combat, de maintenir la controverse". Et ce même lorsque le controverse s'accompagnait de violence à l'égard des chauffeurs Uber ou des cadres de l'entreprise tels que Mark MacGann.
Des méthodes "dangereuses" que le lobbyiste dénonce aujourd'hui mais contre lesquelles il dit n'avoir rien pu faire en interne : "La culture d'entreprise ne permettait pas réellement de résister, de remettre en question les décisions de l'entreprise, sa stratégie ou ses pratiques. J'ai fini par me rendre compte que je n'avais aucune influence, que je perdais mon temps dans cette entreprise."
Qui est Mark MacGann, le lanceur d'alerte des "Uber Files" ?
Mark MacGann est un homme âgé de 52 ans, de nationalité irlandaise, ayant travaillé pour Uber durant deux ans, entre 2014 et 2016. Il occupait le poste de chef lobbyiste en charge de l'Europe, de l'Afrique et du Moyen-Orient. "J'ai été embauché par Uber pour diriger une équipe chargée d'élaborer et de mettre en œuvre notre stratégie de lobbying auprès des gouvernements afin que nous puissions entrer sur le marché et nous développer, malgré des règlementations qui, dans la plupart des cas, empêchaient la mise en place d'Uber", explique-t-il dans son interview au Guardian.
Cet homme de l'ombre, rouage essentiel du déploiement d'Uber dans de nombreux pays, a côtoyé les personnalités les plus hauts placées. "Je pense que je n'ai jamais eu, au cours de ma carrière, aussi facilement accès à des hauts fonctionnaires du gouvernement, à des chefs de gouvernement, à des chefs d'État. C'était enivrant", raconte-t-il.
Le revers de la médaille ? Il était l'un des membres bien identifiés de chez Uber lors de la crise avec les taxis, notamment en France. "J'ai commencé à recevoir des insultes sur Twitter. Puis on me criait dessus dans les aéroports, les gares… Les chauffeurs de taxi ont commencé à me suivre. Ils filmaient l'endroit où je vivais, tapaient à la porte, publiaient des photos de moi avec mes amis, et les enfants de mes amis", affirme Mark MacGann. Placé en permanence sous la protection de gardes du corps, il finit par démissionner.