Droits de douane : des négociations en cours, le gouvernement opposé à l'accord sur les taxes américaines

Droits de douane : des négociations en cours, le gouvernement opposé à l'accord sur les taxes américaines Après l'accord sur les droits de douane américains de 15 % sur les exportations européennes, l'Union européenne a annoncé, mardi 5 août, suspendre ses mesures de riposte.

L'Union européenne a annoncé, mardi 5 août, suspendre ses représailles aux droits de douane de Donald Trump, après l'accord commercial noué entre les États-Unis et l'UE le 27 juillet. Cet accord sur les droits de douane prévoit une taxation des exportations européennes à 15 %. Toutefois, l'Union européenne n'a pas exclu de réactiver des mesures de riposte si le bras de fer commercial de Donald Trump connaît de nouveaux rebondissements. L'accord sur les droits de douane divise en Europe et a déclenché un véritable tollé en France. L'échiquier politique semble unanime et n'a pas manqué de fustiger un accord vécu comme un affront jusqu'au sommet de l'État. 

Le locataire de Matignon, François Bayrou, déplore "un jour sombre que celui où une alliance de peuples libres, rassemblés pour affirmer leurs valeurs et défendre leurs intérêts, se résout à la soumission", sur X. Même son de cloche du côté de Marc Fesneau, président du groupe MoDem à l'Assemblée nationale : "Nous n'avons pas construit l'Europe et nous ne sommes pas d'ardents défenseurs de l'Europe pour voir ainsi bradés nos intérêts. L'accord commercial (...) se fait clairement au détriment de l'Europe. Un rééquilibrage est impératif", abonde-t-il.

"Nous n'avons pas été assez craints", regrette Macron

Emmanuel Macron a attendu trois jours pour commenter cet accord historique entre l'UE et les USA, en conseil des ministres, mercredi 30 juillet. "Pour être libre, il faut être craints. Nous n'avons pas été assez craints", a estimé le chef de l'État, selon une source ayant participé au conseil des ministres. "L'Europe ne se vit pas encore suffisamment comme une puissance", mais "la France a toujours tenu une position de fermeté et d'exigence. Elle continuera de le faire. Ce n'est pas la fin de l'histoire et nous n'en resterons pas là. C'est une première étape dans un processus de négociation qui va se poursuivre", a-t-il lancé, relaie l'AFP.

Du côté de l'opposition au bloc central, la déception est grande, et la colère bien visible. "Tout a été cédé à Trump. Droits de douane, obligation d'achat, taxe de 5 % sur le PIB : le libéralisme, la concurrence libre et non faussée et les autres règles du Traité de Lisbonne sont une mauvaise blague", fustige le leader LFI, Jean-Luc Mélenchon. "L'accord UE-États-Unis est une honte. Il donne le point à Trump en se soumettant à ses conditions", regrette le patron du PS, Olivier Faure, toujours sur X. Marine Le Pen, elle, déplore un "fiasco politique, économique et moral (...) La moindre des choses serait de reconnaître ce cuisant échec plutôt que de demander aux Français, qui en seront les premières victimes, de s'en réjouir", ajoute-t-elle.

Pour rappel, cet accord conclu entre l'UE et les États-Unis pourrait gravement impacter des secteurs comme l'automobile, le luxe ou l'agroalimentaire. En revanche, l'aéronautique, la chimie et les spiritueux seront exemptés de ce nouveau niveau de taxation. L'ex-ministre des Affaires étrangères et candidat à la présidentielle de 2027, Dominique de Villepin dénonce un "traité inégal où l'un paye des droits de douane à hauteur de 15 %, mais l'autre aucun". "Il est illusoire de croire que Donald Trump arrêtera là ses revendications face à une Europe dont il méprise la souveraineté", explique-t-il. 

"Il ne faudrait pas que cet accord soit la fin de l'histoire"

Seuls certains membres du gouvernement français ont semblé mettre un peu d'eau dans leur vin au moment de commenter cet accord historique sur les droits de douane entre l'UE et les USA. "Certaines filières importantes pour l'industrie européenne, comme l'aéronautique, comme les spiritueux, devraient être exemptées", a dit le ministre de l'Industrie, Marc Ferracci sur RTL. Pour Laurent Saint-Martin, ministre chargé du Commerce extérieur, "il ne faudrait pas que cet accord soit la fin de l'histoire. Sinon, nous serons simplement affaiblis", met-il en garde. Ce dernier appelle Bruxelles à "travailler sans attendre sur des procédures de soutien pour les filières fragilisées". Le ministre délégué chargé de l'Europe, Benjamin Haddad, se félicite lui que l'accord laisse souffler "des secteurs clés pour l'économie française", comme celui des médicaments, entre autres.

Un avis partagé par Emmanuel Macron, mercredi 30 juillet en conseil des ministres : "L'accord a le mérite d'offrir de la visibilité et de la prévisibilité à court terme. Il préserve les intérêts français et européens : exemptions de droits de douane pour certaines de nos filières exportatrices majeures dont l'aéronautique, aucune concession pour nos filières agricoles, aucune remise en cause de notre autonomie réglementaire, de nos normes sanitaires et environnementales. La commission y a veillé", assure-t-il, dans des propos relayés par l'AFP. Enfin, pour le Medef, "cet accord illustre la difficulté qu'à encore l'UE à faire valoir la puissance de son économie et l'importance de son marché intérieur", même "s'il est un moindre mal". "L'Europe ne saurait être la variable d'ajustement des politiques américaines et chinoises", écrit le syndicat dans une lettre transmise à l'AFP.

Une deuxième phase de négociations

En enterrant les mesures de représailles qui avaient été préparées, l'Union européenne se dirige vers une nouvelle phase de négociations. "Nous voulons des droits zéro pour zéro pour les spiritueux, les équipements médicaux, les produits chimiques", a indiqué un haut responsable européen cité par Les Echos. Une déclaration commune des États-Unis et de l'Union européenne doit encore être publiée. Les diplomates européens se félicitent pour des droits de douane plafonnés à 15%. Avant d'autres négociations, "nous avons un plafond de 15% pour tous les produits, y compris les produits pharmaceutiques dont nous ne connaissons pas encore les droits de douane", a affirmé un officiel de la Commission européenne. Selon un responsable européen, les négociations sur l'acier, qui est taxé à 50%, prennent plus de temps en raison des questions liées aux volumes qui bénéficieront de droits moins élevés.