Charles Pellegrini Fusillades : "Une Kalachnikov, entre 1 500 et 2 000 euros"
Avec trois fusillades à la Kalachnikov en une semaine, Marseille est au cœur de l'actualité. Pourquoi cette vague de violences à l'arme lourde ? Analyse de Charles Pellegrini, ancien chef de l'Office central pour la répression du banditisme.
Pourquoi cette vague de fusillades à Marseille ?
Il s'agit en fait d'un hasard, ça aurait pu arriver dans trois mois ou il y a trois mois, à Marseille ou ailleurs. C'est une conjonction d'éléments divers, une guerre des gangs pour le contrôle des territoires des trafics de drogue. Il n'y a pas de raison objective que cela ait lieu maintenant. C'est parti comme ça.
Ce sont des Kalachnikov qui ont été utilisées lors de ces fusillades. Pourquoi cette arme en particulier ?
"Les gens déjantés [...] prennent ce qui est le plus dur, ce qui peut les valoriser."
La Kalachnikov est une arme à la mode. Fiable, puissante, pas chère et disponible en abondance. Il y en a partout ! Avant, les bandits se servaient d'armes de poing, d'armes de chasse. Aujourd'hui, les gens déjantés, déstructurés, stupides, prennent ce qui est le plus dur, ce qui peut les valoriser. Ils sont souvent chargés de drogue et n'ont aucune référence, aucun contrôle... Ce n'est pas du banditisme, ce sont des types qui sont des bourrins, bas de plafond... D'ailleurs l'un des braqueurs, à Vitrolles, a tué son propre complice.
Avant, les armes de guerre, c'était le summum. Mais aujourd'hui, n'importe quel petit caïd d'un quartier, qui vend de la drogue, peut s'acheter une Kalachnikov !
D'où viennent les Kalachnikov utilisées à Marseille selon-vous ?
"Les arsenaux ont été vidés en Libye..."
Il s'en est produit des millions dans le monde, pas des milliers, des millions. C'est une arme redoutable, d'une grande puissance de destruction. Il y en a partout. Ces armes ont servi au Liban, dans les Balkans, en Libye... Cela emprunte les différents circuits des trafics de drogue ou de voitures et ça arrive en France.
En Libye, les arsenaux ont été vidés : une grande partie est allée à Al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi), notamment au Mali et au Niger... Et une autre partie va partir dans les réseaux du banditisme, c'est sûr.
Quel est le prix actuel d'une Kalachnikov ?
Entre 1 500 et 2 000 euros, 1 500 euros dans la moyenne. Cela peut être plus cher si c'est en bon état, comme une Kalachnikov toute neuve avec un chargeur bien garni.
Comment ces armes sont-elles emmenées en France ?
"Les Kalachnikov se transportent non démontées dans les coffres de voitures..."
C'est un trafic qui fonctionne en flux tendu. Les armes sont transportées dans les voitures, les bus. Les Kalachnikov sont démontées pour franchir les frontières... Mais sinon, une fois en France, elles se transportent non démontées dans les coffres des voitures, voire entre les jambes des passagers. De nombreuses personnes ont déjà été arrêtées en possession de Kalachnikov.
Comment lutter contre le trafic et l'utilisation de ces armes ?
Il faudrait mettre deux ans de prison ferme aux détenteurs de Kalachnikov, ce serait dissuasif. Une peine qui devrait être inscrite dans la loi, que les magistrats seraient tenus d'appliquer.
Le parcours de Charles Pellegrini
Ancien commissaire, Charles Pellegrini a notamment occupé le poste de chef de l'Office Central pour la Répression du Banditisme (OCRB). Il est l'auteur de "Banlieues en flammes" ou de "La Sécurité n'existe pas". Il œuvre aujourd'hui dans le conseil en sécurité privée, avec son entreprise Charles Pellegrini Médiation (CPM).