Attentat Istanbul (Turquie) : Daesh derrière l'attaque de l'aéroport Atatürk ?

Attentat Istanbul (Turquie) : Daesh derrière l'attaque de l'aéroport Atatürk ? L'attentat d'Istanbul a fait au moins 41 mort selon le dernier bilan. Trois personnes se sont fait exploser à l'aéroport Ataturk, en Turquie, un mode opératoire qui rappelle celui utilisé par Daesh.

[Mis à jour le 29 juin 2016 à 21h27] La Turquie se réveille endolorie au lendemain de l'attentat à l'aéroport d'Istanbul qui a fait au moins 41 morts et 239 blessés, selon le dernier bilan. D'après le scénario livré par le Premier ministre turc, les trois kamikazes seraient arrivés en taxi à l'aéroport Atatürk. Des explosions auraient d'abord retenti à l'entrée du terminal avant que les trois hommes ouvrent le feu sur les passagers et échangent des tirs avec les policiers en faction. Ils se seraient ensuite fait exploser. D'après les autorités, 23 Turcs et 13 ressortissants étrangers ont été tués lors de l'attentat. Parmi eux, 5 Saoudiens et 2 Irakiens, un Tunisien, un Ouzebek, un Chinois, un Iranien, un Ukrainien et un Jordanien. Aucune victime n'a pour l'instant été identifiée comme étant française mais François Hollande a indiqué que deux Français ont été légèrement blessés

"Triple attentat-suicide d'Istanbul : le gouvernement accuse Daech"

Pour l'instant, l'attaque n'a pas été revendiquée, mais le Premier ministre Binali Yildrim a déjà indiqué que "les indices pointent Daesh". Déjà, mardi soir, Abdullah Agar, un expert des affaires de sécurité et de terrorisme interrogé par CNN-Türk, privilégiait la thèse d'un attentat djihadiste. "Cela ressemble beaucoup à leurs méthodes", a-t-il précisé en faisant référence aux attentats de Bruxelles. Une arme a été retrouvée dans l'aéroport après l'attentat, rapporte Reuters. "Il y a un membre des services de sécurité de l'aéroport qui a dit que l'un des personnes était identifiée comme militante de Daesh puisqu'on l'a vu su les caméras le matin venir à l'aéroport et faire une sorte de reconnaissance des lieux", a affirmé au micro d'Europe 1 Ahmet Insel, politologue et auteur de plusieurs livres sur la Turquie. Situé sur la partie européenne de la mégapole, l'aéroport d'Istanbul est l'un des plus fréquentés au monde, avec 60 millions de passagers par an.

De son côté, la chaîne américaine NBC a apporté des informations qui pourraient confirmer la thèse djihadiste. Le 16 juin dernier, son reporter en Turquie, Richard Engel, révélait qu'un ancien membre des services antiterroristes américains lui avait confié que l'État islamique avait envoyé une trentaine de djihadistes de la Syrie en Turquie. Après l'annonce de l'attentat d'Istanbul, le journaliste américain a revu ce chiffre à la hausse : Daesh aurait envoyé 35 djihadistes perpétrer des attentats avant la fin du mois du ramadan. Le pire resterait donc à venir.

"Cette attaque, qui s'est déroulée pendant le mois du ramadan, montre que le terrorisme frappe sans considération de foi ni de valeurs", a déclaré le président turc Recep Tayyip Erdogan. De son côté, François Hollande s'est exprimé dans la soirée pour condamner cette attaque et réaffirmer sa volonté de lutter contre le terrorisme, notamment dans cette région. "Nous devons agir et coordonner encore davantage nos services pour lutter contre le terrorisme et les trafics", a-t-il insisté.

La Turquie, victime de sa "complaisance" envers Daesh ?

Au lendemain de l'attentat à Istanbul, la question des relations entre la Turquie et Daesh est mise sur la table. Pour Christian Makarian, spécialiste de ce pays et éditorialiste en politique étrangère à L'Express, la Turquie a fait preuve de "complaisance" envers l'organisation terroriste. "Au démarrage du conflit syrien, on sait que la Turquie était très opposée à Bachar Al-Assad et qu'elle souhait sa chute", explique-t-il sur Europe 1. "La Turquie n'a pas prêté trop attention à l'émergence de Daesh qui s'est vraiment affirmé au cours de l'année 2014". "Il y a eu beaucoup de complaisance vis-à-vis de Daesh car ce n'était pas l'ennemi principal", résume-t-il. Frédéric Encel, docteur en géopolitique, partage cet avis. "Il y a un échec de la politique turque qui est franchement complaisante vis-à-vis de Daesh et de l'islamisme radical", a-t-il dit à BFMTV. "On a permis à Daesh d'exporter son pétrole, autrement dit le nerf de la guerre, par le biais du territoire turc".

En France, Jean-Christophe Lagarde comme Marine Le Pen sont sur cette ligne. "Evidemment qu'on condamne ce qui s'est passé à Ankara", a affirmé sur France Info le président de l'UDI. "Mais je veux aussi dire que l'attitude de la Turquie depuis le début de la crise en Irak et en Syrie a été tellement ambiguë", a-t-il ajouté. "Dans le cadre de la lutte contre les Kurdes, ils sont à tout le moins suspectés d'avoir pendant des mois facilité (...) le travail de l'Etat islamique", a également affirmé Marine Le Pen.

La Turquie a été la cible de nombreuses attaques terroristes ces derniers mois. Ces attaques sont en général attribuées à Daesh ou à des groupes kurdes militants comme le PKK. En mars dernier, 37 personnes ont trouvé la mort dans une attaque à la voiture piégée, à Ankara, la capitale du pays. L'attentat avait été revendiqué par un groupe de militants kurdes. Six jours plus tard, c'est l'EI qui lançait une attaque kamikaze dans les rues d'Istanbul, faisant 4 morts. Le même procédé avait permis à l'État islamique de tuer 12 touristes allemands en janvier 2016.

La menace terroriste fait de nombreuses victimes en Turquien mais a aussi de lourdes retombées économiques. Ainsi, la fréquentation touristique a chuté de 35% au mois de mai cette année par rapport à 2015. Depuis le début du cycle d'attentats, près de 200 personnes ont perdu la vie et des centaines d'autres ont été blessées. Après le dernier attentat à l'aéroport international d'Istanbul, la Turquie s'attend à une année noire sur le plan touristique et c'est une véritable catastrophe pour un pays dont 12% du PIB dépend du tourisme et de l'industrie du voyage.

Premières images de l'attentat à Istanbul

Des photos diffusées sur les réseaux sociaux montraient de lourds dégâts matériels à l'intérieur du terminal et des passagers à terre. Tous les vols ont été suspendus au départ du plus grand aéroport de Turquie mardi soir mais ont repris dès mercredi matin. L'aéroport Atatürk d'Istanbul est effectivement un des principaux hubs aéroportuaires de Turquie et compte parmi les 15 aéroports les plus fréquentés au monde. Sur les réseaux sociaux, les témoins de la scène de guerre partagent quelques informations sur ces événements et les images de la panique provoquée par les explosions et les échanges de tirs. Les autorités turques ont demandé mercredi aux médias du pays de ne pas publier des images de l'attentat car celles-ci pourraient "engendrer la peur, la panique, le chaos, faire le jeu des organisations terroristes".