13 Novembre : Hollande décrit l'émotion, la peur, la manière dont il a vécu les attentats

13 Novembre : Hollande décrit l'émotion, la peur, la manière dont il a vécu les attentats En ce 13 novembre 2019, quatre ans après les attentats de Paris et Saint-Denis, Le Point publie un entretien avec François Hollande. L'ancien président raconte comment il a vécu cette nuit d'horreur.

[Mis à jour le 13 novembre 2019 à 12h41] Quatre ans après les attentats de Paris et Saint-Denis, qui ont fait 131 morts et 413 blessés, François Hollande se pose toujours la question : "Comment sortir indemne de cette horreur ?". Cette nuit-là, le président de l'époque fait face à "l'horreur", comme il le dira lui-même dans son discours prononcé un peu avant minuit, alors que le Bataclan était encore aux mains des assaillants. Avec un peu de recul et beaucoup d'émotion et de sobriété, l'ancien chef de l'Etat revient pour Le Point sur ses émotions ce soir-là, que ce soit en tant que président bien sûr, mais également en tant que simple Français.

Dès les prémices de cette soirée sanglante, on sent chez François Hollande une volonté de garder un certain sang-froid, compte tenu des circonstances et du match de football en cours entre la France et l'Allemagne auquel il assiste et à proximité duquel l'une des attaques a été commise. "La responsable du groupe de sécurité de la présidence de la République (GSPR) vient m'annoncer qu'une bombe a explosé et qu'il y a déjà un mort – en fait, ils sont deux, mais on ne le sait pas encore. J'apprends donc qu'un acte terroriste est en cours. Mais je n'en connais pas l'ampleur", se souvient-il à ce moment-là, lui qui ne quittera pas tout de suite sa place, de peur de provoquer un mouvement de panique.

Ce 13 novembre, Hollande doit conjuguer "compassion et fermeté"

François Hollande, qui se dit extrêmement soulagé que le réseau téléphonique n'ait pas été assez bon pour que les spectateurs du Stade de France ne se tiennent informés, s'éclipse finalement à la 30e minute du match. "Je monte dans la salle de commandement, où sont réunis les responsables policiers, médecins, pompiers, l'ensemble des services de sécurité. C'est alors que je suis informé par le Premier ministre Manuel Valls, qui se trouve dans le 11e arrondissement, qu'il se passe quelque chose là-bas", raconte l'ancien chef de l'Etat, qui prend peu à peu la mesure des événements en cours et des tueries qui s'opères sur les terrasses de cafés parisiens. Mais il tient absolument à garder le stade le plus longtemps possible dans un climat serein et c'est ainsi qu'il regagne les tribunes.

A ce moment-là, le match se poursuit et François Hollande, saisi par la "peur", non pas pour lui même, mais "pour les Français", "essaye" d'être ce qu'il est, "à savoir un être humain placé par [s]es fonctions dans une position qui exige sang-froid et maîtrise". Et de résumer ce qu'implique sa fonction de l'époque à cet instant dramatique : "Les Français attendent de leur président qu'il ait des sentiments, mais qu'il ne soit pas emporté par eux, qu'il soit lucide dans les décisions graves qu'il a à prendre. Qu'il conjugue compassion et fermeté". François Hollande explique son calme également par sa connaissance de la situation, mais aussi l'expérience acquise malgré lui avec les précédentes attaques terroristes, celles de Charlie Hebdo et de l'Hyper Cacher. "Je sais que la France est une cible du terrorisme islamiste", dit-il.

"La mort ne cesse d'accompagner la vie des présidents"

Vient la fin du match, le confinement des spectateurs sur la pelouse du Stade de France, qui sera finalement évacuer dans le calme vers minuit. C'est un peu avant cette heure qu'intervient donc son discours, qu'il décide très vite de prononcer malgré les avis mitigés sur cette prise de parole du président, que François Hollande se dit "convaincu" de la nécessité. "C'est le président qui est en première ligne. On s'interroge beaucoup sur les institutions, moi le premier, mais, dans de telles circonstances, il n'y a qu'une seule autorité qui puisse s'exprimer, c'est le président de la République : il peut y avoir des informations à donner, des chiffres dramatiques à livrer, des procédures à engager, mais la nation attend que le président parle", raconte-t-il, se souvenant avoir seulement "griffonner quelques phrases" en guise de préparation.

La nuit se poursuivra avec la mobilisation quasi complète du gouvernement, dont Emmanuel Macron, pourtant "plus lointain dans la chaîne de décision" ce soir-là, en tant que ministre de l'Economie. Alors que le président actuel a également fait face à des actes terroristes depuis le début de son mandat (Trèbes, Strasbourg, la gare Saint-Charles de Marseille...), François Hollande conclut l'entretien avec un certain fatalisme : "La mort ne cesse d'accompagner la vie des présidents".