Ouaihid Ben Faïza : parrain de la drogue, il profite d'une permission exceptionnelle sous la surveillance... de sa femme

Ouaihid Ben Faïza : parrain de la drogue, il profite d'une permission exceptionnelle sous la surveillance... de sa femme L'un des barons du trafic de drogue de La Courneuve bénéficie d'une permission de sortie autorisée par la justice pour un entretien d'embauche. Il ne sera pas sous escorte policière, mais pris en charge par son épouse.

Une liberté temporaire qui ne manque pas de faire réagir. Ce lundi, Ouaihid Ben Faïza, un narcotrafiquant incarcéré au centre pénitentiaire de Vendin-le-Vieil, bénéficie d'une permission de sortie dans le cadre d'un rendez-vous professionnel. Condamné en 2012 pour trafic de stupéfiants en bande organisée et association de malfaiteurs en récidive, il s'était évadé en 2014 lors d'un transfert à l'hôpital Delafontaine de Saint-Denis grâce à la complicité d'un commando armé, alors qu'il était incarcéré à la prison de Villepinte depuis trois ans. Après deux semaines de cavale, il avait été interpellé au Blanc-Mesnil.

Aujourd'hui, cet homme de 52 ans, libérable en 2029, profite de quelques heures de permission au caractère exceptionnel. Cela peut lui permettre de "montrer à la justice qu'il est digne de confiance", a déclaré au micro de France Info son avocate. Le quinquagénaire a quitté la prison du Pas-de-Calais ce matin vers 8 heures. Il doit désormais se rendre en région lyonnaise avant de regagner son centre pénitentiaire le soir-même.

Il devrait s'y rendre en TGV depuis Lille, selon David Lacroix, délégué FO Pénitentiaire à Vendin-le-Vieil, pour Actu Lyon. "C'est un de ses proches qui va venir le chercher, qui va l'emmener là où il doit aller et puis qui le ramènera ce soir, comme prévu par la décision judiciaire", a détaillé son avocate. C'est bien son épouse qui devrait s'occuper du transfert, comme indiqué par BFMTV.

Une décision validée par la cour d'appel de Douai

Le détenu - considéré comme l'un des barons du trafic de drogue de La Courneuve (Seine-Saint-Denis) - ne sera pas sous escorte policière. En revanche, "il n'est pas parfaitement libre de ses mouvements, il est contrôlé. Il doit sortir à telle heure, aller dans tel endroit", précise son avocate, Marie Violleau. Une situation fustigée par le syndicat Ufap Unsa Justice dans un communiqué. C'est "une décision totalement déconnectée des exigences, des réalités et des contraintes imposées chaque jour aux personnels pénitentiaires", peut-on lire. "Cette permission n'est pas simplement incompréhensible : elle décrédibilise le régime QLCO et expose au grand jour l'absurdité d'un système qui ne sait plus ce qu'il veut", conclut le syndicat.

Ouaihid Ben Faïza, poids lourd du trafic de stupéfiants, fait partie des 100 détenus les plus dangereux issus de la criminalité organisée. Voilà aussi pourquoi sa permission crée beaucoup de remous. Pourtant, "cette décision a été rendue par des magistrats indépendants. Elle est conforme à la loi, ce n'est pas du tout une surprise", abonde l'avocate du détenu auprès de BFMTV. Effectivement, elle a été accordée par la chambre d'application des peines de la cour d'appel de Douai vendredi dernier dans le cadre du droit à la réinsertion.

"La décision d'accorder une permission de sortir relève de l'autorité judiciaire, qui statue de façon indépendante. En tant que garde des Sceaux, je ne commente jamais une décision individuelle d'un juge, malgré l'opposition du procureur de la République et du chef d'établissement de la prison", a déclaré le ministre de la Justice, Gérald Darmanin. Pour rappel, quand le détenu a fait sa demande, il a reçu un avis défavorable à la fois du chef d'établissement de Vendin-le-Vieil mais également du parquet de Béthune. La cour d'appel de Douai en a décidé autrement.

"Envisager une libération anticipée, contrôlée et maîtrisée"

Si l'avocate du détenu "comprend" que cette permission puisse "choquer", elle tenait ce lundi matin à préciser les raisons pour lesquelles une telle décision apparaît comme logique et intéressante, à son sens, sur France Info. "En France, on a la possibilité d'anticiper une sortie" et cette permission "est formidable pour tout le monde" puisqu'elle permet "d'envisager une libération anticipée, contrôlée et maîtrisée par l'autorité judiciaire plutôt qu'une sortie sèche", a défendu Me Violleau.

Son client - qui espère obtenir un aménagement de peine - "a été condamné il y a une quinzaine d'années, ne fait absolument plus parler de lui depuis des années, a un comportement exemplaire, et a absolument toutes les cases de l'admissibilité à un aménagement de peine", estime-t-elle. De son côté, le garde des Sceaux a annoncé souhaiter "moderniser et consolider les règles encadrant l'exécution des peines pour les criminels les plus dangereux", en réponse à la permission accordée à Ouaihid Ben Faïza. "J'ai l'impression que dès lors qu'il est contrarié par une décision de justice, il décide de faire une nouvelle loi", lui a répondu l'avocate.