Dans les coulisses de La Reine des Neiges 2 avec Marc Smith [INTERVIEW]
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A l'occasion de la diffusion sur Disney+ de "Dans un autre monde : les coulisses de la Reine des Neiges 2", nous avons posé des questions à Marc Smith, directeur de l'histoire sur le film d'animation. Il nous explique comment a été créé cette suite très attendue.
En diffusion sur Disney++, la série documentaire en six épisodes "Dans un autre monde : Les coulisses de la Reine des Neiges 2" a pour but de partager avec nous le processus créatif qui a permis au studio d'animation Disney de donner vie à La Reine des Neiges 2. On y suit notamment les réalisateurs, les auteurs-compositeurs des chansons mais aussi les artistes et acteurs du film dans ce making-of en six morceaux qui permet de se rendre compte de la façon dont un blockbuster d'animation est mis sur pied. On y suit notamment l'enregistrement des chansons par les acteurs, les discussions à bâton rompu au sujet des scènes clés du film ou encore les diverses présentations organisées en interne pour savoir si le film est sur les bons rails ou s'il faut le modifier.
Parmi les acteurs majeurs de la création de La Reine des Neiges 2, Marc Smith est Directeur de l'histoire, c'est à dire qu'il dirige l'équipe en charge du storyboard du film, en d'autres termes la trame visuelle du film à partir de laquelle les animateurs peuvent travailler afin de donner vie à la vision des réalisateurs. Marc Smith travaille au studio d'animation Disney depuis plus de 25 ans. Il a dernièrement travaillé sur Zootopie, Raiponce et La Reine des Neiges 1 et 2. Au cours d'un entretien téléphonique, Marc Smith a répondu à nos questions au sujet de la création de La Reine des Neiges 2, qui n'a pas été de tout repos comme vous pourrez le lire dans cette interview mais aussi le voir dans la série documentaire sur Disney+.
Vous avez travaillé sur le storyboard de La Reine des Neiges 1. Pour la Reine des Neiges 2, vous avez été promu Directeur de l'Histoire. Qu'est-ce que ça a changé pour vous ?
En tant qu'artiste de storyboard pour La Reine des Neiges 1, je ne dirigeais pas l'équipe et je suis arrivé sur le projet plus tard que pour La Reine des Neiges 2. Pour le deuxième film, j'ai eu la chance de débuter le projet très tôt et de participer au voyage de recherches. C'est quelque chose que l'on fait beaucoup pour nos films. Pour celui-là, nous sommes allés en Islande, en Finlande et en Norvège. Ce voyage a eu un rôle très important dans la création du film. Je n'avais pas eu la chance d'en faire partie pour le premier.
En quoi consiste votre travail de Directeur de l'Histoire sur La Reine des Neiges 2 ?
Au début du processus de création, c'est beaucoup de discussions avec les réalisateurs au sujet des personnages et de l'intrigue. J'essaie d'en savoir plus sur leur vision et comment la porter à l'écran. Une fois que l'écriture du film commence, mon équipe et moi commençons à dessiner des storyboards du film. On dessine à la main les personnages et les scènes. On essaie de créer tout le film en storyboard. En général, on y ajoute des voix temporaires doublées par les réalisateurs ou les membres de l'équipe. Une fois qu'on a tout composé, on regarde à quoi ressemblerait cette version du film. On propose entre six et douze versions du film, parfois très différentes de ce à quoi ressemble le film au final.
La Reine des Neiges étant un film musical, il faut aussi trouver le moyen de les intégrer à l'intrigue. Cela doit être un sacré défi !
Kristen Anderon-Lopez et Robert Lopez [auteurs-compositeurs des chansons de La Reine des Neiges 1 et 2, ndlr] ont grandement contribué au film. Nous organisions des réunions avec eux tous les matins, eux à New York et nous à Los Angeles. Ils nous présentaient ce sur quoi ils expérimentaient et nous leur montrions ce à quoi allait ressembler le film. Dans ce genre de films, il faut vraiment combiner ses forces pour trouver les bonnes chansons au bon moment. Il y a eu beaucoup d'échanges entre les auteurs-compositeurs et les réalisateurs. Travailler sur un film musical est un défi unique. D'un autre côté, les chansons permettent aussi de présenter l'histoire à notre place. Une grande partie de notre boulot est donc de faire en sorte que la logique du film permette à ces chansons de briller à ces endroits précis.
Comme on peut le voir dans le documentaire, "Je te cherche" a été une séquence particulièrement difficile à créer. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi ?
"Je te cherche" est une séquence difficile parce c'est l'aboutissement de l'arc narratif d'Elsa non seulement pour La Reine des Neiges 2 mais aussi La Reine des Neiges 1. Dès le premier film, on se demandait d'où venaient les pouvoirs d'Elsa. Cette séquence dans le 2 représente donc le point culminant de son histoire sur les deux films. Ça nous a demandé beaucoup de travail, beaucoup d'échanges, de conversations et de storyboard puis de re-storyboard afin qu'on puisse considérer qu'elle s'inscrivait dans la logique du film.
Le documentaire montre bien à quel point le travail d'animation doit être répété et re-répété. Combien de versions de La Reine des Neiges 2 y a-t-il eu avant la version finale ?
Je peux me tromper mais je crois qu'on a peut-être eu huit versions avant les pré-projections au public. Donc huit versions du film, certaines étant très différentes de la version finale, d'autres plus proches. Plus on avance dans le projet, moins les choses changent. Mais oui, probablement entre huit et dix versions.
Ça signifie aussi que, parfois, des scènes entières voire même des chansons doivent être retirées du film. Ça doit vous fendre le cœur…
Au début oui parce que la plupart du temps ce sont de très très bonnes chansons ou de très bonnes scènes. Tout le monde les adore et on voit bien quelle place elles pourraient avoir dans l'histoire à ce stade. Mais quand l'histoire évolue, certaines chansons ou scènes deviennent superflues. Certaines séquences d'émotion apparaissent ailleurs ou bien on modifie quelque chose. Je pense que tout le monde comprend quand on doit retirer une chanson ou une scène. Mais au début, effectivement, c'est difficile.
Tout au long de la création du film, vous organisez des projections pour obtenir des retours. Souvent, ces retours décortiquent votre travail de façon très directe. Est-il difficile d'y faire face ?
C'est vrai et cela peut être dur au début. Mais on peut les accepter dès lors qu'on garde en tête que tout le monde travaille vers un même but. C'est d'ailleurs assez unique à notre studio. Peu importe qui l'on est : qu'on travaille sur l'histoire, la réalisation, la sécurité, la technologie… Tout le monde travaille dans ce même but. Je pense que ça rend la chose plus facile de savoir qu'on a tous de bonnes intentions.
L'équipe a-t-elle ressenti une certaine pression à l'idée de travailler sur cette suite d'un film à succès ?
Pour moi, cette pression vient du fait que ces personnages sont très importants pour beaucoup de gens. On ne veut pas trahir ça. On ne veut pas changer ces personnages mais aller plus loin avec eux. C'était mon désir et celui des réalisateurs.
Qu'avez-vous pensé des retours du public sur le film ?
C'est un honneur qu'autant de gens soient revenus voir ces personnages et ce monde. J'ai l'impression que les gens sont toujours autant attachés à ces personnages. C'est un honneur pour moi de faire partie de cette aventure.
Parfois, on compare les studios d'animation Disney et Pixar. Pensez-vous que cette comparaison est valide ?
On fait la même chose donc je suppose qu'on peut nous comparer de ce point de vue. Nous travaillons dur pour faire des films d'animation qui intéressent le plus grand nombre et qui sont importants pour nous. Nous travaillons avec Pixar d'ailleurs. Beaucoup de mes amis travaillent chez Pixar. L'animation est un petit monde. Il ne me semble pas qu'il y ait une rivalité entre nous. On est un peu comme des frères et sœurs !
Il y a aussi une émulation qui pousse les deux studios à repousser leurs limites ?
Je suis sûr qu'il y a une compétition saine entre les deux studios. Ou simplement des inspirations parce qu'on regarde ce que fait Pixar et on adore leurs films. Parfois, nous leur montrons nos films et ils ont l'air de les aimer. Parfois ils nous demandent comment on a réussi à faire certaines choses. Cette relation me paraît saine. Je suis très heureux qu'on ait la chance d'échanger entre nous.
L'année dernière, Jennifer Lee a annoncé que vous ainsi que d'autres cinéastes réaliserez bientôt votre premier film pour Disney. Que pouvez-vous nous dire sur ce projet ?
Tout ce que je peux vous dire c'est que j'en suis au début de la phase de développement. Je suis très heureux et enthousiaste à l'idée de faire partie de ce groupe de cinéastes.