De "Un gars, une fille" à "Bref", quels sont les secrets des shortcoms ?

De "Un gars, une fille" à "Bref", quels sont les secrets des shortcoms ? Apparue pour la première fois en 1999 avec Chouchou et Loulou, la "shortcom" fait le buzz en France et devient un incontournable à placer entre deux programmes télé.

En septembre 2011, On n'est pas couché a remercié les deux Eric, Thalassa se modernise et N'oubliez pas les paroles se concentrera davantage sur le racket téléphonique du téléspectateur. Même  Le Grand Journal  de Canal++ ne déroge pas à la règle et s'offre un lifting spectaculaire avec notamment la nouvelle "shortcom" qui déchaîne les passions à partir de 20h30 : Bref.

Bref, comme son nom l'indique, la série ne dure jamais plus d'une minute et 40 secondes. On tombe sur la bande-annonce cet été et on se dit que ça a l'air drôle. Jour J : on allume son poste de télévision, on tombe sur le générique de fin. Gros mot. Tant pis, on met une alarme pour l'émission du lendemain. Jour J+1 : devant la télé au moins une demi-heure avant le début de la "shortcom". Ça commence. On esquisse un sourire. C'est amusant, c'est frais, c'est réaliste. C'est fini. Gros mot. Une minute et quelques secondes, c'est vraiment trop court. Gros mot. Bref, Canal+ a trouvé un moyen brillant de relancer le Grand Journal et de faire rire ses téléspectateurs blasés.

Diffusée pour la première fois le 29 août dernier, la série compte déjà plus de 53 000 fans sur sa page Facebook et ne cesse de faire parler d'elle. Le secret ? Un scénario concis, rapide et sans blabla intempestif qui interpelle dès le début. Impossible de résister à la voix monotone du grassouillet légèrement dégarni qui fait part de ses petites expériences quotidiennes et universelles.

Un gars, une fille aux origines de la shortcom

Le phénomène shortcom n'est pas récent et il faut remonter à la fin des années 1990 avec l'apparition de Chouchou et Loulou entre deux programmes télé pour trouver l'origine d'un tel engouement.

En 1999, France 2 propose une série de sketchs durant 6 minutes juste avant le 20 heure : Un gars, une fille. Le pitch est simple : un couple, Alex/Chouchou et Jean/Loulou, fait face aux aléas de la vie conjugale dans des situations banales.

Rien d'exceptionnel jusque là, si ce n'est le réalisme avec lequel est mis en scène le quotidien des tourtereaux. L'ensemble des clichés auxquels répondent les protagonistes s'adresse à tous les couples d'amoureux et il n'en faut guère plus pour séduire un public qui s'identifie joyeusement à Alex et Jean.

La recette du succès

On l'aura compris, pour faire une shortcom qui marche, il faut faire court, cliché et réaliste à la fois. Plus le spectateur est amené à s'imaginer dans la même situation que les protagonistes, plus la série a de chances de plaire.

On pense à Caméra Café, compilation de séquences pauses café en entreprise, Mademoiselle, portraits représentatifs de la femme moderne, Scènes de ménages, tranches de vie de couples toutes générations confondues.

Il existe aussi des mini-séries qui ne traitent pas du tout de scènes de vie quotidiennes comme Kaamelott et Avez-vous déjà vu ? Pourtant elles font partie de ces shortcoms qui ont fait un tabac sur le petit écran. Cette fois-ci, c'est le côté parodique et absurde qui a été exploité. 

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Alexandre Astier dans Kaamelott © M6

Kaamelott reprend un vieux mythe très connu pour en faire un grand détournement. Quant à Avez-vous déjà vu ? les séquences mènent le téléspectateur à penser que lui aussi pourrait très bien imaginer des scénarios très farfelus, comme une évasion de raviolis, un œuf serial killer ou une chorale de poussins.

Mais ce qui fait également le succès de ces mini-séries, ce sont leurs plages horaires dans la grille des programmations télévisuelles. La plupart du temps, une shortcom permet de faire la liaison entre deux émissions d'une même chaîne. On peut ainsi attendre le prochain programme sans avoir à craindre d'être assailli par dix interminables minutes de publicités bruyantes et redondantes. C'est aussi un moyen pour les chaînes de ne pas perdre leur audience à cause d'une page de pub mal à propos qui engage les téléspectateurs à zapper.

Par ailleurs, les shortcoms sont souvent diffusées juste avant ou juste après le journal de 20 heures, position très stratégique sur la grille puisque les infos du soir sont associées à une heure de grande écoute.

Des shortcoms pour petits et grands

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La Chouette © Studio Hari / France 3

L'avantage de la shortcom, c'est qu'elle s'adresse aussi bien aux jeunes qu'aux moins jeunes, et conquiert donc un public très large. Les thèmes sont relativement universels, et un ado de 13 ans pourra s'intéresser vivement à Scènes de ménages parce qu'il est à même détecter des situations quotidiennes qu'il vit à la maison avec ses parents.

Réciproquement, les mini-séries pour enfants s'adressent souvent implicitement aux plus grands. On pense à La Chouette, shortcom centré autour de la vie difficile menée par une chouette rose qui fait tout son possible pour rester en un seul morceau. Le côté burlesque de l'émiettement de l'animal égaie les enfants sans les effrayer et fait rire les parents qui perçoivent l'aspect cynique et grinçant du "faux" dessin animé.

Idem pour Minuscule qui met en scène des insectes et petits animaux découragés par la vie mais dont l'existence semble prendre un tournant radical et positif. Jusqu'à la chute qui fait comprendre au téléspectateur que la nouvelle vie de ces insectes ne repose que sur une illusion.

 

La shortcom relance la télé

L'introduction dans la grille des programmes audiovisuels de la shortcom apparait donc comme une solution miracle pour relever le niveau du petit écran. Courtes, amusantes, interpellantes, ces mini-séries permettent de réunir une forte part d'audience malgré quelques ratés – on se souvient du flop Sodas cet été sur M6. 

La ménagère, le ménager, les enfants de ménagers prennent volontiers quelques minutes de leur temps pour les shortcoms parce qu'ils savent pertinemment qu'ils vont rire de bon cœur avant de pouvoir retourner à leurs activités prioritaires.

Bref, ça dure 2 minutes, et ça rend accro.

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