Affaire du maillot de bain à Reims : ce qu’il s’est vraiment passé
Une jeune femme rouée de coups à Reims car elle bronzait dans un parc en maillot. Il n’en fallait pas plus pour agiter le motif religieux, alors qu’en réalité, l’altercation n’a pas été provoquée pour cette raison.
Indignation des politiques, rassemblement de soutien, hashtag dédié… Cette affaire de maillot de bain a suscité une vague de colère en France. Bien avant que l’on sache ce qu’il s’est réellement passé. Une jeune femme de 21 ans a été rouée de coups mercredi dernier car elle bronzait en maillot de bain dans le parc Léo-Lagrange de Reims. Conduite à l'hôpital, elle en ressort avec quatre jours d’incapacité totale de travail.
Dans une première version de son article, le quotidien l’Union affirmait que cinq jeunes filles "originaires de différents quartiers de la ville" s’en étaient pris à la victime. La tenue légère de la Rémoise aurait été "contraire à la morale et la conception des bonnes mœurs" du groupe. Une altercation aurait alors éclaté car la jeune femme se serait rebiffé face à "un tel discours aux relents de police religieuse", écrit le journal.
En réalité, le motif religieux ou moral a totalement été écarté. "C’est une altercation entre jeunes filles qui dégénère après qu’une des auteurs de l’agression a dit 'Allez vous rhabiller, ce n’est pas l’été'", a expliqué Julie Galisson, la commissaire de permanence. "Une des femmes ainsi interpellée ne s’est pas laissée faire et cela a dégénéré en violences".
Selon l’une des filles du groupe interrogée par Buzzfeed, ce serait la personne en maillot de bain qui aurait eu des mots violents la première. "J’ai juste dit à ma copine que si c’était moi, je n’oserais pas me mettre dans cette tenue. Mais j’ai dit ça car je suis complexée, absolument pas pour des questions religieuses ou morales. Je suis musulmane, oui, mais tolérante", affirme-t-elle. Et d’ajouter : "Lorsque l’une des trois filles m’a entendue parler, elle m’a interpellée pour me dire qu’'avec mon physique, elle comprenait que je n’ose pas me mettre en maillot'. Elle a également dit que j’étais grosse. Je suis allée vers elle pour lui donner une gifle, puis elle s’est battue avec mon amie". D’après elle, son amie a également reçu un arrêt de travail de 10 jours.
"Un mode de vie qui n'est pas le nôtre", "régression de la liberté", "Charia"...
Entre la version du journal L’Union et le démenti de la justice, politiques de droite et associations ont eu le temps de s’insurger. Florian Philippot n’a pas hésité à établir un lien avec la privatisation de la plage de Vallauris par un prince saoudien, Eric Ciotti regrette que l’on veuille "nous imposer un mode de vie qui n’est pas le nôtre", Nadine Morano parle de "régression de la liberté de la femme", le sénateur Stéphane Ravier emploi le mot "charia". SOS Racisme s’est aussi emparé de l’affaire. Sur Twitter, le compte de l’association a relayé dimanche des photos d’internautes ou de stars en maillot de bain sous le hashtag #jeportemaimaillotauParcLéo. Un rassemblement pour dire "oui à la liberté", très peu suivi, a même été organisé.
Les agresseuses de la femme en maillot de bain n'ont qu'à se baigner sur la plage saoudienne de Vallauris. Là-bas l'Etat les chouchoutera...
— Florian Philippot (@f_philippot) 26 Juillet 2015
Agression inacceptable par laquelle on veut nous imposer un mode de vie qui n'est pas le notre. Intransigeance ! https://t.co/OG57jhBesD
— Eric Ciotti (@ECiotti) 25 Juillet 2015
La liberté de la femme, la régression de la liberté de la femme... Un scandale en 2015 http://t.co/v2dlZOG9Cs pic.twitter.com/Vvt6Ok1nsC
— Nadine Morano (@nadine__morano) 25 Juillet 2015
À #Reims, une femme rouée de coups pour "port de maillot de bain" : la charia en bas d'chez soi, c'est maintenant ! http://t.co/249udUPEjc
— Stéphane Ravier (@Stephane_Ravier) 25 Juillet 2015
Ni putes ni soumises ! A Reims comme ailleurs nous refusons une morale de l'oppression qui réduit nos libertés https://t.co/BOaHVHqhbx
— SOS Racisme (@SOS_Racisme) 25 Juillet 2015
Après avoir condamné cette agression, le maire de Reims Arnaud Robinet a affirmé dans un communiqué qu’il était "intolérable de stigmatiser une communauté ou une autre pour un acte commis par quelques-uns et sans connaître le fond de l’affaire". Les cinq jeunes filles, dont deux mineures, ont été déférées au parquet de Reims. Les trois majeures vont être renvoyées devant le tribunal correctionnel en septembre pour violence en réunion. L’auteur principale, âgée de 17 ans, a été présentée à un juge pour enfants qui l’a placée sous le statut de témoin assisté. Le parquet a fait appel de cette décision.