François Bayrou : convoqué par une juge, que risque le président du MoDem ?

François Bayrou : convoqué par une juge, que risque le président du MoDem ? BAYROU - Plusieurs représentants du MoDem ont été mis en examen depuis quelques semaines. C'est au tour de François Bayrou, le président du parti, de faire face à la juge ce 6 décembre.

[Mis à jour le 6 décembre 2019 à 12h34] Ce vendredi 6 décembre, François Bayrou s'est présenté face à Charlotte Bilger, la juge d'instruction du pôle financier, dans le cadre de l'enquête ouverte suite aux soupçons d'emplois fictifs imputés au MoDem. Le président du parti centriste est arrivé au tribunal de Paris peu avant 9h30, accompagné par son avocat. Il risque la mise en examen et ce ne serait d'ailleurs pas le premier responsable de sa formation politique à voir planer cette menace.

"Tout le monde est mis en examen dans la vie politique française ou presque. Vous voulez qu'on fasse la liste des gens mis en examen ?", avait-il déclaré face à Jean-Jacques Bourdin le 28 novembre dernier, sur BFMTV. Puisque le maire de Pau le demande ou presque, dressons la liste des représentants de son parti inquiétées par la justice. Le 15 novembre, Alexandre Nardella, directeur financier du MoDem, a été mis en examen pour "complicité de détournement de fonds publics" et "recel de détournement de fonds publics".

Puis se sont enchaînées les mises en examen de Michel Mercier, ancien ministre et sénateur MoDem, le 22 novembre, puis de Sylvie Goulard le 29 novembre, et Marielle de Sarnez le 4 décembre. En tout cas, François Bayrou semble concentré sur sa principale mission, à savoir diriger la mairie de Pau. "Vous ne voulez quand même pas que pour une accusation fausse, j'abandonne mes concitoyens ! Je suis maire de Pau jusqu'à fin mars prochain", a-t-il tranché, toujours sur BFMTV la semaine dernière.

L'affaire des assistants parlementaires : résumé

L'affaire des assistants parlementaires a éclaté en 2017. Le parquet de Paris avait ouvert une enquête préliminaire visant une vingtaine d'eurodéputés de tous bords, notamment Marine Le Pen (RN), Brice Hortefeux (LR), Yannick Jadot (EELV), puis plus tard Jean-Luc Mélenchon (LFI), ainsi que plusieurs eurodéputés du MoDem. François Bayrou, qui venait d'être nommé ministre de la Justice à l'époque, avait alors été contraint de démissionner, tout comme Marielle de Sarnez qui avait démissionné de son poste de ministre des Affaires Européennes, ou encore Sylvie Goulard, aux Armées.

En juillet 2017, une enquête concernant spécifiquement le MoDem avait été ouverte pour des soupçons d'"abus de confiance, recel d'abus de confiance et escroqueries", basée sur des témoignages. Cette enquête visait à déterminer si des assistants parlementaires des eurodéputés membres du MoDem avaient été payés pour effectuer des tâches pour le parti centriste, sans lien avec des dossiers européens. En juin 2018,  les policiers concluaient ainsi leur rapport : "Des éléments laissent penser que le MoDem aurait pu institutionnaliser, dans son mode de fonctionnement, l'utilisation des ressources du Parlement européen à son profit". Des faits qui concerneraient au moins neuf collaborateurs d'eurodéputés centristes. François Bayrou aurait expliqué que ceux-ci travaillaient "à temps partiel" pour le MoDem, "payés pour une fraction de temps par le Parlement européen et l'autre fraction du temps par (le) mouvement". "Qu'est ce qu'il y a de répréhensible à ça ?", concluait-il.

C'est cette même affaire qui avait empêché Sylvie Goulard, actuelle vice-présidente de la Banque de France, d'accéder au poste de commissaire européenne il y a quelques semaines. Le Parlement européen avait pourtant clos cette affaire en ce qui la concernait, en août 2019, après qu'elle avait remboursé 45 000 euros à l'institution. Cette somme représentait l'équivalent de huit mois de salaire de son assistant Stéphane Thérou, pour lequel elle n'avait été en mesure de fournir des "preuves de travail".

En septembre dernier, Bernard Tapie, ancien adversaire politique de François Baryou, s'était confié au sujet de cette affaire et plus largement, au sujet de la mise en examen des personnalités politique. L'ancien président de l'OM, et ministre, avait déclaré qu'il fallait "que toute la classe politique en termine avec cette jurisprudence ridicule, idiote et non juridique", consistant à démissionner de fonctions politiques dès lors qu'une mise en examen est prononcée.

A l'adresse de François Bayrou, actuellement maire de Pau et dont on ignore s'il souhaite se représenter aux municipales de 2020, Bernard Tapie avait déclaré au quotidien : "Surtout, qu'il ne démissionne pas de ses fonctions politiques, qu'il ne fasse pas cette bêtise. (...) Je ne connais pas le dossier, mais je me sens concerné car je suis à l'origine de cette jurisprudence qui fait qu'un ministre démissionne dès lors qu'il est mis en examen. À l'époque, je l'avais fait à la demande de Pierre Bérégovoy. François Mitterrand était contre. Il m'avait dit : 'Démissionner, c'est reconnaître vos fautes'. Cinq mois plus tard, j'ai eu un non-lieu et je suis revenu au gouvernement". Selon Bernard Tapie, cette jurisprudence "donne à une minorité de magistrat le pouvoir incroyable de faire et défaire les carrières politiques" et "complique considérablement la tâche de la majorité des magistrats qui veulent exercer leur mission sereinement."