Jean-Claude Mézières La science-fiction

mézières lors d'une conférence sur la sf au salon du livre 2012.
Mézières lors d'une conférence sur la SF au Salon du Livre 2012. © Mathilde Chevallier / L'Internaute Magazine

Mézières a été un grand inspirateur dans l'univers de la SF ; d'ailleurs, c'est à lui qu'on doit les décors du Cinquième Elément de Luc Besson, notamment les fameux taxis volants que conduit le héros. Enki Bilal lui a même rendu un petit hommage avec ses "Mezi-cabs" dans "Le Sommeil du monstre".

L'Internaute Magazine : Vous avez inspiré pas mal de monde... Et vous, qui vous a inspiré dans le domaine de la science-fiction ?

Jean-Claude Mézières : La littérature de SF qui nous plaisait à Christin et moi, ça c'est nos lectures des années 1950, on se passait des bouquins. Et ça a été la proposition de Christin au début, lorsque je lui ai dit "je veux travailler avec un scénariste". Il ne l'était pas encore ! D'ailleurs, je vous invite à lire l'article de BDzoom à ce sujet, ça vous amusera. Lui était écrivain, universitaire, professeur de journalisme, et nous avons fait ensemble deux histoires de 8 pages pour envoyer à Pilote. Quand je suis rentré en France, je suis allé voir Goscinny qui m'a dit "il faut continuer, il y a de la place". Forcément, il avait un magazine de 64 pages à remplir par semaine !

J'ai fait des trucs avec d'autres dessinateurs et scénaristes, mais ça ne me convenait pas parce que ce n'était pas moi. Donc j'ai dit à Pierre : "on va faire quelque chose ensemble". Notre seule base était la littérature de science-fiction ! Evidemment, pour la première case, quand il m'a dit : "Galaxity, capitale du futur, grande image, demi-page" (il écarquille les yeux) euh... Au secours ! Alors je lui ai répondu "Attends, on pourrait peut-être aller faire un petit tour au Moyen-Âge, style Peyo, parce que ça m'aidera au début". Et puis on s'est lancé et on n'a pas si mal réussi que ça.

galaxity, capitale du futur (les mauvais rêves, premier tome)
Galaxity, capitale du futur (Les Mauvais Rêves, premier tome) © JC Mézières/ Dargaud

L'Internaute Magazine : Si vous aviez, comme Valérian, une machine à voyager dans le temps, où et quand aimeriez-vous vous rendre ?

Jean-Claude Mézières : Je ne suis pas un doux rêveur. C'est sûr que j'ai une certaine attirance, avec toutes ses contradictions, pour le XIXème siècle, fin du XIXème siècle. Non, je suis très content de vivre au XXème et au XXIème siècles, j'estime que j'ai eu une énorme chance, par exemple d'aller en Amérique dans les années 1960, avant que ce ne soit trop touristique, et d'aller trainer mes bottes dans des endroits formidables, et je continue. Je suis plutôt content de l'époque, qui est bizarre, mal foutue, mais elle est vivante, si c'est pour aller voir un musée sous globe, c'est pas intéressant.

Extrait de la rencontre sur la science-fiction dans la BD et le Manga (Salon du Livre, 16 mars 2012)

Jean-Claude Mezières : Ce qui m'a toujours intéressé dans la SF, c'est le défi de dessiner d'autres civilisations, d'autres mondes, d'autres personnages, avec la base d'un scénario très solide, très sérieux. La science-fiction américaine, avant, c'était les courageux explorateurs qui partaient de la Terre pour affronter les périls du cosmos, et qui devaient tuer le plus d'aliens possible, parce que c'était l'ennemi. Alors que pour nous, les civilisations extra-terrestres, c'est l'Autre, et c'est peut-être l'Autre qui est justement attaqué par ceux qui veulent établir une nouvelle civilisation. [...] Il faut aussi que ça soit lisible immédiatement pour le lecteur ! Lorsque je représente une forêt avec des animaux bizarroïdes sur une autre planète, il y a une seule chose que je demande à la coloriste qui est ma sœur Evelyne Tran-Lê, c'est que la forêt ne soit pas verte. Si c'est vert, c'est la Terre. Par contre, dès qu'elle est bleue, rouge ou jaune à petits pois, ça devient une forêt extra-terrestre.

  Lire le compte-rendu de la conférence