Iran : vers une révolution ? Manifestations et répressions s'intensifient

Iran : vers une révolution ? Manifestations et répressions s'intensifient IRAN. En dix jours les manifestations en Iran ont gagné de l'ampleur. Les citoyens continuent de protester contre le régime islamique au pouvoir malgré les violentes répressions policières qui ont déjà fait des dizaines de morts selon le bilan du 27 septembre.

[Mis à jour le 27 septembre 2022 à 15h16] En Iran, les manifestations se transforment en soulèvement et pour certains en révolution. Voilà dix jours que le pays est secoué par des mobilisations de milliers de personnes en colère contre les règles strictes de la République islamique et lundi 26 septembre ce sont 30 des 31 provinces du pays qui ont vu naître des rassemblements de manifestants. Au lendemain de cette mobilisation massive, l'ONG Iran Human Rights (IHR), basée à Oslo, a annoncé la réalité de ces contestations : "au moins 76 personnes ont été tuées" dont "six femmes et quatre enfants" durant les affrontements entre citoyens manifestants et membres des forces de l'ordre. L'organisation dit aussi être en possession de "vidéos et des certificats de décès confirmant des tirs à balles réelles sur des manifestants". Les autorités iraniennes, parties du régime théocratique critiqué, avancent un bilan revu à la baisse avec 41 personnes mortes dans les manifestations dont des civils et des policiers  tandis qu'au moins 1200 personnes présentes lors des rassemblements ont été arrêtées selon le site d'information proche de l'Etat iranien, Tasnim. Le nombre de personnes interpellées parmi lesquelles des journalistes, des militants ou des avocats pourrait être plus conséquent.

Les manifestations en Iran ont pris pour point de départ la mort suspecte d'une jeune iranienne, Mahsa Amini, trois jours après son interpellation par la police des mœurs parce que des cheveux dépassaient de son hijab. C'est alors la République islamique qui était attaquée par les slogans des manifestants mais depuis les Iraniens et Iraniennes se battent pour leur liberté face à un régime oppressant. "L'Iran connaît un phénomène continu, large et généralisé, où les contestataires n'hésitent pas à répondre à la violence des forces militaires par la violence. Nous assistons désormais à un soulèvement", constate un sociologue vivant à Téhéran et souhaitant rester anonyme dans les colonnes du Monde. Toutes les tranches de la population prennent part à ces mobilisations : des femmes, des hommes, des jeunes d'abord suivis par les générations précédentes. "Les jeunes sont bluffants, filles et garçons, ils sont d'une telle audace et d'une telle énergie qu'ils entraînent avec eux les plus vieux. Cette fois-ci, j'ai de l'espoir", raconte une manifestante de Téhéran au journal du soir. Au fil des jours le mouvement populaire gagne en ampleur malgré les violentes répressions policières qui ont déjà fait plusieurs victimes.

Lourd bilan dans les manifestations en Iran

Des dizaines de morts et plus d'un millier de personnes arrêtées, voici le bilan des manifestations en Iran en seulement dix jours. La mobilisation prend des airs de soulèvement à mesure que les foules de citoyens s'engouffrent chaque soir dans les rues pour protester contre le régime théocratique de la République islamique et malgré les répressions sévères et brutales des forces de l'ordre. Dans les affrontement au moins 76 personnes ont perdu la vie selon le bilan de l'ONG Iran Human Rights ce 27 septembre. Les autorités iraniennes affichent un autre bilan légèrement minimisé avec 41 personnes décédées, manifestants et policiers confondus. Dans les deux estimations le bilan humain est déjà dramatique et il suscite d'autant plus de colère qu'il serait la conséquence des violentes répressions policières censées mettre fin aux émeutes. L'ONG Amnesty International a d'ailleurs pointé du doigt la "répression brutale" mais surtout "le recours [par la police] illégal aux tirs de grenailles, billes d'acier, gaz lacrymogène, canons à eau et coups de bâton pour disperser les manifestants".

Parmi les victimes des manifestations en Iran, certaines sont élevées en symbole car morte pour avoir voulu défendre leurs idées et leur liberté. C'est notamment le cas de la jeune femme de 20 ans décédée le 25 septembre après avoir reçu six balles dans la tête, le cou et la poitrine, Hadis Najafi. De nombreux autres jeunes gens sont morts lors des mobilisations qui elles-mêmes ont été déclenchées par le décès de Mahsa Amini. La jeune Kurde de 22 ans est morte le 16 septembre en garde à vue trois jours après avoir été arrêtée par la police des mœurs. Selon l'agence de presse Fars, certains Iraniens pensent qu'elle est "morte sous la torture".

Les images des manifestations en Iran

Toutes les grandes villes d'Iran sont prises d'assaut par les manifestants qui se rassemblent par centaines et parfois par milliers. Ce sont des femmes, de tous les âges qui défendent leurs droits, mais aussi des hommes qui défilent dans les rues. Les manifestants s'attaquent aux symboles de la République islamique, notamment au hijab dont le port est imposé aux femmes. Elles sont nombreuses dans les rues à l'enlever ou le brûler au milieu de la foule ou à couper leurs cheveux. Face aux manifestants les réponses des forces de l'ordre sont de réprimer les citoyens.

Pourquoi y a-t-il des manifestations en Iran ?

En Iran, la colère des citoyens gronde depuis le 16 septembre 2022. C'est aussi à cette date que les manifestations ont commencé après un élément déclencheur : la mort de Mahsa Amini. Cette affaire a fait grand bruit. La jeune kurde de 22 ans a été arrêtée le 13 septembre par la police des mœurs pour "port inapproprié de vêtements" alors qu'elle était en visite à Téhéran avec sa famille. Si la formule utilisée peut poser question, le seul tort de la jeune femme était d'avoir des mèches de cheveux qui dépassaient de son voile dans une République islamique aux règles très strictes. Mahsa Amini est décédée trois jours plus tard alors qu'elle était en garde à vue. Aussi, la mort de la jeune kurde est jugée suspecte par une large partie de la population et selon l'agence de presse Fars "de nombreux manifestants sont convaincus que Mahsa est morte sous la torture". Les autorités comme le gouvernement iranien nient être responsables de la mort de la jeune femme.

Face à la mobilisation et la tension grandissante dans les rues d'Iran, le président iranien Ebrahim Raïssi a assuré le 22 septembre en marge de l'Assemblée générale de l'ONU à New York qu'"une enquête sera ouverte" pour faire la lumière sur la mort de Mahsa Amini. Il a toutefois précisé dans la foulée que  le rapport du médecin légiste n'a pas fait cas d'abus des policiers.

Des manifestations à l'international en soutien à l'Iran

Les manifestations en Iran ont trouvé un écho international. Partout dans le monde, les Iraniens et surtout Iraniennes expatriés se rassemblent pour eux aussi protester contre la République islamique d'Iran. Les jeunes femmes à l'image des manifestantes de Téhéran se découvrent les cheveux et brûlent leur voile pour celles qui en portent tandis que les autres vont jusqu'à se couper les cheveux en signe de soutien. Outre ces actes symboliques, de nombreuses manifestations se sont organisées dans différents pays notamment en France le dimanche 25 septembre quand un cortège à manifester pour se rendre jusqu'à l'ambassade d'Iran, là où la foule a été dispersée par des gaz lacrymogènes lancés par les forces de l'ordre.

Plusieurs puissances mondiales ont affiché leur soutien au peuple iranien et dénoncé les violentes répressions policières à l'instar de la France. Le 26 septembre, le ministère des Affaires étrangères à exprimé "sa condamnation la plus ferme de la répression violente, par l'appareil sécuritaire iranien des manifestations". Et d'ajouter que la France examine avec ses partenaires européens "les options disponibles en réaction à ces nouvelles atteintes massives aux droits des femmes et aux droits de l'Homme en Iran".