Nicolas Sarkozy : sur Twitter, un bad-buzz puis un échange déconcertant

Nicolas Sarkozy : sur Twitter, un bad-buzz puis un échange déconcertant Libye, Union européenne, laïcité, travail, emploi, mais aussi PSG, Game of Thrones, tennis et Hanouna... Nicolas Sarkozy s'est lancé dans un échange riche mais aussi très décousu sur Twitter, d'autant qu'il est intervenu après un énorme bad buzz.

[Mis à jour le 15 mai 2015 à 14h09] L'ancien président de la République, patron de l'UMP, est intervenu sur Twitter pour répondre aux internautes. Nicolas Sarkozy a répondu ce matin à une sélection de questions "pertinentes", soigneusement choisies par son équipe. Mais pour se rendre compte de la nature des interrogations postées depuis des heures sur Twitter, il suffit de se rendre sur la page du hashtag #NSDIRECT. L'ancien chef de l'Etat a clairement été dépassé par son entreprise, inédite à une telle échelle pour une personnalité de son importance. Pourtant, Nicolas Sarkozy a assuré qu'il réitérerait l'exercice dans une vidéo annonçant la fin du "chat".

C'est sans conteste le troll le plus important de 2015, voire le plus grand de l'histoire de Twitter concernant un événement politique français qui s'est créé sur la Toile avec l'intervention du patron de l'UMP. Nicolas Sarkozy a dû faire face à un afflux de milliers de questions suite à une initiative originale : le patron de l'UMP avait choisi de répondre aux interrogations des Twittos directement sur le réseau social ce vendredi matin. Nicolas Sarkozy n'a sans doute pas anticipé l'ampleur du bad buzz généré par cet appel aux questions. Car en parcourant minutieusement Twitter, n'importe qui se rendra compte qu'une immense majorité des questions - au moins 90 % au bas mot selon notre comptage - ont été écrites pour se moquer de l'ancien président de la République, soit avec humour, ironie, soit avec un ton bien plus irrévérencieux, voire insultant.

Depuis jeudi, des centaines, voire des milliers de questions ont été posées via le hashtag #NSDIRECT. Les militants pro-Sarkozy avaient  été appelés à se mobiliser pour qu'apparaissent des questions "pertinentes" sur le réseau social. Mais leurs questions ont été clairement noyées dans le flux de celles posées par des internautes profitant de l'événement pour interpeller moins sérieusement l'ancien chef de l'Etat sur toute une série de thématiques : les affaires judiciaires dans lesquelles il est impliqué, son retour en politique, son bilan économique, sa rencontre avec Kadhafi, l'intervention de la France en Libye, etc...

L'initiative de Nicolas Sarkozy - ou celle de son équipe de communication - révèle en tout cas la logique propre au fonctionnement de Twitter, la facilité de prendre la parole de manière entièrement libre, tout comme la facilité de détourner l'esprit de l'exercice initial, usant de mauvaise foi, d'humour, et parfois de manière mal-intentionnée. Pour autant, l'événement permettra aussi à la classe politique de mesurer le décalage entre les questions qui leur sont posées dans les médias et celles posées directement par les internautes. Il suffit de jeter un oeil sur Twitter pour se rendre compte des thématiques qui intéressent le plus les internautes.

Florilège des questions posées sur Twitter #NSDIRECT

Les réponses de Nicolas Sarkozy

Interrogé sur l'Union européenne, et les divergences sur le sujet entre la droite et les centristes, Nicolas Sarkozy répond un peu à côté : "J’ai toute ma vie été européen. C’est trop tard pour changer. Ce sera sans doute l’un des domaines où il faudra les réformes les plus radicales. Avec la même force, je veux vous dire que l’Europe ne peut pas continuer à fonctionner ainsi". "Ce qui serait un grand danger, c’est que la Grande Bretagne quitte l’Europe. Je ne peux pas m’y résoudre".

Nicolas Sarkozy évoque la possible victoire du PSG, un jour, en finale de Ligue des Champions. A un supporter, il envoie ce tweet : "Pourquoi, tu doutes? La question n’est pas : est-ce qu’ils pourront la gagner, mais quand ? The sooner, the better". Et lorsque quelqu'un lui demande d'intervenir pour que Pogba signe au PSG, il répond : "Bien reçu le message sur Pogba, je partage ton avis, il va falloir qu’on se cotise !"

Sur la Russie, "On peut avoir des désaccords avec la Russie ms elle est notre partenaire. Je ne veux pas d'1 nvelle guerre froide. @fhollande aurait dû être en Russie le 9 mai, par respect pour l'Histoire et le sacrifice du peuple russe pendant la guerre".

"Rétablirez vous les heures supplémentaires desfiscalisées si vous êtes ici élu en 2017?" Réponse : "Les heures supp defiscalisées ont certainement été l’1 des mesures éco les + efficaces de mon quinquennat. Réponse, oui."

Nicolas Sarkozy répond sur la Libye et la venue officielle de Kadhafi à l'Elysée. "Kadhafi a été invité en France à la suite de la libération des 7 infirmières bulgares et du médecin palestinien. Ils croupissaient dans les geoles libyennes depuis 8 ans. Fallait-il les laisser tomber?". Et sur la visite de Bachar el Assad : "Assad a été invité en France au lancement de l'Union pour la Méditerranée. La Syrie ne serait-elle pas en Méditerranée ?" "Sur la Libye, j’ai pris la décision d’intervenir avec 50 autres pays". "NON, je ne regrette pas Kadhafi. En revanche, je regrette que depuis 2012 on ait laissé complètement tomber la libye". "L’un des dictateurs les plus sanguinaires qui ait existé voulait faire couler des rivières de sang à Benghazi".

"Comprenez vous que étant de Gauche je sois quand même républicain ?" demande un Twittos. Réponse absconse (et qui suscitera la polémique à n'en pas douter) de Nicolas Sarkozy : "Il ne s'agit pas de vous exclure mais de dire que la République est une priorité - comme le socialisme est pour vous une priorité". Et d'ajouter : "Entre le socialisme et la République vous avez choisi le socialisme. Nous avons choisi la République".

Interrogé sur la Libye par un internaute qui lui demande : "Pensez vous que l'instauration de la "démocratie" en Libye est une réussite ?", Nicolas Sarkozy répond : "Ne soyez pas injuste, les premières élections en Libye, ce sont les démocrates qui les ont gagnées". "La communauté internationale les a laissés seuls, le chaos est advenu".

Entre une réponse sur la politique économique et les chrétiens d'Orient, Nicolas Sarkozy s'interroge sur sa venue sur le plateau de Touche pas à mon poste : "Pour dire vrai, je trouve très sympa @Cyrilhanouna mais j’hésite à franchir le pas. A ton avis, j’y vais où j’y vais pas?" répond-t-il à un internaute. Autre échange étonnant, sur les goûts du président de l'UMP concernant les séries Télé : "Je finis la saison 3 de @SHO_Homeland: incroyable." "Et avant, j'avais vu @HouseofCards saison 3. Les acteurs sont des génies". "J'avoue un léger retard sur la dernière saison de Game of Thrones".

Surréaliste : Nicolas Sarkozy répond à son fils en direct ! "Je peux avoir une plus grande télévision pour ma chambre?" demande Louis Sarkozy. Réponse de son père : "Je suis prêt à échanger une plus grande TV contre la suppression de ton addiction à ton ordi". Le deal est donc: plus grande TV "tu ne la regardes jamais" contre plus petit ordinateur "dont tu ne te sépares jamais"".

Le patron de l'UMP revient à des échanges plus sérieux. En vrac (comme l'exercice le commande) : "De ce que je vois de l'action de @MarisolTouraine , je n'ai envie de soutenir aucune de ses initiatives". "En aidant les Africains, nous nous aidons nous mêmes. Donc oui je soutiens @jlborloo". "On ne peut plus continuer à parler d'immigration en s'alignant sur la pensée unique". "J'aime Calais. Je ne connais pas bcp d'endroits de France où la générosité des habitants a été autant mis à l'épreuve". "Là aussi, il va falloir prendre des décisions fortes". "Pour préparer l’alternance de la France, il faut le rassemblement général, sans aucune exclusive, à la condition incontournable...". A cette question : "Quel bilan, en trois mots, retenez-vous des trois ans de Mr @fhollande au pouvoir ?", il répond : "Tromperie, échec, angoisses".

Nicolas Sarkozy a décidé de poster toutes les minutes une réponse personnalisé, donnant à l'exercice un caractère bien singulier, qui paraît assez désincarné. Parmi ses premières "réponses", ce conseil littéraire à un internaute : "Pas un seul chagrin résiste à la lecture d'un bon livre. Si tu es sentimental je te conseille les "Cerfs-volants" de R.Gary". L'ancien chef de l'Etat répond de manière liminaire à des questions qui mériteraient d'être approfondies, d'où cette sensation de tweets slogans. A titre d'exemple, cette réponse : "La crise de la ruralité est au coeur de la crise identitaire française".

Etrange conversation avec les internautes. Nicolas Sarkozy choisit de parler de sa manière de jouer au tennis. "Au fond je crains que je doive rester ma vie durant avec un revers très scolaire" répond-t-il à une twittos.

Les réponses se multiplient pêle-mêle, sur l'Education nationale, les Chrétiens d'Orient, l'AME, la laïcité, l'utilisation du référendum... Sélection des réponses de Nicolas Sarkozy : "Ce fut une erreur de ne plus utiliser le referendum. Le referendum sera l'une des priorités de notre projet", "La Laïcité est la valeur de base de la République que nous voulons. La République ne peut plus reculer #lesRepublicains", "Parmi les incohérences du gouvernement, peut-être la pire fut la suppression des bourses d’excellence au mérite", "Mais la forme de lâcheté et de démission de tous qui devraient agir rend cette situation encore plus intolérable #Chrétiensdorient"