Interdire le ramadan aux moins de 16 ans : l'idée de LR peut-elle vraiment s'appliquer ?

Interdire le ramadan aux moins de 16 ans : l'idée de LR peut-elle vraiment s'appliquer ? Un groupe de sénateurs LR a proposé, parmi d'autres mesures, d'interdire le jeûne du ramadan aux enfants de moins de 16 ans, mais la mesure peut-elle vraiment être mise en œuvre ?

Interdire le jeûne du ramadan aux mineurs de moins de 16 ans, voici une des propositions formulées par un groupe de 29 sénateurs Les Républicains dans un rapport révélé par Le Figaro le mardi 25 novembre. D'autres mesures accompagnent l'interdiction du jeûne musulman aux mineurs, notamment l'interdiction du port du voile pour les jeunes filles de moins de 16 ans. Des recommandations qui "se fondent sur une approche de protection de l'enfance" peut-on lire dans le rapport Eustache-Brinio, du nom de la la sénatrice du Val-d'Oise qui a présidé le groupe de travail.

L'objectif des sénateurs de droite est surtout de lutter contre l'islamisme comme l'a expliqué Bruno Retailleau, ancien ministre de l'Intérieur redevenu sénateur. Au micro de Franceinfo, l'homme politique a soutenu les mesures qu'il estime nécessaires pour empêcher une "victoire des Frères musulmans qui tentent d'imposer cette matrice idéologique, pas avec le djihadisme, mais avec l'entrisme et un islamisme à bas bruit".

Ces interdictions posent cependant la question du respect de la laïcité et de la liberté de conscience garantis par la République. "La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances", dispose l'article 1er de la Constitution de 1958. Et avant ce texte fondamental du droit français, l'article 1er de la loi de 1905 prévoyait déjà que "la République assure la liberté de conscience" et "garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées [...] dans l'intérêt de l'ordre public". L'article 10 de la Déclaration des droit de l'homme et du citoyen de 1789 dispose par ailleurs que "nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la loi".

Une mesure antimusulman applicable ?

Or, l'interdiction du ramadan aux jeunes musulmans apparaît comme une stigmatisation du culte de l'islam qui contrevient au principe de laïcité. Quant à l'argument de la protection de l'ordre publique, les sénateurs LR n'explique pas explicitement en quoi le respect du jeûne du ramadan par les mineurs musulmans risque de le troubler. Il y a donc matière à débat sur la constitutionnalité de la mesure proposées par les sénateurs LR.

Mais la proposition soulève aussi des questions sur la mise en place de l'interdiction qui reviendrait à obliger des enfants musulmans à manger contre leurs convictions religieuse. A noter que le jeûne du ramadan dure uniquement de lever au coucher du soleil et n'est pas obligatoire pour les enfants. Ce pilier de l'islam devient un "devoir" pour les fidèles à partir de la puberté, le plus souvent "entre 12 et 15 ans" selon Khaled Larbi, imam de la Grande mosquée de Paris, auprès d'Actu. Le respect de l'interdiction ne pourra pas être vérifié dans l'intimité des foyers musulmans, à moins de pousser à la délation. Il ne pourra pas non plus l'être dans l'espace public, si ce n'est dans les établissements scolaires. Mais comment ?

Le jeûne du ramadan interdit dans les écoles ?

Aujourd'hui, rien n'empêche les enfants de respecter le jeûne du ramadan à l'école. Un dialogue peut avoir avoir lieu entre les parents de l'élève et la direction de l'établissement pour prévenir les équipes pédagogiques, il est même conseiller. En l'absence d'explication sur le respect du jeûne ces dernières sont susceptibles de prévenir les parents et y sont mêmes tenues si elles craignent des risques sur la santé de l'élève explique la fiche 13 du vademecum "La laïcité à l'école". "Le principe de laïcité s'oppose évidemment à ce que l'État ou ses agents prennent parti sur l'interprétation de pratiques ou de commandements religieux", rappelle par ailleurs le texte.

Dans le cas d'élèves mangeant à la cantine, des dispositions existent pour permettre aux parents de demander des remises d'ordres, soit un remboursement de frais de cantine, "en cas d'absence prolongée de leur enfant". Cela est prévu à la fiche 12 du même vademecum. "Les conditions dans lesquelles les remises d'ordre peuvent être accordées ne sont prévues par aucun texte", mais une formulaire est demandé aux parents "afin de préciser le motif de la demande". Toutefois, le texte précise que "rien n'oblige l'établissement à procéder à des adaptations du service de restauration scolaire fondées sur des motifs religieux. Aucune base légale ne permet aux parents ou responsables légaux d'exiger de telles adaptations".