Budget 2026 : le PLF peut-il être adopté ? Des hausses d'impôts, des taxes supprimées et le débat prolongé

Budget 2026 : le PLF peut-il être adopté ? Des hausses d'impôts, des taxes supprimées et le débat prolongé Le vote sur la partie "recettes" du budget 2026 n'aura pas lieu ce lundi. Les débats ont été prolongés et les députés ont jusqu'à dimanche pour débattre du texte, lequel n'est pas sûr d'être adopté malgré les compromis entre le camp présidentiel et certaines oppositions sur les impôts et mesures fiscales.

Nouveau rebondissement dans les débats du budget 2026 à l'Assemblée nationale. Le vote de la partie "recettes" du projet de loi finances (PLF) n'aura finalement pas lieu ce lundi 17 novembre. Reporté une première fois en raison du monde de temps pour examiner la totalité des amendements, le scrutin est une nouvelle fois remis à plus tard pour la même raison. Les députés ont désormais jusqu'au dimanche 23 novembre à minuit pour voter le texte avant que ce dernier soit transmis au Sénat.

Le vote devait normalement avoir lieu ce lundi après une interruption des débats pendant le week-end sur décision du gouvernement. L'exécutif s'est finalement ravisé après avoir été accusé de vouloir passer en force en empêchant les votes au Parlement et en passant par des ordonnances. Chose dont s'est défendu le gouvernement : "Nous ne voulons pas utiliser les ordonnances, de même que nous n'avons pas voulu utiliser l'article 49.3" a assuré sa porte-parole, Maud Bregeon, sur BFMTV le dimanche 16 novembre. "Il n'y a aucune raison d'utiliser les ordonnances, [...] ça n'aurait pas de sens", a ajouté la ministre. Cette dernière s'est montrée optimiste rappelant qu'il "reste cinq semaines de débat", "que des compromis arrivent à se nouer" et qu'il y a "des groupes parlementaires qui veulent aller au vote", de LR au PS.

Mais si le vote du budget pourrait possible dans les nouveaux délais et soutenu par le gouvernement, le volet "recettes" du PLF est loin d'être adopté. Si des compromis ont été conclu entre le camp présidentiel et certaines forces d'opposition comme le PS et la droite, le texte qui ressort des débats ne convainc pleinement aucun groupe. De fait, il pourrait être rejeté à l'Assemblée national. Cela aurait pour conséquence d'envoyer la version initiale du PLF au Sénat, alors qu'avant la prolongation des débats le gouvernement promettait d'envoyer le texte dans sa version amendée au Sénat même en l'absence de vote définitif pour ne pas ignorer le travail parlementaire.

Pour rappel, le gouvernement a posé l'objectif d'économiser 31 milliards d'euros pour réduire le déficit public à 4,7% du produit intérieur brut (PIB) en 2026. Un effort conséquent décomposé en deux étapes : la récolte de 14 milliards d'euros notamment grâce à des hausses d'impôts, et l'économie de 17 milliards via la limitation des dépenses de l'Etat. Le gouvernement a cependant laissé une petite marge de manoeuvre aux négociations à l'Assemblée, tant que le déficit reste inférieur à 5 % du PIB. Les députés ont d'ailleurs amendé le PLF en supprimant certaines hausses d'impôts, en en rejetant d'autres, mais en adoptant plusieurs mesures fiscales. Tour d'horizon sur le contenu du texte :

La hausse généralisée de l'impôt sur le revenu retoquée

Alors que le gouvernement prévoyait dans le budget 2026 une année blanche, soit la non-indexation du barème de l'impôt sur l'inflation, une majorité des députés à l'Assemblée nationale a voté contre. Le barème de l'impôt ne sera donc pas gelé, mais indexé sur l'inflation à 1,1%. Ce gel était très critiqué, puisqu'il aurait mécaniquement augmenté le montant de l'impôt sur le revenu pour la quasi-totalité des ménages. Certains foyers fiscaux ayant connu une hausse de revenus auraient même été susceptibles de changer de tranche et de payer plus d'impôts. Par ailleurs, 200 000 foyers fiscaux se trouvant dans la première tranche, et donc non-imposables, risquaient de devoir payer des payer impôts en cas de gal du barème.

Certains retraités devaient également être concernés par une hausse d'impôts, mais la copie du gouvernement a été retoquée. La version initiale du PLF proposait de remplacer l'abattement fiscal de 10 % accordé aux retraités au titre des frais professionnels par un abattement forfaitaire de 2 000€. Mais les députés ont supprimé cette mesure avec 213 voix contre et 17 voix pour. La mesure avait déjà été retoquée par un amendement soutenu par la majorité de l'opposition en commission.

De nouvelles taxes et des avantages rabotés

Si la hausse de l'impôt sur le revenu a été rejetée par les délutés, les ménages risquent tout de même de perdre en pouvoir d'achat à cause de la suppression de 23 niches fiscales, sur les 474 existantes. Si la suppression de certaines des niches visées, jugées obsolètes, inefficaces ou touchant trop peu de personnes, ne devrait pas faire polémique, d'autres suppressions vont avoir des conséquences directes sur les Français. Voici quelques exemples :

  • La fin de la réduction d'impôt sur les frais de scolarité dans le secondaire et le supérieur
  • La réduction progressive de l'avantage fiscal sur les biocarburants comme le E85
  • La fiscalisation des indemnités journalières des affections longue durée.
  • La baisse ou la fin de l'exonération des cotisations pour les apprentis
  • La hausse des charges patronales de 8% sur les avantages en nature comme les tickets-restaurants ou les chèques-vacances.

Les Français concernés vont devoir renoncer à ces avantages et en parallèle, ils vont voir de nouvelles taxes apparaître. La copie du budget 2026 table notamment sur trois nouvelles taxes : celle visant les petits colis, d'une valeur inférieure à 150€, en provenance d'un pays hors de l'Union européenne qui s'élèveront à 2€ par article ; celle sur le vapotage taxant de 30 à 50 centimes chaque flacon de 10 ml selon le taux de nicotine ; et celle sur les emballages plastiques non recyclés que s'élèveront à 30€ par tonne en 2026, et progresseront tous les ans jusqu'à atteindre les 150€ par tonne en 2030.

La taxe Zucman rejetée sous toutes ses formes

Alors que le gouvernement passe par l'impôt pour récupérer des milliards d'euros de recettes, la gauche souhaite faire peser plus de mesures fiscales sur les plus riches et a notamment proposé l'instauration de la taxe Zucman. Cet impôt, pensé par l'économiste Gabriel Zucman, prévoit d'imposer de 2% les Français ayant un patrimoine supérieur à 100 millions d'euros, soit environ 1800 personnes. Face au rejet de la mesure en commission des finances, le PS a également proposé une "taxe Zucman ligth", c'est-à-dire une version allégée qui prévoit de taxer de 3% les personnes domiciliées en France dont la patrimoine excède 10 millions d'euros, en excluant les entreprises innovantes et familiales pour coller aux lignes rouges du camp présidentiel. Mais les deux versions de l'impôt ont été rejetées par les députés du bloc central, de la droite et de l'extrême droite.

Des impôts et des taxes opposés aux plus hauts revenus

Plusieurs impôts et taxes concernant uniquement les Français les plus aisés ont été annoncés et/ou prolongés à l'occasion du budget 2026. Certaines mesures sont en bonne voie pour être validées à l'Assemblée nationale, mais d'autres sont susceptibles d'évoluer, comme la nouvelle taxe visant les holdings patrimoniales, proposée par le gouvernement en alternative à la taxe Zucman.

  • La création d'une taxe sur les holdings patrimoniales qui sont parfois utilisées par les plus fortunés pour contourner l'impôt. Cette taxe vise à faire échec à ces stratégies de contournement par la thésaurisation de revenus. Une mesure présentée comme une lutte contre l'optimisation fiscale par Sébastien Lecornu durant son discours de politique générale. En commission, cette taxe a été supprimée et remplacée par erreur par une taxe sur les holdings patrimoniales devant être récoltée uniquement à la mort du propriétaire. Certains députés croyaient compléter le dispositif et non le remplacer. L'erreur ne devrait pas se reproduire dans l'hémicycle.
  • La prolongation de la contribution différentielle sur les hauts revenus (CDHR) mise en place lors à l'occasion du budget 2025. Il s'agit d'une surtaxe appliquée aux ménages dont les revenus dépassent 250 000 euros pour un célibataire et 500 000 euros pour un couple. Elle fixe un taux minimal d'imposition de 20 %. Elle s'ajoute en réalité à la contribution exceptionnelle pour les hauts revenus (CEHR) qui cible les mêmes foyers fiscaux ainsi qu'à leurs impôts sur le revenu pour qu'ils soient bien imposés d'au moins 20 %. Pensée pour durer une année, cette mesure pourrait finalement être pérennisée jusqu'au retour du déficit à 3% du PIB, soit jusqu'en 2029 selon les projections gouvernementales.
  • La transformation de l'impôt sur la fortune immobilière (IFI) en impôt sur la fortune improductive qui élargit l’assiette de l’impôt en ne tenant plus compte que des bien immobiliers, mais modifie le barème et crée un abattement sur la résidence principale ou unique. Le chiffrage de la mesure est en cours.
  • Le retour de l'"exit taxe" dans sa forme de 2019 visant à freiner l'évasion fiscale. Il est question de taxer un contribuable domicilié fiscalement en France et détenant des actions lorsqu’il transfère son domicile fiscal hors de France sur la plus-value latente qui résulterait de la vente de ses actions.

Durant les débats en commission des finances, un autre impôt concernant les plus hauts revenus avait été ajouté par amendement. Il s'agissait d'un impôt pour les Français aux hauts revenus expatriés dans des paradis fiscaux a été proposée par un amendement de LFI et votée. Il s'agit d'une contribution sur "les plus hauts revenus", soit à partir de 230 000€ environ, en cas de départ vers un pays à la fiscalité généreuse. Pour déterminer les paradis fiscaux concernés par la taxe, il est proposé de retenir les pays "pratiquant une fiscalité inférieure de plus de 40% à celle de la France en matière d’imposition sur les revenus du travail, du capital ou du patrimoine". A noter que l’impôt payé auprès du pays de résidence pourrait être déduit de l’impôt français.

Des hausses de taxes sur les entreprises

Outre les hauts revenus, les entreprises sont également mises à contribution avec des hausses d'impôts et/ou des nouvelles taxes adoptées concernant certaines entreprises et souvent celles générant les plus hauts chiffres d'affaires.

  • La prolongation de la contribution exceptionnelle sur les grandes entreprises également mise en place avec le budget 2025. Cet impôt vise les 400 plus grandes entreprises françaises et oppose un taux d'imposition de 10,3 % pour les entreprises ayant chiffre d'affaires compris entre 1 et 1,1 milliard d'euros et un taux de 20,6 % pour celles ayant un chiffre d'affaires compris entre 3 et 3,1 milliards d'euros. Si cet impôt est reconduit, il devrait être divisé par deux par rapport à l'année dernière.
  • L'augmentation de la taxe Gafam qui vise les multinationales et les géants de la tech a été adoptée. Cet impôt doit doubler, passant de 3 à 6%. Il s'agit d'un compromis, le texte initial proposant de multiplier la taxe par cinq. Une révision à la baisse pour éviter des représailles trop importantes venant des Etats-Unis, dont son originaire la plupart des Gafams.
  • La hausse de la surtaxe sur les bénéfices des grandes entreprises a été votée et va augmenter le taux d'impôt pour les très grandes entreprises jusqu'à 35,3%, mais va alléger cette taxe pour les entreprises intermédiaires. L'Assemblée a toutefois réduit l'impôt sur les sociétés des petites et moyennes entreprises jusqu’à 100 000 euros de bénéfice.
  • L'augmentation de la taxe sur les rachats d’actions qui passe de 8% à 33%  portée à 33 % contre 8 %.
  • Une taxe exceptionnelle sur les superdividendes a été votée, mais jugée inapplicable par le gouvernement par rapport au droit européen.

Si les augmentations de taxes ou d'impôts sont nombreuses dans la copie du budget, les baisses de charges sont nettement moins présentes. Une seule mesure fiscale significative prévoit une baisse de l'impôt pour les entreprises, notamment de l'impôt de production ou cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). Cet impôt, qui "pèse sur la production de nos petites et moyennes entreprises" selon Sébastien Lecornu, baissera avant d'être définitivement supprimé en 2028, soit deux ans plus tôt que prévu. "Afin de soutenir la dynamique de réindustrialisation française et d'accompagner nos petites et moyennes entreprises et nos entreprises de taille intermédiaire, il est proposé de reprendre, dès 2026, la suppression progressive de la CVAE", indique le projet de loi de finances. Le gouvernement estime que cette baisse se traduirait par 1,3 milliard d'euros de recettes en moins.

Dernières mises à jour

16:38 - Un vote sur les "recettes" du PLF incertain, un débat impossible sur les "dépenses"

Le vote de la partie "recettes" du PLF pose question, mais l'examen du volet "dépenses" du budget 2026 semble lui inenvisageable. Cette deuxième partie du PLF devait normalement être étudiée en première lecture à l'Assemblée nationale du 13 au 23 novembre, mais l'examen a été empêché par la prolongation des débats sur la partie "recettes". Laquelle est susceptible de durer jusqu'à dimanche, date à laquelle l'ensemble du PLF devra être transmis au Sénat. Si le premier volet du PLF a le temps d'être voté pour transmettre une version amendée au Sénat, le second volet sera très certainement envoyé dans sa version initiale. Reste à voir si la Sénat modifiera les textes à son tour et si l'Assemblée pourra étudier la partie "dépenses" du budget grâce à la navette parlementaire.

14:35 - Pourquoi le PLF a très peu de chances d'être voté par les députés ?

Les députés ont jusqu'à dimanche pour débattre de la partie "recettes" du budget 2026 et pour la voter, si vote il y a. Avec plus de 1500 amendements étudier, la possibilité de voir d'autres rectifications s'ajouter ou les débats s'éterniser, la tenue du scrutin est loin d'être garantie. Mais en cas de vote, les chances de voir le texte adopté sont également faibles, car le PLF amendé en raison des compromis ne satisfait personne. Le RN et LFI ont déjà annoncé voter contre, quant à la droite LR, à la gauche du PS et au bloc central, aucun n'est emballé par la copie. Un vote du texte risque donc de se solder par un rejet qui entraînerait l'examen du texte dans sa version initiale au Parlement, une issue qui ne satisfait donc ni la droite du LR, ni la gauche du PS non plus. Les élus, malgré les critiques sur la suspension des débats samedi et dimanche, auraient peut-êre préféré ne pas avoir le temps de voter le texte et voir la première partie du PLF transmise au Sénat avec les amendements votés comme l'avait promis le gouvernement. 

12:33 - Il est "souhaitable et possible" qu'un accord sur le budget 2026 soit trouvé selon Moscovici

Si le vote du budget 2026 est loin d'être assuré à l'Assemblée nationale, malgré plusieurs compromis, et l'est encore moins à l'échelle du Parlement du fait de l'opposition au texte amendé du Sénat à majorité de droite, le premier président de la Cour des comptes, Pierre Moscovici, a jugé sur Radio-Classique "souhaitable et possible" qu’un accord soit trouvé et le budget 2026 voté. "Il est impératif que le déficit public final, quelle que soit la procédure [par laquelle le budget sera adopté], soit inférieur à 5%" du PIB a-t-elle également précisé.

11:29 - Le PLF amendé ne respecte plus l'objectif de réduire le déficit sous les 5%

Les débats à l'Assemblée national ont conduit à d'importants amendements du texte, au point de remettre l'objectif de réduction du déficit en question selon les ministres de Bercy. Depuis le week-end, le ministre de l'Economie et celle des Comptes publics tirent la sonnette d'alarme. Concernant la part du déficit public, "on est aux alentours de 5 % du PIB alors qu’on devrait être sous les 5 %" avec le PLF a souligné Amélie de Montchalin au Parisien. "Notre objectif reste 4,7 %. Ce n’est pas un fétichisme ! Tous les efforts qu’on ne fera pas en 2026, il faudra les réaliser en 2027, 2028 ou 2029. Il faut arrêter d’augmenter la dette, et ce au plus vite, car elle génère des charges d’intérêt, à hauteur de 74 milliards d’euros en 2026", a-t-elle ajouté. Le ministre de l'Economie, Roland Lescure, a abondé dans le même sens indiquant que "les amendements votés nous conduisent à un déficit public d’environ 5 % du PIB, c’est trop".

Bercy qui joue les garde-fous explique par l'un de ses conseillers à Politico : "On est des cordes de rappel, on fait notre job : tenir le cadre et sonner l’alerte quand ça risque de déraper". Et d'ajouter concernant les compromis ayant revu l'objectif sur le déficit que "ce n’est pas parce que c’est du compromis que c’est bien pour le pays".

10:22 - Le vote du PLF reporté.. Quand aura-t-il lieu ?

Le vote de la partie "recettes" du budget 2026 n'aura pas lieu ce lundi. Le gouvernement avait annoncé jeudi soir que la journée journée de débat débuterait à 9h ce lundi avant un vote prévu en fin de journée, mais il a revu ses plans face à la colère des députés qui l'ont accusé d'empêcher le vote du texte pour passer par des ordonnances. Finalement, les débats ne reprendront qu'à 21h30 ce lundi soir et se poursuivront jusqu'au dimanche 23 novembre au plus tard. L'Assemblée nationale devra voter le texte avant ce délai après lequel le PLF sera transmis au Sénat. Le vote pourrait également avoir lieu plutôt si les députés parviennent à débattre des amendements restants rapidement.