Frédéric Martel et Eric Maigret (Journaliste / Sociologue) "Mainstream" n'est pas un concept

Eric Maigret : avec son livre, Frédéric a positionné le débat autour des appellations avec l'utilisation du terme "mainstream". Il ne faut pas oublier que tout le XXe siècle a été scandé par des débats sur l'aspect délétère des médias de masse avec tout un vocabulaire issu du champ scientifique qui a participé à la délégitimation de cette culture de masse : "industrie culturelle" pour l'Ecole de Francfort, "Art moyen" chez Bourdieu, etc.

Ce que j'ai essayé de faire avec d'autres chercheurs, c'est de décaper cette scène et de produire un vocabulaire "nouveau" pour en finir avec ces termes scientifiques qui ont infiltré le quotidien.

"Ce qui m'a plu, c'est de sortir du débat traditionnel entre art et divertissement"

J'ai proposé à la place d'utiliser le concept de médiaculture pour définir la relation entre les médias, la télévision, le cinéma. Les cultures au champ plus limité comme le jazz ou le rap, j'appelle ça des subcultures.

Ce débat sur le vocabulaire qui a lieu en ce moment dans le champ scientifique, Frédéric Martel le déploie sur un terrain plus large avec un vocabulaire moins usité en France.

Frédéric Martel : des personnes m'ont dit : "vous utilisez le mot "mainstream" de différentes façons parfois de manière négative parfois positive, c'est un peu léger comme concept". Je réponds : évidemment car ce n'est pas un concept.

Pour moi c'est avant tout un mot polysémique et c'est ce qui m'a plu car il m'a permis de sortir du débat traditionnel entre art et divertissement. Je l'ai utilisé car il me permettait de casser cette idéologie française. C'est d'ailleurs l'objectif de chacun de mes livres. Ce qui suscite beaucoup de violence, mais l'objectif pour moi c'est de déplacer les lignes, de déplacer le débat et de l'ouvrir à l'international.