Apprendre à écrire sur un ordinateur plutôt qu'à la main rend les enfants plus bêtes

Apprendre à écrire sur un ordinateur plutôt qu'à la main rend les enfants plus bêtes Voici ce qui se passe quand les enfants apprennent à écrire sur un ordinateur plutôt qu'à la main. Les difficultés commencent à être connues...

En France, les écoles du primaire au secondaire ont conservé l'apprentissage de l'écriture à la main. Les très jeunes apprennent à écrire en traçant des lettres, mais ils passent très rapidement sur les écrans et tapotent souvent plus qu'ils n'écrivent. Dans plusieurs autres pays, comme aux États-Unis, certains établissements sont complètement passés du stylo au clavier, une pratique qui inquiète un certain nombre de scientifiques.

Devant les facilités des jeunes générations à se servir des outils informatiques, certains s'enthousiasment des nouvelles capacités des plus jeunes, dans un monde où l'informatique sera partout. Mais cette tendance à délaisser l'écrit pourrait être dramatique. Pour la psychologue Audrey van der Meer, "si les plus jeunes ne s'entraînent pas à écrire (à la main) […], leur cerveau n'atteindra tout simplement pas son plein potentiel". De fait, des études montrent que tracer les lettres de l'alphabet, au lieu de les taper, conduit à des "facilités de compréhension". Par extension, l'apprentissage de l'écriture manuscrite favoriserait les capacités de lecture et de mémorisation. 

Face à ces découvertes, certains États américains ont imposé l'enseignement de l'écriture cursive, c'est notamment le cas de la Californie. En réalité, les recherches prouvent pour le moment que la clé réside dans le geste, et non dans la manière d'écrire. C'est le mouvement qui compte explique Ramesh Balasubramaniam, neuroscientifique à l'Université de Californie, qui affirme qu'il "se passe des choses très importantes au cours de l'expérience de l'écriture à la main".

© Stephane ALLAMAN

Mais alors que se passe-t-il dans le cerveau pour qu'il y ait une telle différence entre le fait de taper une lettre et celui de la tracer ? En fait, la pratique de l'écriture manuscrite force différents systèmes cérébraux à travailler ensemble pour reproduire sur la page la lettre à laquelle on pense, alors que la dactylographie rend cette action invisible et supprime en quelque sorte cette réflexion inconsciente. La rédaction nécessite la coordination entre les systèmes moteurs et visuels et demande donc davantage de ressources au cerveau. Au moment d'écrire, le cerveau doit à la fois gérer le souvenir de chaque lettre, les unes après les autres pour former un mot, puis une phrase, et en même temps le mouvement de la main et la pression des doigts pour recréer chaque lettre sur la feuille.

"L'écriture manuscrite fait probablement partie des capacités motrices les plus complexes dont le cerveau est capable", explique Marieke Longcamp, neuroscientifique à l'université d'Aix-Marseille. La pratique de l'écriture est aussi bénéfique pour les adultes, plusieurs auteurs rédigent en partie ou entièrement à la main, pour stimuler leur créativité mais aussi pour intérioriser leur production.

En effet, l'un des principaux avantages de l'écriture manuscrite est qu'elle oblige le rédacteur à prendre son temps, à ralentir. Pendant une journée de travail, lors d'une conférence ou d'une réunion, l'information qui est tapée sur l'ordinateur est rarement traitée efficacement. Pour Audrey van der Meer, l'ordinateur est certes un gain de temps mais en rédigeant à la main on "s'approprie l'information", elle reste donc en mémoire.