Julien Bayou : sa défense face aux accusations de violences, la réplique de son ex-compagne

Julien Bayou : sa défense face aux accusations de violences, la réplique de son ex-compagne BAYOU. Accusé de violences sur son ex-compagne, Julien Bayou s'est défendu après que Sandrine Rousseau a rendu public cette affaire. L'accusatrice, elle, a répliqué par la voix de son avocate. Tout comprendre à l'affaire.

[Mis à jour le 4 octobre 2022 à 14h28] L'affaire Bayou ne va-t-elle être jugée que par le tribunal médiatique ? Deux semaines après les accusations de violences psychologiques sur compagne lancées par Sandrine Rousseau contre Julien Bayou, les remous provoqués par cette affaire qui ébranle EELV prend une nouvelle dimension. Car si jusqu'alors, aucun des deux protagonistes ne s'était exprimé, leurs voix se font désormais entendre dans les médias. C'est Julien Bayou qui a dégainé en premier, assurant être "innocent" dans une interview donnée au Monde le 4 octobre. Mercredi 5 octobre, la riposte est venue de l'avocate de son ex-compagne, sur Franceinfo, laquelle s'en est pris au député de Paris qui, à ses yeux, "instrumentalise cette affaire à des fins politiques", mais aussi pour "faire pression pour intervenir sur la cellule" interne à EELV qui enquête sur le signalement de violences reçu.

Après plusieurs jours de silence, les deux parties ont donc décidé de prendre la parole, chacune pour se défendre. S'il s'est mis en retrait de ses fonctions de secrétaire général du parti écologiste, Julien Bayou n'est, pour l'heure, visé par aucune plainte. Seules des accusations pèsent contre lui. Mais un dépôt de plainte n'est pas totalement à exclure. Ce qui pourrait donner une toute autre tournure à un dossier qui n'est pas entre les mains de la justice.

De quoi Julien Bayou est-il accusé par son ex-compagne ?

En juillet 2022, Julien Bayou a été interrogé au sujet d'un signalement le concernant, effectué auprès d'une commission interne d'EELV, par une femme l'accusant de violences conjugales. Le jeune député indiquait alors au Figaro, qui le questionnait sur ce fait, attendre d'être "interrogé dans les meilleurs délais sur ce qui ne constitue en rien des violences sexistes ou sexuelles ni des comportements inappropriés envers quiconque". L'élu écologiste estimait par ailleurs que ce signalement résultait d'une "rupture douloureuse et difficile" avec son ancienne compagne, dont il mettait en avant la "rancœur" et de supposées velléités de lui nuire.

L'affaire Bayou a pris une dimension médiatique nouvelle le lundi 19 septembre, avec la diffusion de "C à Vous", sur France 5, en fin d'après-midi. Lors de l'émission, Sandrine Rousseau a réagi à une série de tweets pour faire connaitre l'avancée des mesures déployées chez EELV à la suite de ces allégations.

La député a fait savoir qu'elle avait rencontré "longuement" ladite victime. L'élue a même indiqué l'avoir reçue chez elle et avoir recueilli son témoignage. Elle a clairement entendu, a-t-elle dit, un récit pointant "des comportements qui sont de nature à briser la santé morale des femmes", ajoutant, au sujet de la vie sentimentale de Julien Bayou : "elles sont manifestement plusieurs. Moi, je n'ai entendu qu'un seul témoignage. Visiblement, une enquête journalistique est en cours." La députée a indiqué avoir reçu une femme "vraiment très mal [et] dans un état très déprimé", qui lui a confié avoir "fait une tentative de suicide quelques semaines après" avoir effectué ce signalement aux instances du parti. Ce sont les seuls éléments aujourd'hui publiquement connus.

Comment Julien Bayou se défend-t-il ?

Après deux grosses semaines de silence, Julien Bayou a finalement fini par réagir aux accusations qui pèsent contre lui, dans une interview accordée au Monde et publiée mardi 4 octobre 2022. "Il n'y a pas d'affaire Bayou. [...] Je suis dans la situation de quelqu'un innocent des faits dont on ne l'accuse pas." Dès les premières lignes de son entretien, le député s'est défendu d'être l'auteur de violences psychologiques sur son ex-compagne. Des accusations qui pèsent sur lui et l'ont poussé à démissionner de la direction d'Europe Ecologie-Les Verts (lire plus bas) après la sortie de Sandrine Rousseau sur le plateau de France 5 le 19 septembre. Quinze jours plus tard, l'élu est sorti du silence et a clamé son innocence.

Plutôt que des violences psychologiques, l'élu écologiste a évoqué "une rupture très douloureuse avec des souffrances partagées" dans laquelle il n'est pas "l'auteur intentionnel des souffrances, réelles, de [son] ex-compagne". Et si l'homme a mis du temps à s'exprimer sur le sujet laissant d'abord le soin à son avocate de le défendre, il "compte bien démontrer" qu'il n'a "jamais commis de violence psychologique" à l'égard de son ancienne compagne.

Julien Bayou a, en plus d'assurer sa défense, renvoyé les accusations à Sandrine Rousseau qui a, la première, fait mention des violences psychologiques présumées. Le député a presque renversé la vapeur en insistant pour dire que "tout le monde mesure" que la députée est allée trop loin. La réaction du premier secrétaire du PS, Olivier Faure, au micro de Franceinfo le 7 octobre donne raison à l'écologiste. "Sandrine Rousseau n'aurait pas dû se faire porte-parole d'une affaire dont elle ne connaît pas grand-chose", a estimé le socialiste prenant le parti du mis en cause qui n'a pas été entendu alors qu'il est "prêt à répondre de ses actes" dans cette affaire "pas encore été étudiée par la cellule". L'élu a déjà quitté ses fonctions à la direction du parti car c'était nécessaire "pour parler librement sans engager le collectif". En revanche face à "une accusation qui n'est pas portée, une rumeur qui est colportée" il entend poursuivre son rôle de député : "Je n'ai pas quitté mon parti. [...] Je suis investi d'un mandat, je compte bien le mener".

Outre ses récentes déclarations, Julien Bayou avait insisté, dès juillet auprès du Figaro, sur les motivations, selon lui malhonnêtes, qui ont mené à cette plainte. "Elle m'a clairement écrit, trois jours après avoir saisi la commission interne d'EELV : 'Inquiète-toi. Je vais revenir et en force. (…) La chute va être douloureuse.'". Julien Bayou commentait ainsi la tournure que prenaient les événements : "Il s'agit malheureusement d'une histoire qui se termine dans la souffrance, et d'une rupture qui s'accompagne de menaces à peine voilées à mon endroit et d'une forme d'instrumentalisation que je ne peux que déplorer."

Quelle est la réaction de l'ancien compagne de Julien Bayou ? 

L'ex-compagne de Julien Bayou n'a pas pris la parole publiquement pour commenter l'affaire. Seule son avocate s'est exprimée pour la première fois, mercredi 5 octobre 2022, sur Franceinfo. Me Elodie Tuaillon-Hibon a critiqué l'attitude du député EELV qui, pour elle, "instrumentalise cette affaire à des fins politiques." "Il se répand dans les médias pour former une pression médiatique", a-t-elle ajouté, dénonçant, par ses prises de parole, une tentative de "pression" sur la cellule interne chez EELV chargée d'enquêter sur l'affaire. "S'il avait vraiment le respect qu'il prétend pour les victimes, pour les femmes et pour son ex-compagne, il ne ferait pas ça", a-t-elle cinglé, ajoutant que sa cliente "ne va pas bien." Mais à ce stade, aucune plainte n'a été déposée.

Julien Bayou accuse Sandrine Rousseau d'être "allée trop loin"

Le séisme qui bouscule la gauche et le parti écologiste est d'autant plus fort que tout se passe en interne. C'est la députée écologiste et féministe Sandrine Rousseau qui a fait l'étalage de la vie privée de l'ex-compagne de Julien Bayou et par ricochet du député. Dans Le Monde, l'ancien co-président d'EELV juge que l'élue "est allée trop loin" et l'accuse de "confondre féminisme et maccarthysme" en s'adonnant à une chasse à l'homme et portant "des accusations que vous ne pouvez contredire, car il n'y a pas d'enquête". L'écologiste pèse toutefois la mesure de ses mots et s'il assure que "le mouvement #metoo est une révolution nécessaire et inachevée" il nuance et dénonce ici non "pas un excès du féminisme [mais] un dévoiement.

Plus que les accusations lancées sur une chaîne publique à une heure de grande écoute par Sandrine Rousseau, l'élu écologiste dénonce aussi les agissements de certaines militantes féministes dont une qui menait une enquête sur la vie privée du député. "C'est très dur de voir sa vie privée exposée. [...] En 2019, j'ai dû demander à une femme militante de cesser d'enquêter sur moi, et surtout de colporter rumeurs et accusations sans preuves. Elle disait partout : Le mec est pas "safe", il y a forcément un truc.'" Une surveillance "acharnée" qui a duré plusieurs années et révélée par Libération.

Démission de Julien Bayou de la direction d'EELV

Julien Bayou sait depuis des semaines qu'il fait l'objet d'un signalement pour violences faites aux femmes, effectué au début de l'été par une ancienne compagne, à une commission interne de EELV. Le député n'a manifestement pas obtenu d'information sur la nature de cette plainte. "Vous le savez peut-être, je suis accusé de faits qui ne me sont pas présentés, dont mes accusateurs.ices disent qu'ils ne sont pas pénalement répréhensibles, et dont je ne peux pour autant pas me défendre puisqu'on refuse de m'entendre. C'est Kafka à l'heure des réseaux sociaux", écrit Julien Bayou. Et d'ajouter : "Cette situation est intenable et le contexte délétère semble empêcher tout discernement, dans un moment où la société bascule et cherche le point d'équilibre pour cette si nécessaire révolution féministe."

Visé par une enquête interne diligentée par le parti EELV, mais sans avoir été entendu par la commission, Julien Bayou avait déjà décidé de quitter la co-présidence du groupe des écologistes à l'Assemblée nationale. L'audition devrait avoir lieu prochainement après que les investigations auront permis de faire "un état des lieux pour comprendre le contexte", selon la députée Sandra Regol, interrogée le 21 septembre sur le sujet. La justice ne s'est, quant à elle, pas emparée de l'affaire concernant Julien Bayou puisqu'aucune plainte n'a été déposée. Du moins, pas à la connaissance du parti.

Les cellules contre les violences faites aux femmes efficaces selon Bayou ?

La question des cellules internes mises en place pour lutter contre les violences faites aux femmes et surtout de leur efficacité a été posée par l'affaire Bayou. En février 2022, le député avait lui-même validé le fonctionnement du nouvel organe politique mais aujourd'hui il est pris dans les mailles du filet après que la cellule "s'est autosaisie à la suite d'un e-mail qui lui a été adressé". Julien Bayou ne remet pas en question l'utilité de la cellule qui doit répondre à une nécessité : "sortir du déni sur les violences" en traitant des dossiers sur lesquels "la justice est défaillante". "Pour autant, ces cellules ne remplacent pas la justice. La sanction la plus grave qu'elle puisse prononcer est l'exclusion d'EELV. Elle ne peut prétendre ni dire le droit ni prononcer de réparation. [...] La cellule était nécessaire, mais elle est fondamentalement insuffisante", ajoute l'élu qui soutient que la cellule "ne peut pas fonctionner pour un cas comme le [sien]". 

Julien Bayou a souligné d'autres limites de la cellule interne contre les violences faites aux femmes notamment un manque d'imperméabilité puisqu'en juillet les informations sur sa mise en cause avaient fuité et étaient arrivées jusqu'à la rédaction du Figaro. Mais c'est aussi le respect du contradictoire qui est pointé du doigt par la député. "J'ai demandé à quatre reprises à la cellule d'être auditionné. [...] Ce principe essentiel n'est pas respecté."

Quelles réactions du côté d'EELV ?

Mardi 20 septembre, au lendemain des accusations de Sandrine Rousseau, Europe Écologie-Les Verts s'est fendu d'un communiqué dans lequel le parti a réaffirmé être "pleinement mobilisé dans la lutte contre les violences faites aux femmes". EELV y explique que "ces violences sont systémiques, elles existent dans l'ensemble des cercles de la société, y compris dans la sphère politique" et rappelle s'être doté de lui-même d'une cellule d'écoute "dès 2016, puis d'une cellule d'enquête et de sanction sur le harcèlement et les violences sexuelles et sexistes début 2017". Cellule dont le seul souci est "la recherche de la vérité". Réagissant au tumulte médiatique suscité par les propos de Sandrine Rousseau lundi soir, EELV a indiqué que la "cellule travaille à son rythme" et qu'elle "doit continuer son travail en toute indépendance et sérénité". La direction du parti a également rappelé la procédure à suivre si d'autres faits devaient être portés à la connaissance de la cellule.

Dimanche 25 septembre, l'ex-candidat écologiste à la présidentielle, Yannick Jadot, avait appelé Julien Bayou à se mettre en retrait du secrétariat national d'EELV, "pour la sérénité de l'enquête". L'eurodéputé avait aussi considéré que les propos de Sandrine Rousseau avaient été malvenus. "Je ne suis pas favorable à ces prises de position personnelles qui viennent abîmer un processus qu'on doit toutes et tous respecter", avait-il dit sur le plateau du Grand Jury RTL.

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