Darmanin présente des excuses et admet avoir eu "une idée reçue" sur certains étrangers
Trois ans après le chaos du Stade de France, Gérald Darmanin change enfin de ton. Invité sur la chaîne YouTube "Legend", le ministre de l'Intérieur est revenu sur la finale de la Ligue des champions de mai 2022, qui avait viré au scandale international. EN effet, le match entre Liverpool et le Real Madrid avait débuté en retard, dans une ambiance tendue, marquée par des débordements aux abords du stade.
Gérald Darmanin avait rapidement pointé du doigt les supporters anglais, accusés à tort d'être responsables des incidents. Une version des faits largement remise en cause depuis. Pour la première fois, le ministre reconnaît ses torts et présente ses excuses. Un revirement tardif, mais inédit, après des mois de silence et de polémiques.
Lorsqu'on lui demande quel est son plus grand échec, le ministre de la Justice cite aussitôt la finale au Stade de France, le soir du match entre le Real Madrid et Liverpool. Passionné de football, fervent supporter de Valenciennes et ancien arbitre, il dit parler d'un univers qu'il connaît bien. "Il faut savoir que c'est très dur d'organiser des matches de foot, c'est l'endroit où il y a le plus de problèmes. J'ai appris que la hantise d'un ministre de l'Intérieur, ce sont les matches de foot. (...) La France ne devait pas organiser cette finale (en effet, elle devait initialement se dérouler à Saint-Pétersbourg, avant d'être délocalisée à Saint-Denis en après le début de la guerre entre l'Ukraine et la Russie), ça ne partait déjà pas très bien, car il faut organiser ce genre de compétition", confie-t-il.
"J'étais peut-être un peu prétentieux"
"À l'époque, je m'étais peut-être un peu endormi sur mes acquis, je ne m'étais pas dit : " tiens, ça peut être un problème". La vérité est que dans la vie, il y a des problèmes tous les jours. Là, j'étais peut-être un peu prétentieux, habitué… (...) J'arrive au stade par le parking. Le préfet de police n'était pas là. Je vois bien qu'il y a un problème, qu'il y a quinze minutes de retard sur le coup d'envoi. Je vois bien que c'est un sujet, le stade n'est pas plein. Au bout d'un quart d'heure, je me dis : "ça ne va pas du tout". On monte au poste de sécurité où c'est la confusion, les flics font ce qu'ils peuvent. On voit sur les images de vidéo surveillance, une foule rouge de supporters de Liverpool, agglutinés contre les grilles et des CRS qui les retiennent. Je demande ce qu'il se passe et on me répond qu'il y a un mouvement de foule", raconte Gérald Darmanin.
Selon lui, "c'est Liverpool, un immense club mais aussi le hooliganisme anglais. L'analyse que nous faisons dans un premier temps est : "ils foutent le bordel". C'est ce que j'apprends au poste de sécurité, c'est ce que m'apprend le préfet de police qui m'a depuis rejoint, c'est ce que montrent les images. On chope aussi des gars avec des faux billets parce qu'à l'époque c'étaient des billets en papier. De faux billets avaient été vendus et bloquaient l'entrée. J'apprends aussi qu'il y a un bordel avec le RER qui a créé de la tension dans la circulation des personnes", détaille le ministre.
Il évoque une série d'erreurs : la panne du RER qui a concentré les supporters de Liverpool à une seule entrée, les faux billets qui ont perturbé le filtrage, et une délinquance mal maîtrisée. Selon lui, c'est cet enchaînement de dysfonctionnements qui a conduit à son premier discours public, dans lequel il a incriminé les supporters anglais. Une version partielle, admet-il aujourd'hui, qui n'était pas complètement fausse, mais qui, sortie de son contexte, a été perçue comme un mensonge. Il estime que cette déclaration a nourri l'idée qu'il cherchait à masquer la responsabilité de certains jeunes impliqués dans les agressions. Le récit médiatique s'est alors retourné contre lui : les Anglais victimes, les autorités coupables. Même s'il rappelle qu'aucun mort ni blessé grave n'est à déplorer et que la situation aurait pu être bien pire, il constate que cela importe peu aux yeux du public, pour qui le mot "fiasco" s'est imposé. Le contexte politique a amplifié les critiques : à la veille des élections législatives, certains adversaires n'ont pas hésité à l'attaquer frontalement, allant jusqu'à distribuer des tracts dans sa circonscription l'accusant d'avoir menti.
"C'est un échec"
Enfin, le ministre s'excuse auprès des supporters de Liverpool. "Vous mettez du temps à effacer cela. C'est un échec parce que je n'avais pas bien prévu, c'est une erreur de ma part, je n'avais pas bien vérifié ce qu'il se passait. J'ai péché par idée reçue. Le coupable était facile et je m'en excuse auprès des supporters de Liverpool. Ils ont eu raison de mal le prendre. C'était une erreur et un échec", avoue-t-il.