Dissolution de l'Assemblée : un coup de bluff ? Pourquoi elle s'éloigne désormais

Dissolution de l'Assemblée : un coup de bluff ? Pourquoi elle s'éloigne désormais Emmanuel Macron n'a plus beaucoup d'options pour essayer de sortir de la crise. Si des indices ont pointé vers une dissolution de l'Assemblée nationale, celle-ci pourrait être écartée au profit d'une autre solution.

Une autre voie que celle de la dissolution semble possible pour Emmanuel Macron. La question se pose depuis la démission de Sébastien Lecornu et de ses ministres survenue le 6 octobre, le troisième échec consécutif d'un gouvernement du socle commun en un an. Appelé à dissoudre l'Assemblée nationale et a organisé de nouvelles élections législatives par le RN, le chef de l'Etat souhaite autant que possible éviter ce scénario, d'autant qu'il n'y est pas encore forcé. Outre la dissolution, Emmanuel Macron peut aussi décider de nommer un nouveau Premier ou de démissionner. Mais en chargent Sébastien Lecornu de mener d'"ultimes négociations" jusqu'à ce mercredi soir, il semble avoir choisir la première solution.

La nomination d'un nouveau Premier ministre se précise quand le scénario d'une dissolution de l'Assemblée nationale semble au contraire s'éloigner. "J'ai de bonnes raisons de vous dire [...] qu'il y a une volonté d'avoir pour la France un budget avant le 31 décembre de cette année. Cette volonté crée un mouvement et une convergence qui éloignent les perspectives de dissolution", a affirmé Sébastien Lecornu dans un point presse le mercredi 8 octobre entre ses consultations avec les forces politiques.

Une annonce qui coupe court aux spéculations apparues dans la presse ces dernières heures après plusieurs indices allant dans le sens d'une dissolution de l'Assemblée. Déjà la répartition tripartite des forces dans l'hémicycle et l'impossibilité des précédents Premiers ministres à trouver une majorité traduisent une forme d'ingouvernabilité de la France à laquelle la dissolution semble être une solution. Puis la rencontre en toute discrétion mardi après-midi entre Emmanuel Macron et la présidente de l'Assemblée nationale au palais de l'Elysée. Le chef de l'Etat a également reçu le président du Sénat. Des rencontres qui pouvaient faire penser aux consultations nécessaires avec les présidents de deux chambres avant une dissolution comme le prévoit l'article 12 de la Constitution. Mais les deux intéressés ont révélé ce mercredi matin ne pas avoir parlé de dissolution avec lui ! Et si le chef de l'Etat avait orchestré un coup de bluff pour mettre la pression sur LR, les socialistes et les macronistes ?

Un autre indice, et même une consigne concrète, indique toutefois que des mesures sont prises en cas de dissolution. D'après Le Canard Enchaîné, "les préfets ont déjà reçu la consigne officieuse de se tenir prêts pour de nouvelles législatives les 16 et 23 novembre". Autrement dit, en cas d'échec des ultimes négociations de Sébastien Lecornu, Emmanuel Macron préférera la dissolution à la démission. Reste que l'option la plus plausible à ce stade est de voir un nouveau Premier ministre et un nouveau gouvernement nommés, sans doute ceux de la dernière chance.

Pourquoi une dissolution n'est pas souhaitable pour Macron

Si aucune coalition ne parvient à former de majorité dans une Assemblée nationale tripartite, rien ne dit que de nouvelles élections législatives déboucheront sur l'émergence d'un groupe majoritaire. Les études sondagières suggèrent même qu'un scrutin pourrait ne rien changer à la situation, voire aggraver la crise. C'est d'ailleurs l'argument principal d'Emmanuel Macron pour justifier le non recours à la censure : rien ne garantit que de nouvelles élections législatives permettent de retrouver une stabilité.

Si Emmanuel Macron souhaite éviter une dissolution autant que possible, c'est aussi parce qu'il sait qu'un nouveau scrutin risquerait d'être défavorable à son camp qui pourrait perdre des sièges au profit des oppositions, notamment de la gauche et de l'extrême droite. Une issue qui le fragiliserait encore davantage pour les deux dernières années de son mandat. Enfin, le scénario menant à une démission d'Emmanuel Macron pourrait avoir de lourdes conséquences sur son successeur. Si la configuration suivante est rarement évoquée, elle a le mérité d'être posée : le futur chef de l'Etat se retrouverait bloqué, faute de pouvoir dissoudre à nouveau l’Assemblée, puisque celle-ci l’aurait été juste avant son élection. Il lui faudrait attendre un an supplémentaire pour tenter de bénéficier d'une Assemblée favorable, et davantage gouvernable, selon l’article 12 de la Constitution. Une nouvelle élection présidentielle ne remettrait donc pas les compteurs à zéro, bien au contraire.

RN, LFI, PS, LR... Qui est favorable à une dissolution ?

La dissolution devient une décision "incontournable" selon les mots de Marine Le Pen ce lundi. Les appels du RN à dissoudre l'Assemblée nationale sont les plus insistants, mais la formation politique n'est pas la seule à soutenir une telle mesure. LFI en appelle à la dissolution mais préfère tout de même l'option de la démission, ou de la destitution d'Emmanuel Macron. Mais l'organisation de nouvelles élections législatives n'est pas un scénario plébiscité par les autres partis qui préfèrent l'option d'une nomination d'un nouveau Premier ministre.

Mais ce n'est pas le cas des autres formations politiques qui défendent pour la plupart, comme Emmanuel Macron, l'hypothèse de le nomination d'un nouveau Premier ministre. Les partis y posent cependant leurs conditions. Au PS comme chez les Ecologistes, on appelle à la nomination d'une personnalité de gauche à Matignon. Marine Tondelier emploie même le terme de "cohabitation". Si les verts "envisagent de pouvoir gouverner", les socialistes assurent répondre "positivement" en cas d'appel à Matignon. Reste que les deux partis se disent aussi parés pour faire face à une dissolution et des élections qui ne permettraient cependant pas de faire émerger une majorité à l'Assemblée et donc de sortir de la crise. "Il y aurait toujours trois blocs à l'Assemblée" a affirmé le porte-parole du PS dans l'hémicycle, Arthur Delaporte sur BFMTV le 6 octobre.

Du côté de la droite et de LR, la dissolution n'est pas l'option envisagée. Sur le plateau de TF1, le président du parti a rappelé que le choix revenait au chef de l'État, mais a estimé que le retour aux urnes ne devait être qu'une solution de derniers recours en cas de nouveau blocage face à un Premier ministre de rupture, de droite selon sa préférence ou de gauche. "S'il y a situation de blocage, alors il faudra le retour aux urnes. Mais je pense qu'il y a d'autres moyens avant d'en arriver là", a-t-il déclaré.

Les Français favorables à une dissolution et de nouvelles législatives ?

Selon une enquête d'opinion menée aujourd'hui par l'institut de sondage Ifop pour LCI, 66% des Français souhaitent la dissolution de l'Assemblée nationale. C'est 5 points de plus qu'il y a un mois. Les électeurs du Rassemblement national (85%) et de la France insoumise (71%) sont les plus nombreux à vouloir voir cette dissolution arriver. Les Français sont également de plus en plus à penser qu'Emmanuel Macron va bel et bien dissoudre l'Assemblée nationale. Ils étaient 30% au mois de juin et sont 53% aujourd'hui. Les chiffres de cette enquête sont à relativiser sachant que les rebondissements ont été nombreux aujourd'hui. Si Marine Le Pen souhaite toujours la dissolution avant tout, les insoumis plaident plutôt pour une démission ou une destitution du président. De plus, Emmanuel Macron a demandé à 18 heures à Sébastien Lecornu de mener des négociations ces prochains jours. L'avis des Français a très bien pu changer dans la journée après cette annonce de l'Élysée. 

Dernières mises à jour

10:50 - Lecornu affirme que "les perspectives de dissolution" s'éloignent

La dissolution n'est pas l'option privilégiée par Emmanuel Macron a-t-on appris ce mercredi après la prise de parole de Sébastien Lecornu. Les nouveaux signaux orienteraient plutôt vers la nomination d'un nouveau Premier ministre. "J'ai de bonnes raisons de vous dire qu'il y a une volonté d'avoir, pour la France, un budget avant le 31 décembre de cette année. Cette volonté crée un mouvement et une convergence qui éloignent les perspectives de dissolution", a déclaré le Premier ministre démissionnaire chargé de mener des négociations jusqu'à ce soir. Il a toutefois indiqué que tout n'était pas encore fait : "Cela ne suffit pas, il faut évidemment que ce budget comporte un certain nombre de paramètres qui permettent à la France d'avancer. Il y a une énorme vigilance des forces politique à dire "attention, la situation politique dans laquelle nous nous trouvons peut emporter des conséquences économiques et sociales, y compris en matière d'emploi. C'est un paramètre clé, protecteur, sur lequel nous devons nous accorder". Il a aussi cité la réduction de déficit comme un point "clé pour la crédibilité de la signature de la France à l'étranger et pour notre capacité à emprunter" sur lequel "tout le monde s'accord à dire que la cible du déficit publique doit être tenue en-dessous de 5%".

08:45 - Emmanuel Macron n’a pas évoqué la dissolution avec la présidente de l’Assemblée

C'est une information importante : la présidente de l’Assemblée nationale a fait savoir ce mercredi matin sur RTL qu'elle n’a pas évoqué la dissolution lors de son rendez-vous hier avec Emmanuel Macron. La consultation préalable de la présidente de la chambre basse est obligatoire avant une dissolution.

07/10/25 - 23:49 - Mélenchon a dénoncé un RN "plus hypocrite que jamais"

Sur son compte X, Jean-Luc Mélenchon a dénoncé un Rassemblement national "plus hypocrite que jamais" à propos de la motion de destitution de La France insoumise. "Demain, Marine Le Pen, Jordan Bardella décident de ne pas permettre à la motion de destitution d'Emmanuel Macron d'être soumise aux votes de l'Assemblée nationale", dénonce le leader des Insoumis. Il conclut ainsi sa publication : “Ça fait partie de son accord avec les macronistes pour les postes à l’Assemblée ?”

07/10/25 - 23:36 - "Un Premier ministre de gauche" ou bien "la dissolution", selon Laurent Wauquiez

Suite à son entretien avec Sébastien Lecornu, Laurent Wauquiez a précisé aux députés Les Républicains que "leur première option c'est le fameux socle commun". "S'il n'y a plus LR, la plus grosse 'entente' n’est plus là", a-t-il insisté. Il a aussi expliqué que "leur interrogation, c'est donc de savoir si après la position de Bruno Retailleau, on est toujours dans cette logique d'entente avec la macronie". Si le parti de droite ne participait pas au gouvernement, alors "deux options" sont sur la table du Premier ministre démissionnaire : "la première c'est un Premier ministre de gauche. La seconde c'est la dissolution", a rapporté le chef de file LR à l'Assemblée nationale.

07/10/25 - 23:24 - Revirement au RN sur la motion de destitution ?

Le RN a finalement décidé de s’abstenir sur la recevabilité de la motion de destitution de LFI "pour que le débat puisse se tenir", rapportent des sources parlementaires à des journalistes de LCI. Ainsi, il manquerait quelques voix à la gauche pour permettre au texte d'être examiné en commission, car le bloc central et LR voteront contre.

07/10/25 - 22:33 - "Je rendrai [..] compte de mes conclusions au Président", écrit Lecornu sur X

Le Premier ministre démissionnaire, Sébastien Lecornu, recevra demain, mercredi 8 octobre, les socialistes, les Écologistes puis les communistes. Il rendra ensuite compte de ses conclusions au président de la République, Emmanuel Macron. "Je rendrai ensuite compte de mes conclusions au Président de la République", écrit Sébastien Lecornu sur le réseau social X. Il fait également le bilan de sa journée de rencontre avec les différents groupes parlementaires et partis politiques, comme le groupe Liot, les LRs ou encore Place Publique.

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