Mort d'Arno : le chanteur belge emporté par la maladie, les hommages

Mort d'Arno : le chanteur belge emporté par la maladie, les hommages ARNO. Le chanteur belge Arno, Arnold Hintjens de son vrai nom, est mort à l'âge de 72 ans, après deux ans de lutte contre un cancer du pancréas.

[Mis à jour le 26 avril 2022 à 16h44] Sa voix cassée était reconnaissable entre toutes : le chanteur Arno, figure belge de la scène rock, est décédé samedi à l'âge de 72 ans. Depuis deux ans, il luttait contre un cancer du pancréas, qui aura finalement eu raison de lui. C'est en 2019 qu'Arno avait annoncé le diagnostic. Depuis, il enchaînait les traitements et avait dû reporter plusieurs tournées et concerts.

Arnold Charles Ernest Hintjens, le vrai nom d'Arno, s'était malgré tout produit à Ostende, sa ville d'origine, sur la côte de la mer du Nord, en Belgique, en février et mars dernier, un néon "Vivre" brillant dans un décor noir (photo). Il avait participé en mai dernier à au projet du même nom, avec le pianiste Sofiane Pamart. Son ultime tournée s'était achevée dans cette cité portuaire devenue un haut lieu du tourisme belge, le 11 mars 2022, date à laquelle il a pour la dernière fois soulevé son micro. Arno déclarait alors à son public qu'il allait "bientôt rendre visite" à sa mère. Une référence directe à la mort, celle-ci étant décédée quand le chanteur avait 24 ans. Un ultime album était en préparation avant l'annonce de son décès.

Depuis l'annone de sa disparition, les hommages à Arno sont nombreux. Anonymes comme personnalités, artistes ou politiques, tous saluent la carrière du chanteur belge. "C'est avec une grande tristesse que j'ai appris que tu étais parti Tonton ! Toutes mes condoléances à la famille", écrit un autre artiste belge, Stromae, sur Instagram. "Merci pour la tendresse", a twitté Augustin Trapenard, animateur de l'émission Boomerang sur France Inter, où Arno avait accordé l'un de ses derniers entretiens. 

"Que de tristesse d'apprendre le départ de cet artiste formidable", s'est ému Nagui, quand Laurence Bloch, directrice de France Inter ajoute : "Il était la poésie même, punk et déchiré. Nous l'aimions tant à France Inter." "J'ai appris la terrible nouvelle à la fin de la séance, son départ me touche au plus profond de moi", a indiqué Mireille Matthieu à l'AFP. "Son désir presque testamentaire était d'enregistrer un duo avec moi. Il y a deux semaines à Bruxelles, il a enregistré sa voix avec beaucoup de courage. Arno était un véritable poète, avec une façon bien particulière de se raconter à travers ses chansons", a-t-elle poursuivi.

Sur son compte Instagram, le chanteur -M- a lui aussi rendu hommage à "une grande âme de la chanson rock", exprimant ses "pensées pour sa famille et nos amis belges". "Arno forever", légende Matthieu Chedid sur une photo de l'artiste disparu en noir et blanc.

Son cancer, une maladie diagnostiquée en 2019

Arno était donc malade depuis près de deux années. Son cancer du pancréas a été diagnostiqué en novembre 2019. Une maladie qui l'obligera à reporter des concerts en Europe et notamment en France, très rapidement, dès le mois de février l'année suivante.

De retour sur scène à l'été 2020, Arno sera de nouveau contraint d'annuler sa venue à Paris, au Trianon, en décembre 2021. L'annonce sera faite plusieurs mois plus tôt et précisera qu'Arno était contraint d'annuler tous ses concerts jusqu'à la fin de l'année, "sur recommandation de ses médecins".

Biographie courte d'Arno

Arno, "l'autre roi des Belges, figure tutélaire de deux générations de musiciens, de dEUS à Stromae", comme l'écrit Le Parisien, était aussi surnommé le "Le Tom Waits belge", référence du blues et du rock indépendant américain, dont il était un admirateur inépuisable. C'est d'ailleurs en chantant en anglais d'abord qu'Arno imposera sa voix rocailleuse, sa personnalité, mais aussi son humour hors norme, qui n'est pas sans rappeler d'ailleurs l'interprète de "Hope I don't fall in love with you". Puis le français et le flamand lui apporteront certaines de ses plus belles chansons, permettant aux critiques d'aller chercher de nouvelles comparaisons, du côté de Brel ou de Léo Ferré cette fois.

Arno a d'abord débuté par le punk, avec son groupe TC Matic et connaîtra le long parcours des artistes coincés dans l'anonymat avant, un jour peut être, d'être révélés au grand public. Cette révélation débutera pour lui avec "Ho La La La" et "Putain putain", deux titres de son groupe de l'époque, au début des années 1980. Le second, déclaration d'amour décalée à l'Europe ("Putain putain, c'est vachement bien, on est tous des Européens"), donne le ton : Arno continuera à développer ces textes bruts, poétiques, parfois naïfs, souvent bouleversants, murmurés ou scandés de sa voix rauque tout au long de sa carrière.

Qui était Sophie Dewulf, sa compagne ?

Plusieurs années avant sa disparition, le chanteur Arno s'était mis en couple avec la photographe, parolière, actrice et musicienne Sophie Dewulf. D'origine maroco-tunisienne, elle était de 30 ans la cadette de l'artiste. Sur son compte Instagram, Sophie Dewulf partageait régulièrement des photos d'Arno, en studio d'enregistrement ou en privé. Après la disparition du rockeur belge, c'est sur ce même réseau social qu'elle a rendu hommage à son compagnon.

"Bon voyage Arno", écrit-elle simplement en légende d'une vidéo combinant plus de trois minutes d'images de nombreux moments de vies à deux, de voyages, de dîners entre amis ou même de photos du chanteur sur son lit d'hôpital.

Une trentaine d'album, des chansons et reprises cultes

Arno aura enregistré, en près de 50 ans, une trentaine d'albums au total, en solo ou en collaboration (Freckleface, Tjens Couter, TC Matic, Charles et les Lulus, Les Subrovniks) et contribué à des dizaines de projets, dont certains assez improbables comme comme la version néerlandaise du film Toy Story en 1995. Ses albums les plus connus restent "Charlatan" (1988), "Ratata" (1990) "Idiots Savants" (1993) ou "À la française" (1995), sommets d'une décennie où il a changé le visage de la chanson francophone. En sortiront des chansons de référence ("Les yeux de ma mère", "Vive ma liberté", "Lonesome Zorro", "Tango de la peau") au croisement de l'exigence dans l'écriture et de la spontanéité du rock, dont Arno n'était jamais vraiment très loin. Bien d'autres titres pourront à la fois caractériser l'artiste, comme plus récemment les "Je veux vivre", "Solo Gigolo", "Quelqu'un a touché ma femme", "Je veux nager", "Il est tombé du ciel"...

Arno se fera aussi connaître du grand public avec plusieurs reprises dont les désormais célèbres "Filles du bord de mer", chantées à l'origine par Adamo, ou "Ils ont changé ma chanson" de Dalida. Les réarrangements parfois foutraques de certaines références deviendront sa marque de fabrique. Le chanteur est aussi apparu dans une quinzaine de films, dont "Komma" en 2006, où il tient le rôle principal.

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