Ces commerces auxquels les Français sont si attachés disparaissent dans de très nombreuses communes
Nos petits commerces disparaissent. C'est le constat alarmant du député macroniste Guillaume Kasbarian : "La dévitalisation des zones rurales a fait passer en France le nombre de cafés et bistrots de 200 000 en 1960 à 38 800 en 2023". Au total, plus de 150 000 établissements ont fermé en l'espace de 63 ans. Un comble pour ces lieux de vivre-ensemble inscrits depuis septembre 2024 au patrimoine immatériel français.
Cette inscription est le résultat de six années de mobilisation menée par l'association des Bistrots et cafés de France, présidée par Alain Fontaine, chef du restaurant Le Mesturet à Paris. Leur prochaine cible est l'Unesco, qui gère le patrimoine immatériel de l'humanité. Depuis des années, le restaurateur alerte sur la disparition de ces commerces. "En trente ans, le nombre d'établissements de restauration n'a pas baissé, alors que le nombre de bistrots, si. Ils représentaient 50% de la restauration parisienne contre 14% aujourd'hui", déplore-t-il au Monde.
Mais comment expliquer cette baisse significative ? Pierre Boisard, sociologue et auteur de La vie de bistrot, énumère trois facteurs incriminants : la diminution du nombre d'ouvriers (lesquels avaient la culture du café), la concurrence des fast-food, qui font de l'ombre aux établissements anciens, et un phénomène de désertification plus général.

Pour Guillaume Kasbarian cependant, il y a un quatrième élément à charge. "La réglementation administrative a pu contribuer au phénomène en rendant très difficiles les transferts de licences IV ou en faisant peser des contraintes lourdes pour l'ouverture de nouveaux débits", écrit l'ancien ministre de la Fonction publique dans l'exposé des motifs de sa proposition de loi en faveur du retour des bistrots dans les petites communes.
Le texte, visant à simplifier l'ouverture de débits de boissons dans les communes de moins de 3500 habitants, a été adopté le mercredi 5 mars en commission. Il consiste à faciliter l'obtention de nouvelles licences IV, une autorisation permettant la vente d'alcools forts, soit un taux supérieur à 18°. La procédure se ferait sur déclaration auprès du maire.
Pour l'instant, un établissement est en droit l'obtenir, après autorisation préfectorale, que si un autre établissement du département met la clé sous la porte. Mais encore faut-il avoir les moyens d'acheter cette licence. Son prix peut en effet atteindre plusieurs dizaines de milliers d'euros, y compris en zone rurale. Si Guillaume Kasbarian ne nie pas les enjeux de santé publique relatifs à sa proposition - l'alcool est responsable de 41 000 décès par an - le député souligne le rôle de régulation des gérants, qui exerce légalement "une responsabilité déléguée par l'État d'encadrement de la consommation".