Un dispositif inspiré du modèle antimafia italien : le plan de Gérald Darmanin pour "couper du monde" les narcotrafiquants
Gérald Darmanin annonce une transformation en profondeur. Dans un entretien accordé au Figaro ce jeudi 20 février, le ministre de la Justice expose son projet de centres pénitentiaires ultra-sécurisés, destinés à isoler totalement du reste de la société et "couper du monde" les 100 principaux trafiquants de drogue actuellement détenus en France.
L'objectif est d'imposer à ces prisonniers – et plus largement à au moins un millier d'individus jugés parmi les plus menaçants – un régime carcéral particulièrement strict, inspiré des dispositifs antimafia italiens. Ces détenus seront placés dans des établissements dédiés, pour une durée de quatre ans renouvelable sur décision ministérielle, à l'instar du modèle appliqué en Italie.
Parmi les dispositifs envisagés par le ministre de la Justice : le recours systématique à la visioconférence pour limiter les extractions, sauf décision contraire d'un magistrat, ainsi que des fouilles obligatoires après chaque parloir, qui se dérouleraient derrière des hygiaphones.
Six heures d'échanges téléphoniques par semaine
Les détenus ne pourraient plus échanger que trois fois deux heures par semaine, contre un accès illimité actuellement via les téléphones fixes des prisons. Le programme prévoit également la suppression des unités de vie familiale. Selon Gérald Darmanin, ces mesures visent à rendre ces établissements totalement hermétiques, coupés de tout lien avec l'extérieur.
Des mesures qui posent question pour certaines associations. "La prison a une fonction punitive, c'est sûr. Mais un jour, ces gens sortiront. À ce moment-là, ils seront encore plus dangereux que lorsqu'ils sont rentrés, ça c'est quand même un problème", défend Évelyne Sire-Marin, magistrate et vice-présidente de la Ligue des droits de l'homme.
Dans son entretien au Figaro, le ministre affiche clairement ses ambitions : "D'ici 2027, je souhaite la création de quatre à cinq établissements de haute sécurité". Il annonce également que les premiers transferts de détenus débuteront dès la fin mars, suivis de travaux menés à un rythme accéléré, afin d'y incarcérer les narcotrafiquants dans un isolement total.
Gérald Darmanin affirme que la première de ces prisons spécialisées sera pleinement opérationnelle d'ici le 31 juillet. Il précise aussi que leur ouverture s'accompagnera d'une formation spécifique pour le personnel pénitentiaire, afin de leur garantir des conditions de travail sécurisées.
Le vendredi 14 février, Gérald Darmanin avait alors assuré qu'il y avait actuellement quatre centres pénitentiaires éligibles pour accueillir le dispositif : celui de Vendin-le-Vieil (Pas-de-Calais), la maison centrale de Saint-Maur (Indre), le centre pénitentiaire d'Alençon-Condé-sur-Sarthe (Sarthe) et la maison centrale d'Arles (Bouches-du-Rhône). Une fois son choix fait, quatre millions d'euros seront investis pour "rénover cette prison".
Un narcotrafiquant "ne peut pas avoir une vie agréable"
Si le ministre de la Justice a bien insisté sur l'aspect hermétique de cette nouvelle prison, c'est bel et bien parce que les narcotrafiquants qui y séjourneront n'ont pas un profil comme les autres. "On a la liste des 100 personnes qui iront dans cette prison", a-t-il lancé. Toutefois, il ne s'agit pas des détenus "les plus dangereux". En réalité, ce sont "ceux qui peuvent communiquer à l'extérieur, qui peuvent organiser leur trafic depuis la prison", a-t-il rappelé.
En janvier dernier, lors de l'annonce du projet, Gérald Darmanin regrettait la "mixité" entre ces profils et d'autres détenus, un procédé qui ne fonctionne visiblement pas en raison de la différence de "dangerosité" entre eux. Pour lui, cette prison nouvelle génération entend montrer "que quand on est en prison et qu'on est un grand narcotrafiquant, on ne peut pas téléphoner et on ne peut pas avoir une vie agréable".