Prince Andrew : une déchéance et des rancœurs
Son train de vie, ses liens avec Jeffrey Epstein et une accusation d'agressions sexuelles : ses casseroles ont poussé la couronne britannique à écarter progressivement le prince Andrew de la famille royale.
Il est le plus impopulaire des membres de la famille royale : selon le dernier baromètre YouGov, 89% des Britanniques ont une opinion négative du prince Andrew. Et pour cause, le huitième dans l'ordre de succession au trône est petit à petit écarté par le palais royal à cause d'accusations de scandales sexuels qui embarrassent la Couronne.
Début 2022, Andrew a évité la tenue d'un procès civil à New-York en fixant un compromis financier avec Virginia Guiffre. Cette Américaine l'accusait de relations sexuelles forcées à trois reprises en 2001 alors qu'elle n'était âgée que de 17 ans. L'accord est confidentiel, mais la presse britannique avançait le montant de 14 millions d'euros.
Face à ce scandale, le Prince Andrew s'est vu retirer ses titres militaires et toutes fonctions honorifiques. Il n'est également plus qualifié d'Altesse royale. Les humiliations s'enchaînent pour lui-même si celle d'un procès public aurait été encore importante. La famille royale avait déjà peu apprécié l'interview accordée à la BBC par Andrew malgré le désaccord de son conseiller en communication.
Le résultat fut un désastre : aucune excuse ou empathie envers les victimes, défense très maladroite et aucun regret d'avoir été proche du pédophile Jeffrey Epstein. Netflix a même lancé la production d'un film sur les dessous de cette interview, un signe de l'écho désastreux de ce choix d'Andrew. Le quotidien Guardian résumait ainsi l'interview : "Il n'avait pas l'air conscient du sérieux de l'affaire, riant et souriant à plusieurs reprises pendant l'interview et n'exprimant aucun regret ou inquiétude envers les victimes d'Epstein."
Cette interview avait mis fin aux activités publiques du prince afin de stopper les frais pour la famille royale. La ville d'York a également obtenu la perte du titre honorifique de duc d'York, signe de sa très faible popularité. Andrew s'est pourtant de nouveau signalé en montrant son mécontentement à propos de l'héritage de sa mère.
Selon des révélations du The Mail on Sunday, Andrew nourrirait "du ressentiment" à l'égard de son frère le roi Charles et serait "au désespoir" face à l'héritage de sa mère intégralement transmis à Charles. Ce choix d'Elizabeth permet à Charles III d'échapper à l'impôt sur la succession grâce à un legs de monarque à monarque.
Cela évite à Charles III de payer pour conserver les résidences de Balmoral et Sandringham par exemple. La fortune léguée est estimée entre 370 millions de livres selon le Times et 650 millions de livres selon le Daily Mail (soit entre 419 et 736 millions d'euros).
Le déclassement progressif d'Andrew
En plus de la perte de ses titres honorifiques dans la famille royale puis de ses titres militaires, Andrew pourrait être délogé par Charles III. Il occupe la demeure de Royal Lodge avec son ex-femme Sarah Ferguson depuis 2003. Après avoir investi près de 9 millions d'euros pour rénover cette maison, le prince espère la conserver. Mais il va être difficile pour lui de financer son fastueux train de vie : sa subvention annuelle, attribuée par la Couronne (près de 283.000 euros), va bientôt disparaître avec sa mise à l'écart de la famille royale. Il devra donc faire avec sa pension militaire de 22 000 euros par an qui constitue l'essentiel de ses revenus.
Lors de l'accord amiable passé avec Virginia Guiffre, la presse britannique indiquait que c'était sa mère Elizabeth II qui avait dû payer les 12 millions de dollars pour éviter le procès même si Andrew avait vendu pour 14 millions de dollars son chalet à Verbier en Suisse. Le tabloïd The Sun indiquait en janvier que : "Le roi a clairement fait savoir que Buckingham Palace n'est pas un endroit pour le prince Andrew. Tout d'abord, son bureau a été fermé l'année dernière et maintenant ses quartiers d'habitation."
Le rôle d'Andrew lors des funérailles d'Elizabeth II
Andrew a été là tout au long des obsèques de sa mère, la reine Elizabeth II mais sa présence n'a pas réjoui tout le monde. Le troisième fils de la reine, également réputé pour être son préféré, a perdu ses titres royaux en début d'année trois ans après avoir été mêlé au scandale de l'affaire Epstein. C'est encore par ce prisme qu'Andrew est apparu aux yeux du Royaume-Uni ces derniers jours même lorsqu'il a rendu un hommage personnel à la reine dans un communiqué publié le 18 septembre, la veille des funérailles. "J'ai trouvé votre savoir et votre sagesse infinis. [...] Vos idées, vos conseils et votre humour me manqueront. Tandis que notre page d'aventures se tourne, une autre s'ouvre, je vous garderai toujours près de mon cœur avec mon amour et ma gratitude les plus sincères, et j'irai vers la prochaine gaiement avec vous comme guide", a-t-il écrit en tant que fils, sujet et admirateur. Mais plus que d'émouvoir le message a suscité la colère des internautes et des Britanniques pour qui Andrew a sali la famille royale.
Les précédents hommages d'Andrew à sa mère ont aussi été ternis en plus d'être privés de certains symboles. A chaque représentation officielle et pendant les cortèges funèbres, notamment ceux des funérailles le 19 septembre, Andrew a été le seul des quatre enfants de la reine à ne pas pouvoir revêtir l'uniforme militaire. Pire, l'homme a été interpellé et qualifié de "vieux pervers" lorsqu'il défilait derrière le cercueil de sa défunte mère, le 11 septembre à Edimbourg.
Andrew n'a pas pu compter sur le soutien de son frère, le roi Charles III, qui n'a pas daigné lui confier le moindre rôle public pendant ou après les funérailles d'Elizabeth II. Son seul privilège étant d'avoir hériter des chiens de la reine, les corgis adorés de sa mère.
Le message d'Andrew à la reine Elizabeth II
Un communiqué. C'est par cette voie qu'Andrew a adressé un dernier mot à sa mère la reine Elizabeth II, le 18 septembre à la veille des funérailles d'Etat. L'homme y parle à sa mère à trois égards, "chère Maman, Mère, Votre Majesté", et rappelle à quel point la connaître et la servir "a été un honneur et un privilège". "Maman, je chérirai pour toujours votre amour pour un fils, votre compassion, votre bienveillance, votre assurance. J'ai trouvé votre savoir et votre sagesse infinis, sans limites ni retenue. Vos idées, vos conseils et votre humour me manqueront", explique-t-il plus longuement avant de conclure : "Tandis que notre page d'aventures se tourne, une autre s'ouvre, je vous garderai toujours près de mon cœur avec mon amour et ma gratitude les plus sincères, et j'irai vers la prochaine gaiement avec vous comme guide".
Alors qu'elle l'avait elle-même relevé de ses fonctions au sein de la monarchie en 2022, elle se montrait régulièrement à son bras lors de ses dernières apparitions publiques comme pour manifester aux Britanniques le pardon qu'elle lui avait accordé. Des actions et un amour maternelle qui n'ont pas réussi à effacer la mauvaise réputation de son fils et la haine que le Royaume-Uni éprouve à l'égard d'Andrew.
Quelles sont les accusations portées à l'endroit du prince Andrew ?
Celui qui a été longtemps présenté comme le "fils préféré de la reine" s'est retrouvé impliqué dans un scandale d'agressions sexuelles du fiat de ses liens avec Jeffrey Epstein. L'une des victimes du milliardaire, Virginia Roberts Giuffre a accusé également le prince Andrew d'avoir eu des rapports sexuels avec elle, moyennant rémunération, alors qu'elle n'était âgée que de 17 ans au moment des faits, en 2001, sur l'île privée des Caraïbes d'Epstein, mais aussi à Londres et à New York. Le prince Andrew a toujours contesté les faits, mais les révélations qui se sont succédées sur le trafic sexuel orchestré et organisé pendant des années par Jeffrey Epstein a donné une épaisseur considérables à ces accusations.
Un accord financier avec Virginia Giuffre pour éviter un procès
En février 2022, les poursuites judiciaires visant le prince Andrew ont été abandonné, à la suite d'un accord financier. "Virginia Giuffre et le prince Andrew sont parvenus à un accord à l'amiable"
, avait publiquement annoncé l'avocat de Mme Giuffre, sans que les termes du contrat soient révélés. Le document judiciaire dévoilé à l'époque indiquait simplement que le prince Andrew avait "l'intention de faire un don important à l'organisation de Virginia Giuffre qui soutient les droits des victimes". Etait également écrit dans ce même document : "Le prince Andrew n'a jamais eu l'intention de dénigrer Mme Giuffre, et il reconnaît qu'elle a souffert à la fois en tant que victime établie d'abus et à la suite d'attaques publiques injustes". Par cette démarche, le prince Andrew évitait alors la tenue d'un procès, qui aurait considérablement embarrassé la famille royale. Il n'est par ailleurs nulle part fait mention de regrets concernant un écart de conduite de sa part avec Virginia Giuffre.
Andrew mêlé à l'affaire Epstein
Si le prince Andrew est aussi impopulaire, c'est notamment pour la manière dont il a défendu Jeffrey Epstein en 2019. On lui a beaucoup reproché un manque d'empathie vis-à-vis des victimes d'Epstein, après avoir assuré n'avoir jamais "soupçonné" d'abus sexuels de la part de son ami. Face à la tempête médiatique, le prince avait choisi de se retirer de la vie publique et de ne plus assurer ses fonctions officielles. "Il est devenu clair pour moi ces derniers jours que les circonstances de mes liens passés avec Jeffrey Epstein sont devenues une perturbation majeure du travail de ma famille et du [mien]", avait-il écrit dans un communiqué officiel en 2019. Une démission qui avait induit le transfert de son bureau de Buckingham Palace et de son équipe à son domicile privé de Windsor. Les avocats des victimes de Jeffrey Epstein, accusé de prostitution de jeunes filles mineurs, avaient en outre sommé le prince Andrew de témoigner sur les activités du milliardaire américain, qui s'est suicidé en prison en août 2019.
Une interview ratée accordée à la BBC
En novembre 2019, le prince Andrew avait souhaité éteindre l'incendie de l'affaire Epstein en donnant une interview à la BBC. Celle-ci a été jugée catastrophique par la presse britannique. De nombreux observateurs lui ont reproché de ne pas avoir l'air "conscient du sérieux de l'affaire, riant et souriant pendant l'interview", rapportait alors le quotidien britannique The Guardian. Les arguments du prince Andrew avaient aussi largement été remis en question ou moqués par la presse, à commencer par l'alibi invoqué par le septième héritier de la Couronne. Ce dernier avait en effet affirmé se trouver dans un restaurant de la chaîne Pizza Express, à Woking, au sud de Londres, au moment des faits dont il est accusé. Le prince Andrew s'est ensuite lancé dans des explications confuses sur la description faite par Virginia Roberts de ce dernier, transpirant abondamment sur la piste de danse d'un club londonien en 2001. "Impossible", selon le frère du prince Charles, en raison d'une maladie liée à une montée d'adrénaline pendant la guerre des Malouines en 1982, où il était pilote d'hélicoptère.