Najat Vallaud-Belkacem, Christiane Taubira, Ségolène Royal, Marisol Touraine... Qui sera candidate ?
[Mis à jour le 2 décembre 2016 à 17h06] C'est déjà écrit, ou presque. La primaire de la gauche, qui va se tenir au mois de janvier 2017, devrait opposer les "deux gauches irréconciliables", théorisées par un certain Manuel Valls lui-même : d'un côté la gauche traditionnelle, accrochée selon lui à ses totems ou à ses archaïsme, et de l'autre une gauche "social-réformiste", "républicaine", attachée à la sécurité, la laïcité et ouverte aux entreprises. Le Premier ministre entend bien évidemment incarner cette seconde vision, face aux sympathisants de la gauche d'abord, puis face aux Français, lors de l'élection présidentielle. Il se voit sans doute déjà batailler face aux Montebourg, Hamon, Lienemann et autre Filoche, qui ont dézingué pendant des mois sa politique et celle de François Hollande. Un François Hollande dont il dit vouloir aujourd'hui "défendre le bilan".
Pourtant, trois ministres et une ancienne ministre du même François Hollande pourraient venir perturber ce scénario parfait, presque épique. Najat Vallaud-Belkacem, Marisol Touraine, Ségolène Royal et Christiane Taubira pourraient elles-aussi revendiquer, chacune à leur façon, leur part d'héritage du hollandisme lors de cette bataille. Celle du "vrai" hollandisme s'entend. Pas celui qui a été dénaturé depuis avril 2014 par le "vallsisme" qui aurait blessé la gauche.
Najat-Vallaud Belkacem pourrait en effet être candidate à la primaire, pour défendre une alternative entre Manuel Valls et Arnaud Montebourg. On s'en souvient, la ministre de l'Education, fidèle parmi les fidèles de François Hollande depuis la campagne de 2011, lors de laquelle elle fut porte-parole, a déjà montré ses désaccords avec son Premier ministre. Ce fut le cas très récemment, lors de la polémique sur les arrêtés municipaux contre le burkini. Manuel Valls, isolé à gauche, les avait soutenus, face à ce qu'il considérait comme une "provocation", symbole de la volonté de l'islam radical de "s'imposer dans l'espace public". Najat-Vallaud Belkacem avait quant à elle dénoncé la "prolifération pas bienvenue" de ces arrêtés, évoquant une "dérive", une "exploitation politique" du phénomène, qui revenait à mettre "de l'huile sur le feu", à "libérer la parole raciste" et à prendre prétexte de "la question de l'égalité homme-femme" pour "stigmatiser la religion musulmane". A l'époque, des proches de la ministre avaient laissé entendre qu'elle pensait déjà à se présenter à la primaire du PS en cas de renoncement de François Hollande. L'heure du choix est aujourd'hui arrivé.
Marisol Touraine fait aussi partie de ces proches de François Hollande qui goûtent peu certaines déclarations de Manuel Valls. La ministre de la Santé, qui ne cesse de vanter son bilan et de clamer qu'elle est parvenue à redresser les comptes de la Sécurité sociale, ne digère pas que le Premier ministre ait poussé le chef de l'Etat à l'abandon en accentuant méthodiquement la pression depuis le début de l'année. Elle aussi avait dénoncé la position du chef du gouvernement sur le burkini dans une tribune : " Faire comme si, en se baignant voilée ou en restant habillée sur une plage, on menaçait l'ordre public et les valeurs de la République, c'est oublier que ces valeurs doivent précisément permettre à chacun de ne pas renier son identité", écrivait-elle, rappelant que "la laïcité n'est pas le refus de la religion".
Un retour de Christiane Taubira ?
Christiane Taubira pourrait venir compléter ce duo, avec une ligne assez proche. L'ancienne Garde des Sceaux avait quant à elle claqué la porte du gouvernement en pleine polémique sur la déchéance de nationalité, à la suite des attentats de Paris. Une mesure abandonnée que François Hollande a qualifiée d'erreur dans son discours de renoncement jeudi soir. Pendant une large partie du quinquennat, elle aura été en conflit avec Manuel Valls, d'abord place Beauvau, puis à Matignon. Contre le tout répressif (et le tout pénitentiaire), la ministre de la Justice a fait adopter en 2014 une réforme pénale, créant une nouvelle peine sans emprisonnement. Une réforme que Manuel Valls, aurait tenté de torpiller dès 2013 selon Le Monde. Suivront tacles, menaces à peine voilées et recadrages en série entre ces deux personnalités très fortes de la majorité. Christiane Taubira, qui est restée proche de François Hollande malgré sa démission, a indiqué à plusieurs reprises qu'elle prendrait "sa part" dans l'élection à venir. Une pétition, lancée par un anonyme sur la plateforme change.org, a recueilli à ce jour plus de 75 000 signatures pour appeler à sa candidature.
Ségolène Royal, enfin, reste une énigme au milieu de ces femmes ministres qui pourraient incarner l'autre versant de la hollandie. L'ancienne compagne de François Hollande et mère de ses quatre enfants est revenue sur le devant de la scène en 2014, en devenant ministre de l'Environnement. Aussi proche que fidèle politiquement au chef de l'Etat, elle serait aujourd'hui l'une de ses conseillères les plus influentes et aurait même pesé dans son choix de se retirer. L'ancienne candidate du PS en 2007 jouit en outre d'une popularité grandissante. Elle a reçu ces dernières semaines plusieurs appels du pied d'élus socialistes, dont son lieutenant, le député des Bouches-du-Rhône Patrick Mennucci. Et sur plusieurs dossiers, comme le projet d’aéroport Notre-Dame-des-Landes dernièrement, Ségolène Royal n'a pas non plus hésité à montrer qu'elle avait du répondant face à Manuel Valls. Un Manuel Valls qui, rappelons-le, était son porte-parole lors du duel destructeur face à Martine Aubry lors du congrès de Reims en 2008.
NB : En marge d'un déplacement ce vendredi à Mexico, pour le sommet du C40 (réseau des grandes villes du monde pour lutter contre le changement climatique), Ségolène Royal a redit aux journaliste qu'elle ne serait pas candidate à la présidentielle, comme elle l'a déjà plusieurs fois indiqué depuis 2014.