VIDEO. Rachel Kéké : "Qui n'a gagné que 900 euros ici ?" Son coup de gueule à l'Assemblée

VIDEO. Rachel Kéké : "Qui n'a gagné que 900 euros ici ?" Son coup de gueule à l'Assemblée En pleine session de débats autour du projet de loi pouvoir d'achat, la députée LFI et ex-femme de ménage Rachel Keke a tenu à se faire entendre. Décryptage d'une prise de parole remarquée.

[Mis à jour le 21 juillet à 16h55] Cette nouvelle Assemblée n'a pas fini de nous surprendre. Ce 21 juillet, c'est une prise de parole particulièrement remarquée qui aura fait l'actualité. Dans cet hémicycle divisé sur les questions sociales, une députée s'est faite remarquer pour son coup de gueule inspiré de son parcours personnel. Rachel Keke, élue dans le Val-de-Marne sous l'étiquette de la Nupes après avoir battu l'ancienne ministre des Sports Roxanna Maracineanu aux législatives, s'était déjà faite remarquer pour avoir été "la femme qui a fait plier Ibis". De fait, son combat victorieux pour l'augmentation des salaires à l'Ibis-Batignolles contre le groupe hôtelier Accor en 2021 l'a érigée en figure des mobilisations sociales. Cette fois, elle a demandé aux députés de la majorité de réfléchir à deux fois sur leur "proposition de primes" visant à compenser la précarité salariale des personnes payées au Smic dans le cadre de la loi pouvoir d'achat.

En plein accrochage entre son parti - LFI - qui veut fixer le Smic à 1500 euros et le camp présidentiel qui s'y oppose, elle s'est appuyée sur son passé de femme de ménage pour sensibiliser les parlementaires de la majorité sur la question de l'augmentation des salaires. "J'aimerais savoir dans cet hémicycle qui a déjà touché 800 euros ? Qui a déjà touché 900 euros ? 1000 euros ? Personne !", s'est-elle notamment exclamée pour appuyer son argument du détachement des élites vis-à-vis de la réalité du quotidien d'une partie des Français. Pointant ce qu'elle perçoit comme un "mépris" des élus de Ensemble! vis-à-vis des "métiers essentiels" et de "ceux qui servent la France", elle s'est dite "horrifiée" de constater la manière dont les députés tranchent sur les questions économiques. Dans quels débats sociétaux et budgétaires cette prise de parole s'inscrit-elle ?

Quels sont les débats en cours autour de la loi pouvoir d'achat ?

C'était censé être un des sujets les plus consensuels dans l'hémicycle. Pourtant, le projet de loi pouvoir d'achat récemment proposé par le gouvernement provoque de nombreux remous à l'Assemblée. Opposant les députés de la France insoumise, qui souhaitent fixer le Smic à 1500 euros, aux députés du camp présidentiel qui refusent de céder, il catalyse les tensions autour de la fameuse prime Macron. Quand les uns se félicitent de ce dispositif qui avait concerné un salarié sur cinq en 2020 et souhaitent le conserver dans les grandes lignes (sachant que son plafond a été augmenté le 21 juillet), les autres souhaiteraient le tripler en le faisant passer de 1000 euros maximum par salarié, ou 2000 euros en cas d'accord d'intéressement, à respectivement 3000 et 6000 euros.

Rachel Keke s'est appuyée sur l'exemple de la situation salariale à Monoprix, à l'heure où plusieurs magasins de la chaîne se sont mis en grève pour demander des hausses de paie dans les Alpes-Maritimes. "Les salariés de Monoprix, ceux qui ont servi la France pendant le Covid-19, demandent seulement une augmentation des salaires. Le PDG de Monoprix a augmenté son salaire de 70%. Et vous refusez", a argumenté Rachel Keke, pointant le manque de réalisme des parlementaires qui, à ses yeux, ne parviennent pas à s'imager les conditions de travail et de vie des salariés précaires. Son camp a pour le moment échoué à faire appliquer la hausse du Smic à 1500 euros, puisque son amendement a été retoqué par une grand partie de l'Assemblée, avec seulement 121 voix "pour" (face à 257 voix "contre").

Quels sont les arguments des députés qui refusent d'augmenter le Smic ?

Le ton monte à l'Assemblée. Après l'invective de Rachel Keke ce 21 juillet, les réponses ne se sont pas faites attendre. "Vous avez dans votre parti des gens qui n'ont jamais gagné 800 euros par mois, vous avez un président de parti qui n'a sûrement jamais gagné 800 euros par mois", s'est défendu le député républicain Aurélien Pradié, en faisant allusion au salaire de Jean-Luc Mélenchon. "Nous sommes tout aussi légitimes que vous à exprimer la défense de nos concitoyens et des plus modestes", a-t-il protesté. Du côté de la majorité, on s'insurge de la tournure que prennent les débats dans l'hémicycle, en témoigne l'intervention d'Aurore Bergé,  la présidente du groupe Renaissance (ex-LaREM) à l'Assemblée nationale : "Nous sommes très calmes sur ces bancs. Nous acceptons des heures d'invective, d'interpellation, d'insultes qui ne cessent de fuser de cette partie de l'hémicycle (..). mais à un moment, ça suffit". Pour autant, le nœud du problème est avant tout d'ordre économique : les députés du camp présidentiel avancent leurs propres arguments pour soutenir la prime Macron.

Le gouvernement a pour l'heure retoqué la hausse des prix demandée par la formation Nupes, et ce en dépit de la hausse des prix. Cette dissonance quant à la tonalité économique à adopter intervient alors que les 577 députés de l'hémicycle ont tranché sur l'avenir de l'amendement n°936 porté par LFI, EELV, le PCF et le PS le 20 juillet au soir. A 257 voix "contre", la hausse du SMIC discutée dans le cadre des débats sur les "mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat" n'a pas été adoptée. Durant ces sessions de débats, la majorité présidentielle est restée postée sur ses positions en refusant de modifier le texte législatif sur le pouvoir d'achat pour y introduire une hausse des salaires, préférant passer par des primes. Parmi les arguments avancés, on trouve l'idée que porter le Smic 1500 euros net "menacerait l'activité de nos entreprises et nos emplois", comme le justifiait la rapporteure de la majorité Charlotte Parmentier-Lecocq, qui lui préfère "l'augmentation des revenus des salariés au Smic." Selon Perrine Goulet, également élue de la majorité (députée Modem de la Nièvre", si les 1500 euros "sont un très bel argument de com", "entre la revalorisation qui aura lieu au mois d'août et la prime d'activité auquel ont le droit les personnes qui sont au SMIC, on est déjà quasiment à 1500 euros", comme elle l'a affirmé au micro de BFMTV.

Autour du même sujet

Contemporain