Élection américaine : comment l'élection de Donald Trump a libéré la parole masculiniste ?
Depuis la victoire de Donald Trump à l'élection présidentielle américaine, les masculinistes s'en donnent à cœur joie. " Eh s....., on contrôle vos corps. Devinez quoi ? Les mecs ont encore gagné " a notamment lancé Nick Fuentes, influenceur américain, après l'élection. Il s'est goulument moqué de la tentative des Démocrates de faire élire une femme à la Maison-Blanche : "Il n'y aura jamais, jamais de présidente femme. Jamais ! C'est fini". "Un plafond de verre ? Mec, c'est un plafond de briques. Ta tête stupide continue de se heurter au plafond de briques", a-t-il longuement asséné dans son émission " America First ", rapporte Le Parisien. Il a aussi détourné le slogan féministe "My body, my choice", "mon corps, mon choix", lancé dans les années 1960 pour défendre la liberté sexuelle des femmes ainsi que leur droit à l'avortement. Cela donne "Your body, my choice", soit "ton corps, mon choix", qui illustre bien une volonté de contrôle sur le corps des femmes, initié par le retour en arrière sur le droit des femmes américaines à disposer de leur corps depuis l'annulation de l'article Roe v. Wade.
Ce slogan publié sur X a rapidement cumulé 95 000 vues, 52 000 likes, 36 000 republications et 21 000 commentaires, un vrai succès. Et Nick Fuentes n'est pas le seul dont le sexisme a été exalté par la victoire de Donald Trump. On remarque aussi l'utilisation de ce slogan chez les représentantes du mouvement "trad wife", qui sont des femmes qui plaident pour un modèle archaïque de la famille, avec les femmes à la maison et les hommes au travail. L'influenceur masculiniste Andrew Tate a également déclaré sur X, le 7 novembre : "J'ai vu une femme qui voulait traverser aujourd'hui, mais je ne me suis pas arrêté. Le droit de passage ? Vous n'avez plus le droit", pouvait-on lire avant que le post ne soit supprimé. Certains demandent même l'annulation du droit de vote des femmes.
Donald Trump libère la parole
Rien de surprenant au vu des positions clairement antiféministes de Donald Trump depuis plusieurs années, et même pendant la campagne contre Kamala Harris. La candidate démocrate s'est vue insultée, traitée d'handicapée mentale, questionnée sur son QI… Le président élu est aussi connu pour avoir un comportement plus qu'irrespectueux avec les femmes. Il a été reconnu responsable de l'agression sexuelle de l'ex-journaliste E. Jean Carroll en mai 2023. On se souvient également d'une scène filmée par la chaîne NBC en 2005, et rediffusée lors de la première campagne de Donald Trump, lors de laquelle il a affirmé : "Quand on est une star, elles nous laissent faire. On fait tout ce qu'on veut", ajoutant pouvoir " attraper " les femmes par " la chatte ". Il avait fini par s'excuser après la diffusion de ces propos.
Le président élu avait également eu des propos déplacés envers sa fille, Ivanka, dont il a affirmé pouvoir "sortir avec" si elle n'était pas sa fille. Lors de sa campagne contre Hillary Clinton en 2016, il avait réutilisé le scandale de tromperie de l'ancien président en assurant : "Si Hillary Clinton ne peut pas satisfaire son mari, comment peut-elle satisfaire l'Amérique ?". Et la liste est longue. Pas étonnant donc que les masculinistes se sentent libres d'insulter ouvertement les femmes et de promouvoir des comportements dangereux.
L'entourage de Donald Trump permet aussi cette décomplexion. J.D. Vance et Elon Musk sont des figures populaires chez les masculinistes qui considèrent qu'ils représentent des hommes forts. Le milliardaire a d'ailleurs changé la politique de X dès son arrivée à la tête du réseau social, laissant la place à des propos injurieux à l'égard des femmes, et réhabilitant même le compte de Nick Fuentes qui avait été banni pour des propos racistes, antisémites, sexistes et homophobes. Récemment, son adresse personnelle a été diffusée sur les réseaux sociaux et des femmes ont à nouveau détourné son slogan, devenant ainsi "Your home, our choice", soit "ta maison, notre choix", un trait d'humour sarcastique, qui pourrait tout de même être source de harcèlement, qui n'empêchera pas la machine masculiniste de progresser dans les esprits, y compris des plus jeunes, très présents et influençables sur les réseaux sociaux.