Du nez bouché à l'AVC ? Pourquoi les médicaments anti-rhume sont fermement déconseillés ?
Les médicaments anti-rhume ne sont plus mis en avant dans les pharmacies françaises et l'agence nationale de sécurité du médicament recommande de délaisser ces comprimés dénonçant des dangers trop importants.
La saison des rhumes a commencé et l'Agence nationale de sécurité des médicaments (ANSM) met une nouvelle fois en garde contre certains médicaments. Les comprimés anti-rhume connus sous le nom de Humex, Acitfed ou encore Dolirhume sont dans son viseur. Et la position du gendarme du médicament est sans appel comme le prouvent les déclarations de la présidente de l'ANSM, Christelle Ratignier-Carbonneil, dans les colonnes du Parisien : "Je veux dire aux Français : ne les utilisez plus !" La cause ? Des effets secondaires potentiellement très graves pour une maladie bénigne et une balance bénéfice-risque défavorable.
Le risque d'infarctus ou d'AVC
Ces médicaments anti-rhume sont des vasoconstricteurs qui utilisent la molécule pseudoéphédrine et si leurs effets sont quasi-immédiats et radicaux pour soulager un nez bouché, ils peuvent aussi entraîner des risques. Le principe de ces comprimés est de réduire la taille des vaisseaux sanguins, ce qui a pour effet de décongestionner le nez et les sinus en faisant dégonfler les muqueuses. Mais cette rétractation des vaisseaux n'est pas ciblée et peut s'opérer partout dans le corps, y compris près du cœur. "Ce resserrement peut provoquer une obstruction totale et aboutir à un AVC ou à un infarctus" prévient le docteur Gilles Munier, vice-président du Conseil national de l'ordre des médecins, auprès du Parisien.
"Le risque est très faible mais ces événements peuvent se produire quelles que soient la dose et la durée du traitement" précise l'ANSM. Si les cas sont rares, ils restent observés chaque année : 307 cas graves ont été recensés entre 2012 et 2018 selon la base nationale de pharmacologie. Un ratio jugé trop important et des risques considérés trop graves par le gendarme du médicament, pour soigner rapidement un rhume qui se résorbe généralement seul en 7 à 10 jours.
Les médicaments anti-rhume interdits ?
L'ANSM déconseille le recours à ces médicaments accessibles sans ordonnance au comptoir des officines, de même que le Collège de la médecine générale, le Conseil national professionnel d'ORL, l'Ordre national des pharmaciens et les principaux syndicats de pharmaciens d'officine. En conséquence, à compter du 23 octobre ces vasoconstricteurs ne seront plus mis en avant, pas même visibles parfois, dans les pharmacies et les pharmaciens sont invités à déconseiller les patients en quête de ces remèdes contre le rhume. Face aux enrhumés les plus insistants, l'ANSM demande d'informer précisément sur les bénéfices et les risques.
C'est une nouvelle étape du processus visant à limiter l'utilisation des comprimés anti-rhume. De nombreux pharmaciens rappellent déjà la longue liste des contre-indications que sont l'hypertension, le diabète, des antécédents d'AVC, de convulsion, l'insuffisance coronarienne, l'hyperthyroïdie, le glaucome oculaire ou encore une grossesse. Et la publicité pour ces médicaments est, elle, interdite depuis 2017. A noter que seuls les comprimés anti-rhume sont concernés par ces mesures puisque la délivrance des sprays nasaux est déjà encadrée et ne peut être faite que sur ordonnance d'un médecin. A noter que le recours aux vasoconstricteurs a déjà nettement diminué passant de 16 millions de boîtes vendues en 2010 à 3 millions en 2021, mais "c'est encore trop" pour Christelle Ratignier-Carbonneil.
Mais le champ d'action du gendarme du médicament s'arrête là, car seule l'agence européenne du médicament peut s'exprimer sur l'interdiction des médicaments. L'Union européenne a entrepris une réévaluation de ces vasoconstricteurs en début d'année 2023 et doit rendre un avis en février 2024.